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On a vu pour vous … Maltese, Il romanzo del commissario (Rai 1), par les auteurs de Gomorra

Encore une série sur la mafia ? Oui, mais nouvelle déclinaison du thème, Maltese est un thriller policier élégant et maîtrisé, particulièrement réussi.

C’est quoi, Maltese, il romanzo del commissario ? Au milieu des années 1970, Dario Maltese (Kim Rossi Stuart), commissaire à Rome, vient de se séparer de son épouse et a perdu la garde de sa fille. Né en Sicile, dans la ville de Trapani où il a grandi, il y revient pour le mariage de son meilleur ami, le chef de la police locale Gianni Peralta (Claudio Castrogiovanni). Mais lorsque celui-ci et sa fiancée sont abattus la veille de la cérémonie, Maltese demande son transfert pour se charger de l’enquête et découvrir les responsables du double homicide. Confronté au crime organisé, il va également devoir faire face aux fantômes de son passé et aux graves traumatismes familiaux qu’il pensait avoir laissés derrière lui.

Une enquête complexe pour Maltese, sur les traces de Cosa Nostra

 

Les fictions sur la mafia sont un genre à part entière en Italie : maîtrisant le sujet, nos voisins transalpins sont souvent capables de l’aborder sous un angle original et différent. Certaines productions n’ont malheureusement pas traversé les frontières (à l’instar de la magnifique La Mafia uccise solo d’estate) quand d’autres ont été diffusées à l’étranger (La Mafia, Corleone, Romanzo Criminale, Gomorra, Suburra). On espère que l’une des plus récentes, Maltese, fera partie de la seconde catégorie ; gros succès en Italie, cette mini-série en 4 épisodes conjugue habilement intrigue policière, contexte mafieux, reconstitution d’époque et drame psychologique.

Coproduite par la RAI et les Allemands de la ZDF, Maltese est née de l’imagination de deux scénaristes brillants, artisans de Gomorra : Leonardo Fasoli et Maddalena Ravagli. Maltese est une histoire originale, qu’ils ont écrite de A & Z en s’appuyant sur une trame classique, tout en y ajoutant une dimension psychologique et en la situant dans les années 1970. Si la reconstitution de l’époque est bluffante , Maltese n’en reste pas moins moderne dans sa mise en œuvre et sa réalisation – comme le montre par exemple la séquence d’ouverture, dans les rues de Rome, sur  une chanson de Creedence Clearwater Revival.


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Vingt ans après avoir quitté sa ville natale de Trapani, le commissaire Maltese y revient pour assister au mariage du chef de la police locale, qu’il considère comme un frère. Son meurtre, sous les yeux de notre héros, agit comme un électrochoc :  ayant fui la Sicile pour échapper à un traumatisme qui a pourtant continué à le ronger, Maltese prend conscience qu’il ne peut plus fermer les yeux sur son passé ou sur la situation dans l’île. Occupant le poste laissé vacant à la mort de son ami, il commence son enquête. Pressentant que les événements sont liés à son histoire personnelle, il  va tenter de relier les fils et de remonter jusqu’aux exécuteurs et aux commanditaires – quitte à risquer sa vie et à mettre au jour les secrets de famille qui l’avaient poussé à partir.

Mais en 1976, en Sicile, le mot mafia est tabou : on préfère nier l’existence de l’organisation, prétendre qu’il s’agit d’une légende urbaine ou de l’invention de journalistes en mal de sensations. Or, c’est précisément à cette époque que l’organisation monte en puissance et s’infiltre au sein des institutions, grâce aux immenses revenus générés par le trafic d’héroïne. Si Maltese comprend d’emblée que son ami a été tué par la mafia, il se heurte à l’hostilité de supérieurs pressés d’enterrer l’affaire, et l’omerta et à la peur que font régner les parrains dans la population. Déterminé, prêt à tout pour obtenir justice mais aussi à se libérer de ses démons, le commissaire peut toutefois compter sur l’aide de l’ancienne équipe de Peralta. Officieusement, il collabore aussi avec un journaliste (Francesco Scianna) et une photographe allemande (Rike Schmid), au charme de laquelle il n’est pas insensible…  

Le commissaire est secondé par des journalistes engagés

 

Construite de manière linéaire, Maltese déroule un récit chronologique : du meurtre jusqu’à sa résolution, la série suit l’enquête qui révèle progressivement un enchevêtrement de connexions et de conspirations au plus haut niveau, la pieuvre mafieuse déployant ses tentacules pour imposer son pouvoir au sein des institutions politiques, policières et judiciaires. Malgré un deuxième épisode un peu plus faible, l’ensemble fonctionne très bien: c’est l’histoire, classique, du combat du bien contre le mal, avec un protagoniste tourmenté qui cherche la rédemption à travers la résolution d’une affaire spécifique.

Dans le cadre sublimé de la région de Trapani, Maltese met en scène un univers violent, un monde de corruption, de meurtres et de fusillades, rendu encore plus sombre et dramatique en raison de l’implication personnelle du héros. Pour autant, la série évite habilement les poncifs du genre, notamment avec un Maltese qui n’a rien du justicier brutal ou du personnage taciturne et ténébreux. Au contraire, Kim Rossi Stuart (excellent, comme toujours) lui donne une forme de distance, de détachement malgré les répercussions personnelles que supposent son enquête. Sa relation avec sa fille, son attirance pour la photographe le rendent aussi moins rigide et moins austère. Une ambiance prenante, une enquête passionnante et, en arrière-plan, le portrait d’un homme complexe et attachant qui s’éloigne des archétypes et des clichés : autant de raisons qui font de Maltese une excellente série.

Dario Maltese, interprété par l’excellent Kim Rossi Stuart

En empruntant à la fois à des séries conventionnelles comme Montalbano et à des fictions centrées sur la mafia comme Gomorra, Maltese trouve le bon équilibre. Plus formelle que la première, moins théâtrale que la seconde, elle s’empare du thème de la lutte contre la mafia sous un angle légèrement différent, avec une intensité qui n’exclut pas la nuance ou la subtilité. Série remarquable, elle est déjà diffusée dans d’autres pays européens – on attend donc de voir Maltese de ce côté-ci des Alpes…

Maltese, il romanzo del commissario (RAI 1)
4 épisodes de 90′ environ.
Inédit en France.

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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