Sur Netflix, la sixième saison de Lucifer met un point final à une série dont le parcours à l’écran aura été mouvementé.
C’est quoi, Lucifer (saison 6) ? Après avoir vaincu son jumeau Michael, Lucifer (Tom Ellis, toujours excellent) est désormais le successeur de son père, Dieu, qui a pris sa retraite dans une dimension parallèle. Mais le Diable tergiverse et hésite à occuper le trône céleste, d’une part parce qu’il doute de ses capacités et d’autre part parce qu’il s’interroge sur la suite de sa relation avec Chloé (Lauren German), qui a quitté la police. Le duo continue de se mêler aux enquêtes, désormais conduites par le lieutenant Corbett (Scott Porter). Pendant ce temps, Dan (Kevin Alejandro) cherche sa place dans l’au-delà, Maze (Lesley-Ann Brandt) s’apprête à régner sur les Enfers, Amenadiel (D.B. Woodside) a rejoint les forces de l’ordre et une ange mystérieuse nommée Rory (Brianna Hildebrand ) est à la recherche de Lucifer pour une bonne raison… La procrastination de Lucifer pourrait toutefois avoir des conséquences inattendues, pour lui comme pour l’humanité.
C’est peu de le dire : le voyage de Lucifer à la télévision aura été chaotique. Tirée du comics DC créé par Neil Gaiman, lancée sur la Fox en 2016 puis annulée en 2018 sur un cliffhanger non résolu, la série a été récupérée par Netflix et sauvée grâce à la mobilisation des fans et des acteurs eux-mêmes, à grands coups de #SaveLucifer sur les réseaux sociaux. Mais il est maintenant temps de dire adieu au Diable et à ses acolytes, au terme d’une sixième saison de dix épisodes disponible sur la plate-forme de streaming. Disons-le tout de suite : cette ultime saison offre aux spectateurs une conclusion douce-amère, émouvante et intense – malgré quelques passages un peu plus faibles.
Pour le showrunner Joe Henderson, le diable est dans les détails. Et ce n’est pas seulement un jeu de mots. La cinquième saison était censé être la dernière mais, suite à l’annonce d’une saison supplémentaire, on se demandait quelle tournure allait prendre l’histoire maintenant que Lucifer occupait la place de Dieu. En fin de compte, l’option choisie est maline : les intrigues épisodiques ont moins d’importance, le fil rouge est davantage présent, la dynamique repose autant sur les tensions entre les personnages et leurs questionnements que sur des rebondissements. Et se dessine ainsi en arrière-plan une légère réflexion sur la condition humaine, avec ces héros déchus tous en quête d’une forme de rédemption.
La grande réussite de Lucifer, c’est peut-être justement la manière dont elle se concentre sur ses personnages, s’appesantissant sur chacun d’eux pour leur offrir leur propre conclusion. A commencer par son anti-héros, dans une position ambiguë. Désormais légitime pour prendre la place de Dieu dans la Cité d’argent, Lucifer est pourtant réticent à succéder à son père sur le trône céleste et il continue de s’interroger sur sa véritable nature. Peut-être même plus encore que précédemment, car que peut faire le Diable quand il n’est plus sensé régner sur les Enfers et tourmenter les âmes damnées ?
Quant à savoir pour quelle raison Lucifer ne cesse de reporter son accession au trône, la réponse est donnée dans les derniers épisodes – même si l’on devine que ses réticences ont à voir avec sa certitude d’être un être malveillant et sa relation compliquée avec papa (joué par Dennis Haysbert dans la saison précédente). Cependant, au fil de la saison, c’est un nouveau Lucifer que l’on découvre : il n’est plus un diable manipulateur, blessant et débauché, mais prend conscience de sa part de bonté voire d’humanité, il s’ouvre progressivement aux autres et semble déterminé à ne pas répéter les erreurs paternelles – Dieu l’ayant abandonné quand il avait le plus besoin de lui.
Tous les autres personnages ont aussi l’occasion de briller. Chacun évolue à sa façon, jusqu’à un dénouement parfois surprenant. Sans trop en dévoiler, Maze redevient le centre d’une intrigue importante ; Amenadiel est confronté à des difficultés dans son nouveau job, Ella (Aimée Garcia) et Linda (Rachael Harris) ont droit à leur scène finale… Et une large partie de la saison donne enfin à Chloé la place qu’elle mérite puisqu’elle n’est plus seulement un cadeau divin offert à Lucifer mais une héroïne à part entière, qui plus est dotée des pouvoirs que lui octroie le collier de Amenadiel.
Seul point faible : Dan, l’ex-mari de Chloé dont l’histoire devait se terminer lors de la cinquième saison, ramené à l’écran par un subterfuge qui justifie maladroitement sa présence – le voilà désormais entre l’enfer et les limbes, où il tente de comprendre comment expier ses péchés pour accéder au Paradis. Enfin, deux nouveaux venus jouent un rôle plus ou moins important. Celui du nouvel enquêteur Corbett reste assez anecdotique ; en revanche, gardez un œil sur l’ange Rory, personnage essentiel irrémédiablement lié à Lucifer.
L’un dans l’autre, cette ultime saison pourrait être qualifiée de joli cadeau aux fans – auxquels elle adresse d’ailleurs de nombreux clins d’œil. Avec son ton toujours aussi décalé et son humour, Lucifer nous offre par exemple un épisode semi-animé bourré de références au pilote, ou une multitude d’allusions à d’autres séries telles que NCIS ou Bones (dont on attend maintenant un spin off.) Surtout, la série conclue son histoire et boucle la boucle avec dix épisodes équilibrés qui aboutissent à une fin un peu prévisible mais globalement cohérente – même si elle décevra probablement certains spectateurs tandis qu’elle séduira les autres.
Lancée en 2016, annulée, sauvée par les fans, récupérée au vol par Netflix : les voies du public et de Lucifer sont apparemment aussi impénétrables que celles de Dieu. Mais même le Diable doit savoir tirer sa révérence : Lucifer s’achève donc avec cette sixième saison qui ne devrait pas décevoir les fidèles de Mr Morningstar. C’est peut-être bien cette fin que l’on aurait choisie si Lucifer nous avait demandé : what is it that you truly desire ?
Lucifer
Saison 6 – 10 épisodes de 45 à 65′
Disponible sur Netflix.