Dimanche 22, les électeurs de gauche ont fait le choix de Benoît Hamon avec environ 35,86% des voix, il laisse derrière lui Manuel Valls accrédité de 31,22%. Un classement incontesté, mais faible participation et couacs mettent à mal cet exercice démocratique.
Nous sommes bien loin du bel élan démocratique d’octobre 2011 où la gauche se vantait d’instaurer dans le paysage politique français une primaire citoyenne. Pour cause, jusqu’à l’été dernier, la tenue d’une primaire à gauche était incertaine. Mais la belle démonstration démocratique du parti LR contraint. Organisation précipitée ; un président qui se retire à sa propre succession au profit de son 1er ministre ; des abonnés absents… les sympathisants de gauche se sont peu mobilisés.
Dans un énorme cafouillage, les organisateurs de la primaire ont annoncé un taux de participation avoisinant 2 millions – cela correspond au seuil fatidique que se sont fixé les dirigeants socialistes – avant de descendre le lendemain autour de 1,5 millions. Un couac qui peine à donner une crédibilité aux socialistes.
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Un parti fragmenté
Il est coutume de dire que la gauche remporte l’élection présidentielle uniquement quand elle est rassemblée. La gauche plurielle qui s’est unie derrière François Hollande en 2012 pour mettre fin aux années Sarkozy n’est plus.
Aujourd’hui, la primaire est le reflet de la scission profonde que traverse les partis de gauche. Le plébiscite de Benoît Hamon a une portée symbolique. Ministre du gouvernement Ayrault devenu frondeur, il incarne cette gauche déçue des années Hollande. En face, un ancien chef de gouvernement représentant la continuité. Tout oppose ces deux rocardiens.
L’un reste fidèle à sa ligne sécuritaire, l’autre introduit dans son programme une mesure phare qui est le revenu universel. Une initiative jugée utopiste qui fait parler dans le camp de Manuel Valls.
« Je ne crois pas à la fin du travail, je ne crois pas au revenu universel. Ce n’est pas ma conception de la dignité » Manuel Valls
Plus grave encore, les soutiens de Manuel Valls à l’instar de Bruno Le Roux semblent oublier cet électorat majoritaire de la gauche qui a voté pour Benoit Hamon.
« Je ne crois toujours pas que Benoît Hamon soit véritablement candidat à l’élection présidentielle ». Bruno Le Roux
Dans la matinale de RTL, l’actuel ministre de l’intérieur réduit Benoît Hamon à « un courant de congrès au parti socialiste » avant d’ajouter que s’il venait à gagner, une partie des électeurs de gauche « iront voter pour d’autres candidats à l’élection présidentielle ».
Macron et Mélenchon y vont solo
La décision de Jean Luc Mélenchon et d’Emmanuel Macron de ne pas se mêler à la bataille des primaires pose problème. L’absence de Jean-Luc Mélenchon réduit les voix de la gauche en vue d’un rassemblement pour la présidentielle. Mais, celui qui agace le plus est Emmanuel Macron.
« Emmanuel Macron est Monsieur X » Arnaud Montebourg
Ni de gauche, ni de droite, sa position en irrite plus d’un. Il faut dire que l’ancien banquier d’affaire est aujourd’hui donné en 3ème position au 1er tour de l’élection présidentielle. Il ratisse un électorat de droite et de gauche et commence de plus en plus à semer le trouble au sein du parti socialiste.
En effet, celui qui était vu comme persona non grata à sa démission du gouvernement séduit. Il a été dit que malgré la trahison, François Hollande soutiendrait le chantre du mouvement En marche.
Mais pire encore, au micro de BFM TV, Ségolène Royal a ce matin contribué au discrédit de cette primaire. Elle a laissé planer le doute sur son soutien ou non au vainqueur de la primaire, n’excluant pas un possible soutien à Macron si celui-ci est plus à même à rassembler le 7 mai prochain.
À quelques jours du second tour, la gauche est encore fragile. Discrédité par ses opposants, qui le jugent « irréaliste » et non capable d’endosser le costume présidentiel, à ce jour, on ne sait pas si toute la gauche sera derrière Benoît Hamon s’il venait à gagner dimanche.
Crédit photo : Joel Saget/AFP