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On a vu pour vous … les deux premiers épisode de Le monstre, la nouvelle série choc venue du Québec

Comme ce fut déjà le cas dans le passé, Séries Mania est l’occasion de découvrir de nouvelles pépites venues du Québec, à l’image de Le monstre (6 x 52 min).

C’est quoi Le monstre ? À 18 ans, Sophie tombe amoureuse d’un jeune homme au charisme envoûtant. Dès lors, rien n’est plus important pour elle que de passer du temps avec cet amoureux qui se révélera être un bourreau intraitable ne la laissant partir qu’au terme d’un combat inégal et dévastateur qui durera près de 3 ans.

« Chaque histoire de violence conjugale commence par une histoire d’amour »

Une voix off qui raconte une histoire qui pourrait être celle de tant de personnes, de tant de femmes. La lumière qui laisse place immédiatement aux ténèbres. Nous voilà plonger dans une succession de scènes d’une violence insoutenable. De lui, on ne devine qu’à peine le visage mais ses coups pleuvent sur une jeune femme, Sophie. Il va la tuer c’est certain. Des coups de poings, un oreiller sur le visage pour l’étouffer, ses mains qui serrent son cou. Elle ne peut lui échapper et le spectateur non plus. Comme ouverture de cette nouvelle série, le spectateur ne peut retenir sa respiration tant l’horreur est là, froide et insoutenable, implacable. Et, au bout de quelques minutes, « une délivrance » en la personne d’un homme venue délivrée Sophie de son bourreau. Dès lors, Le monstre épouse une double timeline pour sa narration : la reconstruction de Sophie et sa descente aux enfers.

En optant pour une ouverture « classique » pour ce genre d’histoire (L’emprise ou Jacqueline Sauvage ont démarré aussi par ce moment où ces femmes « se libèrent » de leur bourreau car en danger de mort), la série entreprend par la suite de nous raconter comment une histoire d’amour évolue en violence ; comment l’emprise se met en place (la scène de fin d’épisode 2 est saisissante, on a l’impression d’un homme prenant possession de l’esprit de sa compagne, c’est effrayant) ; comment petit à petit des éléments se mettent en place pour mener ensuite aux coups, à l’ultra violence. Le spectateur qui sait où cela va mener se retrouve en position de guetter ces signes « d’alerte », ces mots échangés qui résonnent en Sophie comme une voix intérieure lui disant de partir. Ce sont des regards d’enfants quand M se met en colère, la soeur de M qui dit à Sophie « je ne veux pas le mettre en colère » ou son propre père lui disant qu' »il n’est pas facile à vivre« . Jamais la réalisation n’opte pour une quelconque tentative de mettre le spectateur du côté du bourreau en le laissant se faire « piéger » par lui : si M (le bourreau) est montré au début sous un visage humain, on prend le temps d’installer son histoire d’amour, il n’est jamais présenté comme « un cas unique » : il n’a pas de prénom comme pour qu’il représente toutes ces histoires de violences conjugales dans lesquelles tant de femmes trouvent la mort.

Le monstre : une série nécessaire

Le monstre est une série puissante, servie par des choix narratifs et de mise en scène puissants et intelligents (« J’ai pu commencer avec leur rencontre, j’ai suivi le chemin du couple, leur attachement, puis on est descendus dans la violence. Ça nous a aidés d’y aller progressivement avec les comédiens, [ça nous a permis] de nous acclimater » a expliqué lors d’un point presse au Québec le réalisateur de la série Patrice Sauvé). La volonté de ne pas clairement montrer au début le visage de M quand les coups tombent sur Sophie par opposition à son visage toujours montré lorsque l’histoire d’amour se construit, contribue à toujours rappeler qu’il est la menace malgré des airs charmeurs. En ça, la prestation de Medhi Meskar est remarquable car il sait faire évoluer son jeu, les expressions de son visage afin que le spectateur saisisse son évolution, son passage de jeune homme d’aujourd’hui à bourreau. Bourreau qu’il ne devient pas, mais qu’il est, la narration ne cesse de ne le rappeler par petites touches. Face à lui, Rose-Marie Perreault est bouleversante de justesse dans le rôle de Sophie, qui croit en l’amour, veut le vivre intensément et ne se rend pas compte que M tisse sa toile autour d’elle.

La série choque, bouleverse, renverse. On n’ose pas enclencher la suite du visionnage de peur de voir un coup partir, des coups que la série montre crûment sans détourner les yeux, nécessaire pour montrer ce qui existe.

Le monstre est une série sur un pervers narcissique qui tisse sa toile autour de ses victimes et qui rend un hommage à toutes ces femmes qui souffrent et meurent sous les coups de leur conjoint chaque jour (l’actualité récente en France nous le rappelle inlassablement). Une série à voir.

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Rédacteur en chef du pôle séries, animateur de La loi des séries et spécialiste de la fiction française
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