Forte du succès de Vikings, History s’empare cette fois de l’Histoire des Templiers. Entre quête du Graal et complots politiques, Knightfall ne fait rien de neuf – mais elle le fait bien.
C’est quoi, Knightfall ? 15 ans après avoir été vaincus et expulsés de Terre Sainte, les Chevaliers de l’Ordre du Temple ont trouvé refuge en France. Frustrés par leur défaite et leur éloignement du champ de bataille, ils sont toutefois à la tête d’une immense fortune, grâce à laquelle ils jouissent d’un certain pouvoir à la Cour. Parmi eux, Landry (Tom Cullen) est devenu l’un des hommes de confiance du roi Philippe IV Le Bel (Ed Stoppard). Mais dans l’ombre, Guillaume de Nogaret (Julian Ovenden) est décidé à faire tomber l’Ordre et à s’emparer de ses richesses. Dans le même temps, une nouvelle piste permet aux Chevaliers de repartir en quête du Graal, qu’ils ont perdu dans leur fuite…
Nouvelle série de la chaîne History, Knightfall lorgne de toute évidence du côté de Vikings pour tenter d’en réitérer le succès. Créée par Dan Handfield et Richard Rayner, avec Dominic Minghella comme showrunner, Knightfall porte bien son nom puisqu’elle raconte, en substance, la chute des Chevaliers de l’Ordre des Templiers. Rappelons au préalable que l’Ordre du Temple était une institution médiévale assez particulière : religieux ayant fait vœu de chasteté et vouant leur existence au service de Dieu, ses membres étaient aussi des soldats chargés de protéger les lieux sacrés et les pèlerins en Terre Sainte. Mais les richesses accumulées par les Templiers ont attisé bien des convoitises – et c’est ce qui les a conduit à leur perte.
La série débute justement à la veille de leur chute, lorsque vaincus par les Arabes en 1291, les Templiers perdent la ville d’Acre, dernier bastion chrétien au Moyen-Orient. En déroute, ils sont contraints de prendre la fuite et – zut alors ! – ils perdent le Graal en cours de route… Nous les retrouvons 15 ans plus tard, réfugiés à Paris. Ils n’en demeurent pas moins influents, la fortune qu’ils possèdent ayant fait d’eux les créanciers du Royaume de France. Conseiller du Roi Philippe IV Le Bel – et accessoirement amant de la Reine… – Landry est au cœur de la politique royale. A la tête de l’Ordre après la mort de son mentor, le pouvoir qu’il exerce lui vaut de nombreux ennemis. Parmi eux, Guillaume de Nogaret. homme de loi proche du Roi, ourdit dans l’ombre une conspiration afin d’anéantir définitivement l’Ordre dont il redoute la puissance. Dans le même temps, lorsque surgissent de nouveaux indices susceptibles de mener au Graal perdu, Landry et ses frères acceptent de reprendre les armes pour retrouver la relique sacrée, selon les ordres du Pape Boniface VIII (excellent Jim Carter – le majordome de Downton Abbey).
Indéniablement, Knightfall réussit son entrée en matière : rapidement et habilement, la série met en place le contexte, les grands enjeux qui vont servir de fil conducteur et les personnages. Une scène d’ouverture spectaculaire montre la déroute des Templiers en Terre Sainte et leur fuite chaotique, au cours de laquelle ils perdent le Graal, qu’ils étaient sensés protéger. Nous les retrouvons ensuite à Paris, à la cour des Capétiens. On entre ainsi directement dans le vif su sujet, la série introduisant autour de son héros, Landry, tous les autres protagonistes : ses frères d’armes (Tancrède et Parsifal par exemple), Nogaret ; le Pape, le couple royal, leur fille Isabelle, ou encore une jeune juive sauvée par les Chevaliers lors de la chute d’Acre . Des personnages bien interprétés, qui bénéficient dès le départ d’une épaisseur suffisante pour donner corps au récit.
Une histoire épique, des complots, une touche de mysticisme, un amour impossible… Il y a un peu de tout dans Knightfall. La série repose toutefois essentiellement sur l’enchevêtrement de deux intrigues principales, et c’est certainement l’équilibre entre ces deux axes narratifs qui déterminera le succès ou l’échec de Knightfall. D’un côté, les complots ourdis à la cour de France ; de l’autre, la quête du Graal perdu. Soit un récit historique et un récit légendaire, quoi que (apparemment) dénué de toute dimension magique. Pour l’instant à peine esquissée, on devine que la recherche du Graal va gagner en importance. Jusqu’à présent, c’est l’intrigue politique qui domine, avec l’expulsion des Juifs du Royaume, les finances de l’état, la politique matrimoniale de la France, les tensions avec l’Angleterre ou les royaumes espagnols…
Signalons malgré tout que la rigueur historique n’est (étonnamment) pas le souci premier de Knightfall. Nous sommes les premiers à marteler qu’en tant que fiction, une série a toute latitude à s’écarter de l’Histoire, à la détourner au profit de sa dramaturgie pour y insérer des intrigues sorties de l’imagination des scénaristes (comme ici, la liaison entre un templier et la reine) Mais il faut bien avouer que Knightfall en prend à son aise : la chronologie est bouleversée (au hasard : en 1306, le Pape Boniface VIII et la Reine Jeanne étaient déjà morts) et la série commet plusieurs contresens (par exemple l’influence du Pape ou le rôle joué par les Templiers et Philippe Le Bel lors de l’expulsion des juifs.) Des inexactitudes qui apparaîtraient anecdotiques si nous n’étions pas sur une chaîne nommée History… Par contre, Knightfall est très réussie dans ses décors, ses costumes et dans l’ambiance médiévale qu’elle entend recréer – notamment dans les scènes de combats au corps à corps. Suffisamment, en tous cas pour maintenir l’illusion et donner un socle au récit. Là encore, elle se rapproche de Vikings, série spectaculaire et efficace, malgré ses errements historiques.
A en juger d’après les deux premiers épisodes, Knightfall est une série correcte. Sans bonne ni mauvaise surprise, elle s’appuie sur un scénario intelligent, grâce auquel elle est susceptible de monter en puissance. Ces deux axes principaux – quête du Graal et intrigue politique – devraient lui permettre de développer un récit épique en même temps qu’une histoire plus complexe et plus subtile. Pour l’instant, Knightfall n’apporte rien de nouveau : bien écrite et bien réalisée malgré certaines libertés historiques, elle est largement susceptible de séduire les amateurs du genre.
Knightfall – History
10 épisodes de 45′ environ.