The Sinner doit réussir le pari de reprendre les bases de la saison précédente – succès surprise de l’été dernier – tout en se renouvelant. Un défi en passe d’être relevé.
C’est quoi, The Sinner (saison 2) ? Bess (Ellen Adair) et Adam (Adam David Thompson) ont pris la route avec le jeune Julian (Elisha Henig), âgé de 13 ans, pour l’emmener découvrir les chûtes du Niagara. Fatigué par le trajet, le couple décide de s’arrêter dans un hôtel ; alors que rien ne le laissait présager, ils sont assassinés dans des circonstances atroces. Chargée de l’enquête, la jeune inspectrice Heather Novak (Natalie Paul) est décontenancée par la violence du double meurtre et par l’âge de Julian, principal suspect. Elle demande alors l’aide d’un vieil ami de son père, l’inspecteur Harry Ambrose (Bill Pullman), qui a démontré son expertise quelques mois plus tôt, en faisant la lumière sur les circonstances d’un autre meurtre. Celui-ci se rend sur place pour tenter de comprendre quelles obscures raisons se cachent derrière l’affaire.
En Août 2017, USA Network lançait dans l’indifférence quasi-générale sa nouvelle série, The Sinner, qui suivait l’enquête menée par Harry Ambrose, alors qu’il cherchait à comprendre pourquoi une mère de famille tranquille, Cora (Jessica biel), avait soudainement poignardé un inconnu sur une plage. Thriller psychologique dense et complexe, porté par l’interprétation impeccable de ses deux acteurs, cette première saison avait créé la surprise, fasciné le public et enthousiasmé les critiques. Elle avait en outre été nominée aux Golden Globes pour les prix de la meilleure mini-série et de la meilleure actrice (sans toutefois remporter les récompenses,). Forte de ce succès, la chaîne avait annoncé avoir commandé une suite ; on pouvait se demander quelle direction allait prendre la série, et plus encore si elle serait capable de rester fidèle à son atmosphère si particulière sans pour autant se répéter.
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Un seul épisode ayant été diffusé, il est trop tôt pour émettre un jugement définitif ; on peut toutefois se montrer raisonnablement optimiste, car il semble bien que The Sinner soit en passe de relever le défi. Les 45 premières minutes de cette deuxième saison introduisent en effet tous les éléments susceptibles de distiller la même ambiance, la même tension psychologique et la même noirceur, mais dans un contexte différent.
En premier lieu, The Sinner fait le choix judicieux de ne pas reprendre l’histoire qu’elle racontait en saison 1. L’enquête sur le meurtre commis par Cora est terminée, les zones d’ombre ont été éclaircies, et une suite n’aurait aucun sens. Logiquement, les scénaristes optent donc pour l’anthologie et repartent à zéro – en conservant toutefois le personnage de Harry Ambrose, lien cohérent avec la saison précédente. De nouveaux personnages apparaissent à ses côtés, notamment l’inspectrice Novak en charge de la nouvelle affaire, et Vera (Carrie Coon – toujours excellente), qui jouera un rôle capital dans l’histoire.
Avec une nouvelle intrigue, The Sinner reprend peu ou prou le même schéma. Ambrose est à nouveau appelé à enquêter sur une affaire de meurtre, alors que la culpabilité du principal suspect ne fait aucun doute. C’est justement ce qui interpelle l’inspectrice chargée de l’affaire, et la raison pour laquelle elle a demande l’aide d’Ambrose : le meurtrier, c’est Julian, un jeune garçon de 13 ans apparemment paisible et à l’air angélique. C’est lui qui a empoissonné et regardé mourir les deux victimes, lors d’un week-end de vacances – la scène est absolument glaçante. Depuis le meurtre, le jeune garçon alterne entre terreur mutique et crises de panique, et accuse le « méchant Julian » d’être responsable des faits. La scène finale de l’épisode laisse en outre augurer de nouvelles complications, en suggérant que le lien entre les deux adultes et l’enfant n’est pas celui qu’on croit, et que le voyage était peut-être moins innocent qu’un simple séjour touristique…
Tous les ingrédients de la saison précédente sont donc réunis : un crime violent et choquant, apparemment gratuit, dont les motivations sont sans doute à chercher dans le passé et l’inconscient de l’improbable meurtrier. En l’occurrence, l’identité de ce coupable est encore plus dérangeante puisque le bourreau (la victime?) est un enfant. Un choix aussi courageux que risqué, car l’essentiel de l’intrigue repose dès lors sur la crédibilité du jeune acteur Elisha Henig. Pour l’instant, il est absolument remarquable et incarne à merveille le mystérieux Julian, avec finesse et intensité, et parvient à instaurer un indéniable sentiment de malaise.
Dans le même temps, une aura de mystère entoure aussi Ambrose. Le voilà de retour dans la petite ville de Keller, où il a vécu dans le passé et qu’il a quittée pour des raisons inconnues. Y a-t-il un lien avec le père de l’enquêtrice ? Ou bien avec cette maison en flammes, à laquelle l’inspecteur ne cesse de penser ? Dans la saison précédente, Ambrose prenait conscience de ses propres difficultés et parvenait à une forme de sérénité grâce à ses échanges avec Cora ; il semble peu probable que ce rôle incombe à Julian et ce sera sans doute le personnage joué par Carrie Coon qui fera office de miroir. Reste à savoir comment les traumatismes des différents personnages vont se heurter et entrer en résonance, s’ils parviendront à se reconstruire, et surtout quels obscurs mécanismes ont fait de Julian le « pêcheur » de cette nouvelle saison.
Après un première saison riche et totalement maîtrisée, illustrant magnifiquement la complexité des mécanismes psychologiques à l’œuvre chez ses personnages, The Sinner reprend le même concept pour se pencher sur une autre histoire. Il serait prématuré de juger du résultat, mais si toute la saison est à la hauteur de ce premier épisode, The Sinner se maintiendra, a minima, au même niveau d’excellence. Cette saison 2 s’annonce prometteuse, intrigante et dérangeante ; ce serait probablement un péché de ne pas la regarder.
The Sinner (USA Network)
Saison 2 inédite en France.