The good fight enfonce le clou avec une nouvelle saison réjouissante, en jouant toujours sur une réalité qui dépasse souvent la fiction.
C’est quoi, The Good Fight (saison 4) ? Le cabinet de Adrian Boseman (Delroy Lindo), Liz Reddick (Audra McDonald) et Diane Lockhart (Christine Baranski) est dans une situation délicate : après avoir perdu leur plus gros client et leur réputation ayant été ternie par un scandale, les trois associés ont accepté l’offre de financement de STR Laurie. Désormais, les décisions sont prises par cette firme géante et par son dirigeant (John Larroquette). Les avocats continuent néanmoins de traiter des dossiers complexes voire sensibles. Diane, en particulier, se retrouve au cœur d’une mystérieuse affaire lorsque Julius (Michael Boatman), désormais juge, subit des pressions et est menacé par le « mémo 618 »…
Il faudra se contenter de sept épisodes : la quatrième saison de The Good Fight a en effet été écourtée en raison de la crise du coronavirus. Rappelons que la série, spin off de The good wife, est centrée sur le personnage de Diane Lockhart. Créées par Michelle et Robert King, les deux séries sont toutefois radicalement différentes dans le ton et la finalité : The good fight a d’emblée pris des airs de récit absurde et fortement politisé contre le président Trump, sans nuance ni scrupule. Encore que, cette saison soit moins encline au Trump-bashing que les précédentes… ou, disons, plus subtile dans ses attaques.
A ce titre, il faut revenir brièvement sur l’épisode qui ouvre cette saison. Souvenez-vous : la scène inaugurale de The good fight montrait Diane, assise devant la télévision au moment de l’annonce des résultats de la dernière élection présidentielle américaine ; hagarde, elle assistait à la victoire de Trump. Cette saison débute exactement de la même manière… sauf que, cette fois, Diane est aux anges : nous sommes à nouveau en 2016, mais c’est Hillary Clinton qui vient d’être élue.
Après un générique alternatif, comme un négatif de celui auquel nous sommes habitués (voir la vidéo ci-dessous), on bascule dans une sorte d’univers parallèle surréaliste. Pour tout le monde, la situation est normale ; Diane, elle, a l’impression d’halluciner mais de vivre un rêve éveillé. Pensez donc ! Hillary présidente, c’est la certitude que tout va bien en Amérique… ou pas. Car on s’éloigne très vite de l’utopie. La présence d’une femme républicaine à la Maison blanche, loin d’avoir résolu tous les dysfonctionnements, en a créé de nouveaux. Par exemple, le mouvement #MeToo n’a pas eu lieu et Harvey Weinstein est une personnalité respectée et toute puissante, un client du cabinet protégé par Boseman et Reddick. Et si finalement, Trump n’était pas le véritable problème mais seulement un symptôme de ce qui se passe aux États-Unis ?
Cette parenthèse déstabilisante est toutefois refermée à la fin de ce premier épisode (nous ne dirons pas comment ; le subterfuge est un peu facile mais acceptable). On revient alors dans notre réalité, avec l’actuel président, dans une suite d’épisodes abordant les nombreux sujets de société auxquels The good fight aime se confronter. Chacun des personnages va traiter différents dossiers, en écho avec l’actualité et jouant même avec une hyper-fictionnalisation de celle-ci.
Par exemple dans le troisième épisode, le chef du comité national démocrate demande l’aide du cabinet pour inciter les électeurs afro-américains à aller voter. La discussion qui en résulte parmi les employés résonne avec une acuité particulière en ce moment, puisqu’elle engendre des débats houleux sur la discrimination, le white privilege, les réparations en faveur des victimes de l’esclavage ou l’utilisation du mot en N. Le cinquième épisode s’inspire de l’affaire Edward Gallagher (un Navy seal accusé de crimes de guerre) ;dans le suivant, nos avocats sont parodiés par un ancien employé dans une pièce de théâtre (transposition d’une autre affaire, un ex-élève de l’université de Yale ayant écrit la pièce State Play pour se moquer de ses anciens professeurs de droit) ; dans l’épisode The gang offends everyone, Boseman et Reddick plaident une affaire concernant la sélection d’athlètes transsexuels aux Jeux olympiques… et ils se mettent tout le monde à dos (cis, trans, afro-américains, caucasiens, fédération, athlètes, et un juge qui ne comprend strictement rien au débat). Enfin, on ne peut manquer de citer le tout dernier épisode de la saison, au cours duquel le cabinet est engagé pour enquêter sur la mort mystérieuse d’un certain… Jeffrey Epstein !
Ces différentes affaires font l’objet d’un épisode et sont traitées avec un mélange de sérieux et de dérision, avec aussi quelques intermèdes musicaux délirants (même s’il y en a moins que dans la saison précédente). En arrière-plan, deux axes principaux courent tout au long de cette saison : d’une part, la mainmise de STR Laurie sur Boseman, Reddick & Lockhart et la façon dont le cabinet va s’en accommoder… puis tenter de s’en affranchir (N.B. : il faut toujours lire les mentions en petits caractères dans un contrat) ; d’autre part, le mystérieux mémo 618. En quoi consiste-t-il, qui l’a rédigé, pourquoi les juges se sentent-ils menacés ?
L’énigme ne sera que partiellement résolue puisque les derniers épisodes n’ont pas pu être tournés. Heureusement, grâce à son goût pour l’absurde souvent à la limite de la parodie, la série s’accommode assez bien de cette interruption imprévue, au terme de sept épisodes au lieu des dix initialement annoncés. Mais l’interrogation récurrente de cette saison sera encore d’actualité dans la prochaine : what is memo 618 ?
La cinquième saison de The Good Fight, d’ores et déjà confirmée, devra conclure les intrigues laissées en suspens – notamment celle concernant ce fichu mémo 618. Les King devront aussi tenir compte du départ de Delroy Lindo (Adrian Boseman) et Cush Jumbo (Lucas Quinn), dont on ignore s’ils reviendront dans les prochains épisodes pour refermer les arcs narratifs de leurs personnages respectifs. En attendant, The Good Fight continue de s’imposer comme une série surprenante et réjouissante, entre parodie et fictionnalisation brillante d’une actualité brûlante aux États-Unis.