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« On ne fait pas une information de référence avec des moyens économiques low-cost »

A la suite d’un accord avec la direction de France Télévisions, le premier syndicat de journalistes du groupe (SNJ) a levé son préavis de grève pour le 28 juin qui concernait la rédaction de France TV Info. En pleine préparation de la nouvelle chaîne d’information de France Télévisions, retour sur ce projet critiqué par le SNJ de France Télévisions. Rencontre avec Raoul Advocat, secrétaire général du SNJ du service public.   

Radio VL : Critiquez-vous la création même d’une chaîne d’information continue ?

Raoul Advocat : Il n’y a pas de remise en cause sur le principe même d’une chaîne info. On est quand même journalistes. On travaille dans le service public et le pluralisme c’est fondamental. Plus il y aura de rédactions, plus il y aura d’informations, mieux ce sera pour tout le monde. Sur le principe même, évidemment il n’y a pas de problème. En revanche, le problème est bien sur le modèle économique et éditorial qui ont été mis en place.

Radio VL : Que reprochez-vous au projet sur le plan éditorial ?

Raoul Advocat : Sur l’aspect éditorial, le vrai problème pour nous au SNJ c’est l’incohérence éditoriale du projet tel qu’on le connait actuellement car il y a au minimum trois entreprises d’information dans l’histoire. Il y a France Télévisions, Radio France et France 24. A cela s’ajoute l’Institut National de l’Audiovisuel qui gère les archives de l’audiovisuel. Il ne fait pas de l’information mais de la mise en valeur des archives. Si on raisonne sur les trois entreprises d’information, ce sont forcément des entreprises qui ont des lignes éditoriales spécifiques. Ces trois chaînes vont travailler sur une même chaîne qui sera la chaîne d’information. L’incohérence éditoriale est évidente là. Notre sentiment, c’est que ça va tirer à hue et à dia.
Je vous donne juste un exemple très concret Radio France est chargé entre autres de nous fournir des titres chaque heure. On va donc avoir des sessions d’information gérées par France Télévisions avec régulièrement des titres de Radio France. Où est la garantie du fait que dans les titres et dans les journaux qui ont été diffusés par France Télévisions, il y aura la même information ? Les chiffres diffusés ne sont pas forcément les mêmes car Radio France a par exemple une agence en interne spécifique qui est chargée de contrôler toutes les informations, y compris lorsqu’elles viennent de l’AFP. On peut avoir des sources d’informations différentes. Les journalistes peuvent avoir des informations différentes. Donc on va donner des chiffres qui peuvent être incohérents à quelques minutes d’intervalle. Et l’incohérence va se poursuivre la nuit lorsque France 24 prend l’antenne. France 24 c’est encore une ligne éditoriale différente avec des journaux différents et peut être des informations diffusées différentes. L’incohérence éditoriale, elle est là.

Radio VL : Quels problèmes posent les moyens financiers alloués à la chaîne info ?

Raoul Advocat : Sur l’aspect économique, on ne fait pas une information de référence comme le veut la direction avec des moyens économiques low-cost. Et quand on parle de moyens, on parle aussi de métiers. Non, ce n’est pas cohérent de demander à des journalistes qui ont déjà énormément de tâches éditoriales, qui ont besoin de temps pour ça, d’en plus assurer des tâches techniques lourdes  qui sont le montage et le mixage. Un monteur ce n’est pas seulement quelqu’un qui apporte un élément technique, c’est quelqu’un qui a un regard sur les images, c’est fondamental. Il est important d’avoir ce premier regard extérieur à une équipe de reportage avec toute sa capacité à comprendre et à mette en forme le langage des images. Or, le monteur disparaît ou plus exactement il n’est que dans certaines tâches très spécifiques que la direction appelle des modules, et en plus on va leur demander de faire un peu d’information. C’est en contradiction totale avec le statut de journalisme. On est journaliste ou on ne l’est pas. Journaliste, je rappelle c’est quelqu’un dont l’essentiel de l’activité est le journalisme. Un monteur qui fait un peu de journalisme ne sera jamais journaliste. Il restera monteur donc il sera écarté de toute la protection juridique des droits et devoirs des journalistes. On a un sacré problème en termes de qualité de l’information et de véracité de l’information. Et inversement, nous en tant que journaliste, être écrasés par les tâches techniques ça nous empêche de faire notre boulot de journaliste.

Radio VL : Quel nom souhaitez-vous pour cette nouvelle chaîne qui devrait s’appeler France Info TV? Quel avenir pour France TV Info si la chaîne se nomme France Info TV ?

Raoul Advocat : L’avenir de France TV Info c’est bien l’inquiétude des journalistes de France TV Info et globalement de France Télé. C’est pour cela qu’on avait lancé un préavis de grève en leur faveur mais la direction a pris un certain nombre d’engagements. Le nom de la chaîne d’info est assez caractéristique de l’incohérence éditoriale de ce projet. Comment peut-on imaginer construire un projet nouveau avec quelque chose qui serait le nom d’une chaîne emblématique de radio? C’est là qu’on y comprend plus rien du tout. Quel que soit le nom, ce n’est pas notre souci. Ce n’est pas ça le fond du problème. Pourquoi on sort ce nom? Ce sont des tractations entre les directions de France Info, de Radio France, de France Télévisions, de France 24. C’est une guerre des ego. On ne va pas payer les pots cassés pour une guerre des ego.    

Crédit photo à la une : marianne.net

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