La comédie vampirique What we do in the shadows nous offre une deuxième saison toujours aussi délirante, encore plus réussie que la première.
C’est quoi, What we do in the shadows (saison 2) ? A New York, l’équipe de tournage continue de filmer son documentaire sur le quotidien de trois vampires. On suit donc Nandor (Kayvan Novak), Laszlo (Matt Berry) et Nadja (Natasia Demetriou), mais aussi leurs colocataires : le « vampire énergétique » Colin Robinson (Mark Proksch) et le familier de Nandor, Guillermo (Harvey Guillén). Or, Guillermo est dans une situation délicate : il a découvert qu’il était le descendant d’Abraham Van Helsing, le célèbre chasseur de vampires. Bon… sang ne saurait mentir : à l’insu de ses maîtres, totalement inadaptés à notre époque et qui multiplient les maladresses en faisant n’importe quoi, Guillermo dézingue des buveurs de sang dans le sous-sol de la maison.
L’année dernière, Taika Waititi avait réussi le parti consistant à adapter son film What we do in the shadows en série. Le premier épisode annonçait une comédie complètement déjantée et, au fil de la saison, la série a gardé le même rythme et le même humour dévastateur en exploitant à merveille toutes les ressources comiques à sa disposition (personnages extravagants, situations improbables, faux documentaires, décalage entre trivialité de la vie quotidienne et ambiance surnaturelle), et en s’offrant même des guest stars comme Wesley Snipes, Tilda Swindon ou Danny Trejo dans des rôles parodiques.
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La deuxième saison enfonce le clou, et elle est même encore plus drôle et plus folle. On ne change pas une équipe qui gagne, les blagues les plus courtes sont les meilleures : voilà deux règles qu’adopte What we do in the shadows, en gardant le même ton, des personnages égaux à eux-mêmes et le format particulièrement adapté de petits épisodes d’à peine vingt minutes, qui filent en un éclair.
What we do in the shadows est une vraie réussite, ne serait-ce que parce qu’il y a matière à rire dans tous les épisodes. La grande force de la série réside sans nul doute dans la simplicité et l’évidence de son humour : c’est systématiquement débile, mais toujours inattendu. Pas de plaisanteries spirituelles ou élaborées, pas de références pointues ni de situations complexes, mais des gags simples, basiques et efficaces basés sur l’absurde et sur des scènes absolument idiotes qui provoquent non pas un simple sourire mais de grands éclats de rire.
Ce sont des choses aussi bêtes qu’un Lazslo qui devient méconnaissable grâce à un cure-dent, un Nandor persuadé d’être maudit à cause d’une chaîne d’e-mails, un nécromancien accro à son téléphone portable, une cérémonie occulte chez les voisins (en fait, juste la finale du super bowl), une chèvre qui parle… et une quantité impressionnante de blagues en-dessous de la ceinture et de jeux de mots. Sur le papier, ces idées semblent totalement stupides; elles le sont mais elles fonctionnent incroyablement bien.
Cette saison parvient aussi à exploiter davantage l’immense potentiel comique de Colin Robinson – alias « le gars qui ressemble à Dilbert ». C’est une créature d’un genre un peu particulier : un vampire « énergétique », qui puise sa vitalité en drainant l’énergie de ceux qui l’entourent. En gros, nous connaissons tous plusieurs Colin Robinson dans la vraie vie. Indéniablement, il monte d’un cran en terme de nuisance – et donc de drôlerie – grâce à des blagues redondantes et mortellement ennuyeuses, son activité de troll sur Internet et surtout une promotion au bureau (même s’il ne sait pas trop ce que fabrique son entreprise. Soit des aires de jeux pour enfants, soit des armes à feu.)
Comme dans la saison précédente, la série nous réserve son lot de caméos avec notamment Haley Joel Osmet et un certain Mark Hamill. Et on retrouve toujours le format du faux documentaire, avec des interviews des personnages face caméra, un point de vue externe à l’action via le regard du cameraman et un montage très dynamique.
Mais là où What we do in the shadows s’améliore cette saison, c’est en tirant partie du format sériel pour développer une histoire autour de ses personnages, et plus précisément de son seul protagoniste non-vampirique : Guillermo. Depuis qu’il a appris qu’il était un descendant du célèbre Van Helsing , le familier de Nandor traverse une crise d’identité : il reste fidèle à son maître et espère toujours que celui-ci finira par le transformer en vampire mais dans le même temps, il s’est découvert un don inné pour tuer le type de créatures qu’il rêve justement de devenir. S’y ajoutent son mécontentement et sa frustration parce qu’il ne se sent pas valorisé ni estimé à a juste valeur par Nandor et compagnie. A sa décharge, voilà dix ans qu’il vit aux côtés des vampires et les sert fidèlement, mais ceux-ci se désintéressent totalement de lui, au point d’ignorer jusqu’à son nom (Mickey Guillermo ? Guillermo Billermo ?)
Le final de la saison va rebattre les cartes. Alors que nous sommes les invités privilégiés d’un « Théâtre des vampires » à la fois délirant et sanglant, l’épisode s’achève sur un cliffhanger brutal – au propre comme au figuré – qui ne sera sûrement pas sans conséquence pour Guillermo (de la Cruz, si ça vous intéresse) et qui devrait chambouler la dynamique entre les personnages dans la prochaine saison, déjà confirmée. Taika Waititi passera toutefois le relais à d’autres scénaristes et, selon ses propres mots , il leur laisse le soin de trouver « un moyen de sortir de ce gros bordel. »
Deux saisons ont fait de What we do in the shadows une des meilleures comédies actuelles. Loin de toute subtilité, de toute portée sociale ou de toute profondeur intellectuelle, la série s’impose comme un moment de pur délire avec ses gags absurdes, ses réparties débiles et ses personnages inénarrables. Même sous la torture, nous nierons toute implication dans ce jeu de mots atterrant, mais : éclats de rire garantis à sang pour sang.