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On a (re)vu pour vous … House of Saddam, la série sur Saddam Hussein

OCS rediffuse la mini-série House of Saddam, qui retrace le parcours du chef d’état irakien de sa prise de pouvoir jusqu’à son arrestation.

C’est quoi, House of Saddam ? Irak, 1979. Issu d’une famille de bédouins désargentés, Saddam Hussein (Yigal Naor) a fait carrière dans l’armée et, à force d’ambition, est devenu le vice-président du pays. Second du régime, il est hostile à la politique du président Al-Bakr et organise un coup d’état pour prendre le pouvoir. Aussitôt, il lance une purge parmi les opposants et les cadres de son propre parti et confie les postes-clés à ses proches. Soucieux de l’influence grandissante de l’Ayatollah Khomeiny, Saddam déclenche une guerre contre l’Iran / Irak avec le soutien tacite des Etats-Unis. Mais désormais seul au sommet, il est emporté par sa mégalomanie et sa paranoïa grandissante, et il perd peu à peu le sens des réalités…

Produite conjointement par HBO et la BBC, House of Saddam est une série de 4 épisodes extrêmement efficace. Chaque volet se centre sur une époque du règne de Saddam Hussein, marquée par un évènement primordial : son accession au pouvoir, la guerre contre l’Iran, la recherche d’armes de destruction massive par l’ONU, et enfin la traque et la mort du dictateur. Diffusée pour la première fois en 2008 – soit moins de  deux ans après le procès et la pendaison de son héros – House of Saddam ne pouvait avoir le recul nécessaire pour dépeindre les évènements de façon dépassionnée et objective. C’est surtout vrai en ce qui concerne les causes et les conséquences d’une guerre contre l’Irak lancée par les USA et la Grande-Bretagne, et dont on connaît le caractère polémique et controversé. De même, la nature des relations internationales entretenues par le régime avec les puissances occidentales est largement sujette à caution.

Pour tenter d’éviter la polémique, la série centre son récit sur la seule personnalité de Saddam Hussein et sur sa mainmise sur son entourage familial. Plus que l’histoire d’un pays ou d’un régime politique, House of Saddam raconte celle d’un véritable chef mafieux, parvenu au pouvoir par la force et s’y maintenant dans le sang, quitte à massacrer son propre peuple et ses proches. Versant dans une paranoïa grandissante, rongé par la crainte de la trahison, Saddam Hussein fait preuve d’une violence incontrôlée envers ses proches, eux-mêmes terrorisés car se sachant toujours menacés. Ce sentiment de peur, de menace permanente est accentué par une narration qui se déroule quasi-exclusivement au sein du palais présidentiel , cadre fermé et étouffant propice à l’émergence d’une entropie claustrophobique.

Regarde les hommes tomber…

 

Basé sur de nombreux témoignages d’intimes, le portrait du Raïs est forcément partial. Peu importe, car c’est pris en tant qu’archétype du tyran qu’il acquiert toute sa dimension. De ce point de vue, dans l’analyse d’un homme sanguinaire qui verrouille le pouvoir en y plaçant ses proches comme des pions, et dont la psychose et la folie autodestructrice créent les conditions de sa propre chute, House of Saddam est un récit exemplaire. En revanche, cette focalisation sur la seule personne d’Hussein  se fait au détriment de l’arrière-plan politique, tant à l’intérieur qu’à  l’international. Les rivalités tribales et ethniques au sein de la population sont à peine esquissées, l’opposition entre Chiites et Sunnites est tout aussi vite expédiée, et la dimension géopolitique des relations internationales se limite au strict minimum. (L’invasion du Koweït apparaît par exemple comme un simple caprice sans visée stratégique, et la série donne en général le beau rôle aux Américains, présentés comme les libérateurs du peuple irakien.)

S’il convient de garder un œil critique, la série reste passionnante et prenante de bout en bout alors même qu’on en connaît le dénouement. La scène de la capture de Saddam est d’ailleurs une réussite, totalement anxiogène et réaliste. La construction, admirablement maitrisée, offre un récit solide et sans temps mort qui repose principalement sur des personnages complexes, ambigus et subtils, remarquablement écrits et interprétés. En particulier par Yigal Naor, saisissant Saddam Hussein, et dont la performance monstrueuse a largement été saluée. C’est bien sur lui que repose tout l’enjeu de House of Saddam : en choisissant d’aborder le règne de Saddam Hussein en redonnant toute sa dimension humaine au personnage, la série prenait le risque de susciter l’empathie et, au-delà de les expliquer, de justifier des agissements dont elle n’occulte rien. Ce n’est pas le cas, car Yigal Naor parvient, sans jamais tomber dans la caricature, à transcender le personnage pour le maintenir au niveau de la figure symbolique du tyran, tout en lui insufflant une humanité dérangeante.

Discutable sur la forme, forcément polémique en raison de ses partis pris, House of Saddam n’en demeure pas moins un récit édifiant qui s’écarte de l’analyse géopolitique pour dresser le portrait  d’un Saddam Hussein en symbole de la folie d’un tyran. Sur la situation politique en général, la série manquait clairement de recul au moment de sa sortie ; a posteriori,  elle est troublante au regard d’évènements plus récents, survenus dans les pays arabes au cours des dernières années. La chute de la maison Hussein, comme prélude à celles de Kadhafi ou Moubarak.

House of Saddam.

4 épisodes de 52’ – Sur OCS City à partir du 17 Juin à 20H40.

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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