C’est sans doute l’un des projets français les plus attendus qui arrive : Jean Dujardin devient Zorro pour Paramount+ et France Télévisions.
Le « cavalier qui surgit hors de la nuit » revient cette année avec deux projets. Outre la série espagnole diffusée sur Prime et W9, il y a bien sûr ce Zorro avec Jean Dujardin qui est l’événement de cette rentrée avec sa diffusion sur Paramount+ (et France Télévisions plus tard dans la saison).
Vous allez forcément en entendre parler et comme on a eu la chance de la voir, on vous dit ce qu’on en pense … et ce n’est sans doute pas ce que vous auriez imaginé.
L’essentiel
En 1821, Don Diego de la Vega devient maire de sa bien-aimée ville de Los Angeles qu’il compte bien faire prospérer. Cependant, la municipalité est confrontée à des problèmes financiers du fait de l’avidité d’un homme d’affaires local, Don Emmanuel. Et face à l’injustice, les pouvoirs du maire s’avèrent insuffisants… Diego n’a pas fait appel à son double Zorro depuis 20 ans. Mais au nom de l’intérêt général, il n’a plus d’autre choix que de ressortir son masque et son épée. Très vite, Diego va rencontrer des difficultés à concilier sa double identité de Zorro et de maire, ce qui met à rude épreuve son mariage avec Gabriella, qui ignore son secret. Diego pourra-t-il sauver son mariage et sa santé mentale au milieu du chaos ?
Redonner vie à un tel personnage iconique de la pop culture était une gageure et il fallait une équipe capable de relever la mission. Entre Benjamin Charbit (Sous Contrôle, Gagarine, Notre Dame, Les Sauvages, En Liberté) et Noé Debré (Parlement, Stillwater, Dheepan) à la création, et des réalisateurs/rices de talent comme Jean-Baptiste Saurel (Parallèles) et Emilie Noblet (Bis Repetita, Parlement, Les 7 Vies de Léa), la série était sur les meilleurs rails. Cette dernière a même fait appel à sa compositrice Julie Roué pour donner vie à la musique enlevée et superbe du générique notamment pour laquelle elle a su parfaitement l’héritage des grands génériques télé. Si on ajoute son casting endiablé (Jean Dujardin en tête), Zorro a tout pour séduire. Oui mais voilà, c’est plus compliqué que ça !
On aime
Zorro est une belle série. A tous les niveaux ! Des costumes à la photographie, visuellement, cette nouvelle itération du vengeur masqué est vraiment sublime. Les grands espaces, de jour comme de nuit, sont remarquablement mis en scène ; les décors sont particulièrement soignés et les acteurs sublimés par des costumes réussis – y compris la tenue de Zorro, cette version du personnage préférant opter pour une approche classique (quand la série espagnole a choisi de la moderniser).
De la même manière, dans une série (ou un film) qui fait du combat à l’épée le point culminant des histoires, il convient de ne pas se rater dans la même en images. Non seulement les réalisateurs accompagnent brillamment les combats à l’épée du héros, mais ces combats sont parfaitement chorégraphiés, donnant beaucoup d’ampleur à chaque scène de la série.
Autre point positif, le choix de Dujardin pour camper est absolument parfait. Classe et doté du charme de ces acteurs à l’ancienne (il a ici un petit côté Errol Flynn dans la série), Jean Dujardin se glisse à merveille dans les bottes du « renard », ressemblant même à s’y méprendre quand il est masqué à Guy Williams (le Zorro de Disney), dont il a récupéré à la fois le sourire éclatant et la gestuelle lors des combats. C’est même un apport de Jean Dujardin lui même au personnage comme nous l’explique Benjamin Charbit, (co-créateur de la série (dans une interview à découvrir bientôt).Difficile d’imaginer un meilleur choix que l’acteur pour ce rôle. On se souvient même que Eric Judor avait eu cette même idée dans un épisode de Platane. Il y a peu d’acteurs en France qui aurait été capable de si bien représenter Zorro.
Enfin, traiter ce personnage iconique comme un vigilant dans une histoire de super-héros est également une très belle idée. Il y a un petit côté Batman reprenant la cape des années après dans son interprétation. La série traite aussi des doutes face à la décision de reprendre le combat, des questionnements de Diego qui veut être reconnu pour ce qu’il est lui, et pas pour le héros qu’il représente. Que ce soit aux yeux des habitants de Los Angeles mais aussi et surtout aux yeux de sa femme qui retrouve la passion des débuts dans les bras de son alter-égo.
On aime pas
Malgré un résultat visuel sublime et un traitement intéressant de certains personnages (comme le Sergent Garcia devenu profiler hors pair), c’est plutôt un vrai sentiment de déception qui nous anime après avoir vu la série. Si Zorro a vraiment du panache, Diego est particulièrement mal traité. Comme on l’a dit plus, le voir tiraillé entre l’envie de reprendre le combat et celle d’aspirer à autre chose est parfaitement compréhensible, mais le voir souvent passer pour un idiot plus souvent qu’il ne devrait, dénature un personnage qui feignait un manque de courage pour, à la manière de Superman, cacher son identité. Mais comme on le voit dans un épisode où il s’en prend à un casino, ce n’est plus avec envie, c’est même en freinant des quatre fers qui se lance dans la bataille. Pire, il ne pense qu’à une chose c’est sauver son mariage. Ressort dramatique d’un épisode pourquoi pas, d’une saison c’est trop et ça tire trop souvent en longueur. Il en est de même pour son épouse (Audrey Dana) qui se pâme là aussi trop souvent face à ce héros. D’autant plus dommage qu’une vraie modernité a été apporté au personnage pour celle qui pourrait être son « Robin », un peu à la manière de Catherine Zeta-Jones dans le Zorro de Banderas.
Mais c’est bien plus largement le traitement d’ensemble trop axé sur la comédie qui nous sort complètement du récit. S’il y a toujours eu de la légèreté dans les séries Zorro, souvent tournées vers un public familial, légèreté ne signifie pas pour autant ne rien prendre au sérieux. Un aspect de la série qui nous avait interpelé dès la bande annonce avec un côté très « OSS » dans le traitement du personnage de Diego, avec un enchaînement de vannes poussives et trop insistantes. Comme si le propos principal – vraiment intéressant – n’était jamais vraiment pris au sérieux. Un problème que l’on rencontre souvent dans les fictions françaises dès lors que le propos vise à s’emparer d’un registre inhabituel.
La série part donc sur de bonnes bases, mais l’ensemble fait rapide « Pschitt » à trop souvent rire de toutes les situations. Cela se ressent par exemple quand Diego enfile de nouveau le costume et évoque le fait qu’il rentre moins bien dedans ; ou encore quand, face à Bernardo devenu comme le Q de Bond, il essaye une nouvelle arme mi épée mi fouet trop cartoonesque pour être prise au sérieux. Alors qu’il aurait suffit donner à la série un petit Mystères de l’ouest qui aurait été de plus bel effet. Mais non, il faut, quelque soit le sujet, rester dans une sorte de comédie à la française qui se moque de tout. C’est bien dommage, on aurait aimé être plus embarqué dans cet univers et on regrette la construction en mode « sérial à suivre » de la série de 1957.