Après s’être improvisé tour à tour chantre d’une sexualité 2.0 et gourou de l’Alliance bleue, Tellier revient à ses premières amours.
C’est avec un «Adieu» opéresque en guise d’ouverture que Tellier annonce d’emblée la rupture avec le personnage bohème, décalé et médiatique des opus précédents. Exit les parures et les univers acidulés de Sexuality et My God Is Blue, c’est à un compositeur dans son plus simple appareil que l’on a affaire, et ce dernier nous livre un album résolument instrumental. Seule exception notable, le single «L’Amour naissant» qui laisse s’exprimer le timbre doux et onirique de Tellier, qui le reste du temps tient à s’effacer derrière les mélodies qu’il a pris soin d’élaborer.
Car c’est bien ce dont il est question quand Tellier nous parle de «Confection». Débarrasser l’oeuvre de ses parures superflues pour revenir à la démarche créatrice, à ce en vertu de quoi l’individu peut se revendiquer artiste : la composition. Museler l’icône pour libérer le musicien. Rien de surprenant, dès lors, à voir l’intéressé bâillonné par une ligne de partition sur laquelle deux croches s’apprêtent à prendre un nouvel envol.
Un envol qui n’aura pas grand chose de révolutionnaire pour qui suit Tellier depuis ses débuts avec L’Incroyable Vérité et Politics, baignés par la chanson française de Christophe et de Gainsbourg. Inspirations qui continuent à se faire sentir, bien qu’à cet héritage s’ajoute une veine quasi-cinématographique, dans la lignée des travaux d’Ennio Morricone et Vladimir Cosma. L’album poursuit le chemin entamé par «La Ritournelle» en jouant de variations, d’arrangements et d’accompagnements sur des airs aux accents lyriques qui nous accompagnent de bout en bout («L’Amour naissant» I, II, III), non sans nous réserver quelques surprises («Waltz», vilain petit canard et pied de nez aux détracteurs du son cheesy de ses dernières productions).
Derrière le barbu excentrique des plateaux télévisés à la biographie extravagante, il y a un artisan. En prenant son public à contrepied, Sébastien Tellier le rappelle aux premières heures de sa carrière. Confection est un album qui, loin de la sophistication des opus précédents, joue la carte de la spontanéité et du romantisme. Ni une prise de risque, ni une resucée, mais une rêverie introspective enrichie par un itinéraire atypique et un talent indiscutable.
Karel Kamphuis