La capitale birmane Naypyidaw a vu s’ouvrir aujourd’hui une conférence de paix ayant pour but de mettre fin à des décennies de combats entre l’armée et une myriade de groupes ethniques en Birmanie.
Aung San Suu Kyi, dont le parti Ligue nationale pour la démocratie (LND) a remporté les élections législatives de novembre dernier, a fait du processus de paix avec les minorités la priorité du nouveau gouvernement. « Si tous ceux qui jouent un rôle dans le processus de paix ont la sagesse de concilier différents points de vue pour le bien de la population (…), nous serons à coup sûr en mesure de construire l’union démocratique et fédérale de nos rêves », a expliqué Aung San Suu Kyi lors de son discours d’ouverture de cette conférence dite « conférence Panglong du XXIe siècle ». Ce nom fait bien évidemment allusion à une conférence tenue en 1947 à Panglong entre le pouvoir birman, alors incarné par son père, et des minorités ethniques.
La « meilleur chance pour faire la paix »
« C’est seulement si nous sommes tous unis que notre pays sera en paix. C’est seulement si notre pays est en paix que nous serons à même d’être sur un pied d’égalité avec les autres pays de la région et du monde entier », a-t-elle continué. Cette conférence de paix, si elle vient de commencer, est déjà une vraie réussite, notamment en raison du côté symbolique. En effet, Aung San Suu Kyi a convaincu une quinzaine de groupes rebelles d’y participer aux côtés de son gouvernement et des militaires. Même l’Armée unie de l’État Wa, la plus puissante insurrection de Birmanie, forte de 20 000 combattants, s’est associée à la démarche, alors qu’elle avait refusé toutes les initiatives de paix depuis 2011. « C’est la meilleure chance qui se présente à nous pour faire la paix », se réjouit Lian Sakhong, vice-président du Front national chin, un groupe ethnique armé de l’ouest de la Birmanie.
Mille huit cents conférenciers sont attendus, dont le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon. Pendant cinq jours de conférences, les participants vont définir les modalités des prochains pourparlers, qui doivent se tenir tous les six mois. Au pouvoir depuis avril, Aung San Suu Kyi a rapidement noué le dialogue avec les rébellions. « Elle a travaillé dur pour rassembler tous les acteurs. C’est une approche ouverte et nouvelle », s’enthousiasme Sui Khar, représentant d’une insurrection impliquée dans le processus de paix.
Les Rohingyas pas au menu des négociations
Point noir de cette conférence : les Rohingyas ne sont pas invités à la table des négociations. La minorité rohingya, forte de près d’un million de personnes, reste considérée comme composée d’immigrés illégaux du Bangladesh voisin, même si certains sont en Birmanie depuis des générations. Nombre d’entre eux vivent dans des camps dans l’ouest du pays, depuis des violences intercommunautaires meurtrières en 2012. La tension reste vive depuis, sous l’influence de nationalistes bouddhistes et même Aung San Suu Kyi évite de prendre position sur le sujet. « J’ai relayé les inquiétudes de la communauté internationale concernant les dizaines de milliers de personnes qui vivent dans des conditions très dures dans des camps depuis plus de quatre ans », a déclaré Ban Ki-moon lors d’une première conférence de presse au côté d’Aung San Suu Kyi. Le secrétaire général des Nations-Unies a par ailleurs exhorté le gouvernement birman à accorder la citoyenneté aux centaines de milliers de Rohingyas du pays.
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Crédit photo Une : AFP