Plus de 28 000 réfugiés du Haut-Karabakh sont arrivés en Arménie depuis l’offensive victorieuse de l’Azerbaïdjan. Les tensions ne semblent pas s’apaiser entre les deux pays qui se disputent ce territoire depuis 1988.
Qu’est-ce que le Haut-Karabakh ?
Le Haut-Karabakh est une république autoproclamée. Aussi appelée Artsakh par les Arméniens, cette région montagneuse d’Azerbaïdjan fait l’objet de conflits depuis 1988 entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan qui considèrent que ce territoire leur appartient.
Les habitants de l’enclave sont à 99 % d’origine et de langue arménienne, et de confession chrétienne. Selon Bakou, ils seraient 120 000 arméniens vivant au Haut-Karabakh. Tandis que leurs voisins Azerbaïdjanais sont majoritairement musulmans et turcophones. Les Arméniens revendiquent une présence légitime dans la région considérée comme le « berceau de l’Arménie ». Seulement, l’Azerbaïdjan fait valoir des liens historiques profonds et anciens.
Qu’est-ce que ce conflit ?
Le Haut-Karabakh intègre le royaume arménien dans l’Antiquité, puis passe sous influence arabe au Moyen Age. Le Haut-Karabakh revient ensuite à l’Arménie après une révolte. En 1805, la région est sous l’Empire russe. Une guerre civile entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan éclate et suit la révolution bolchevique de 1917. En 1918, les deux pays proclament leur indépendance et les combats reprennent au Karabakh. Un an plus tard, Staline décide de rattacher la région à l’Azerbaïdjan. Le Haut-Karabakh obtient cependant son autonomie en 1923.
En février 1988, après soixante-cinq ans d’autonomie, le Haut-Karabakh vote son rattachement à l’Arménie. Un premier gros conflit armé éclate. Il fera 30 000 morts et des milliers de disparus. Mais en 199, l’URSS est dissout et l’Arménie et l’Azerbaïdjan retrouvent leur indépendance. Le Karabakh proclame la sienne le 2 septembre 1991. Cette indépendance n’est pas reconnue, pas même par l’Arménie. Cependant, l’enclave a le soutient politique, économique et militaire de l’Arménie.
Avec ce départ de l’armée soviétique, le conflit s’embrase. La Russie négocie un cessez-le-feu le 17 mai 1994 et l’Azerbaïdjan a perdu 13 % de son territoire, entrainant un exode de plusieurs centaines de milliers d’habitants. En avril 2016, avec la « guerre des quatre jours », la petite région est sous le feu des armes. Fin septembre 2020, l’Azerbaïdjan reprend les hostilités avec l’aide de la Turquie. Les forces arméniennes se font battre en six semaines. L’Azerbaidjan reconquît un tiers de Haut-Karabakh et les combats font 6 500 morts. Un nouveau cessez-le-feu, sur lequel doivent veiller 1 960 soldats russes, est conclu le 10 novembre 2020.
En décembre 2022, l’Azerbaïdjan ferme à la circulation le corridor de Latchine, qui relie la ville de Stepanakert à l’Arménie, et provoque de graves pénuries alimentaires et de médicaments. Une décision prise pour des mesures de sécurité selon l’Azerbaïdjan. Depuis, les conflits ne cessent d’être présents au Haut-Karabakh.
Que se passe t-il aujourd’hui au Haut-Karabakh ?
Ce sont quelques 28 000 réfugiés du Haut-Karabakh qui sont arrivés le mardi 26 septembre en Arménie selon les autorités arméniennes. Les forces armées azerbaïdjanaises ont mené ce qu’ils qualifient d’opération antiterroriste, et ont attaqué la capitale du Haut-Karabakh la semaine dernière. Cette attaque de Bakou a fait 200 morts, selon les séparatistes arméniens. Un dépôt de carburant a explosé et le bilan est lourd. Mardi soir, 68 morts ont été dénombrés. La ministre arménienne de la Santé évoque 125 corps retrouvés avec une dizaines de blessés.
L’Azerbaïdjan a réouvert dimanche dernier la seule route reliant le Haut-Karabakh à l’Arménie, quatre jours après la capitulation des séparatistes et un accord de cessez-le-feu qui place le Haut-Karabakh sous le contrôle de Bakou. Mardi, de nombreux véhicules s’entassaient à la frontière, pour rejoindre le territoire arménien. Lundi, le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, avait réaffirmé la promesse que les droits des Arméniens de l’enclave seraient « garantis ». L’Azerbaïdjan s’est aussi engagé à autoriser les rebelles qui rendraient leurs armes d’aller en Arménie.
Paris a estimé que l’exode « massif » des Arméniens du Haut-Karabakh s’effectue « sous l’œil complice de la Russie », qui avait déployé en 2020 une force de maintien de la paix dans cette région sécessionniste. La France rappelle également qu’elle tiendrait « pleinement responsable l’Azerbaïdjan du sort de la population arménienne ».
La crainte d’un « nettoyage ethnique »
« S’ils ne partent pas, nous les chasserons comme des chiens » déclarait le dictateur de l’Azerbaïdjan Ilham Aliev en 2020 au sujet des Arméniens du Haut-Karabakh. L’Azerbaïdjan s’en prend à ceux qu’il appelle « terroristes » et « séparatistes ». Tous les hommes arméniens qui souhaitent quitter le Haut-Karabakh doivent se soumettre à un contrôle facial aux autorités azerbaïdjanaises qui recherchent des « terroristes ». « Ce qu’il se passe est l’imminence d’un nettoyage ethnique, mais on voit bien que le monde regarde ailleurs », a expliqué mardi 19 septembre sur FranceInfo, Tigrane Yégavian, professeur de relations internationales à l’université Schiller. Le représentant du Haut-Karabakh en France, Hovhannès Guévorkian, n’a pas manqué de s’exprimer sur la situation : « Nous sommes tués parce que nous sommes Arméniens« .
L’Union européenne a reçu hier à Bruxelles, de hauts représentants de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan. La semaine suivante, le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, et le président azerbaïdjanais se rencontreront le 5 octobre, en Espagne. Emmanuel Macron, le chancelier allemand, Olaf Scholz et le président du Conseil européen, Charles Michel seront également présents.