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La face obscure des sondages d’opinion…

Ils sont partout. Non, ce ne sont pas les immigrés, comme Robert Menard pourrait le laisser penser, mais bien les sondages d’opinion. En ces temps de campagnes électorales, ils sont particulièrement présents, pour ne pas dire invasifs dans le traitement de l’information. Alain Juppé aurait déjà gagné, alors à quoi bon se déplacer ? La réalité est un peu plus complexe que ça…

Comment mesure-t-on l’opinion ?

L’opinion est mesurée par les instituts de sondages, tels que TNS Sofres, Ifop ou encore Ipsos. Ce sont des entreprises privées auprès desquelles des acteurs peuvent faire appel à leur service : médias, entreprises, acteurs politiques… En fonction des thématiques voulues, ils construisent des questionnaires auxquels les sondés doivent répondre. À partir de leurs réponses, une tendance de l’opinion sur le sujet donné émerge. Comme il est impossible de mesurer l’opinion de chacun, les sondeurs construisent des « échantillons » de personnes, censés être représentatifs de la population sondée. En général, 1000 personnes interrogées suffisent pour obtenir une taille d’échantillon correcte de la société française. Ils prennent en compte toutes sortes de caractéristiques, à savoir le sexe, la zone géographique, l’âge, la profession, etc.

Les biais de la mesure d’opinion

Dès l’apparition des premiers sondages d’opinion, des problématiques inhérentes à cette mesure sont soulevées : les personnes ont elles une opinion sur tous les sujets ? Les sondages ne sont-ils pas des « constructeurs d’opinion » ? Ce sont des questions qui restent encore en suspens.

Plus concrètement, la méthode de fabrication des sondages interpelle. Lorsque l’on sait que plus d’un tiers des personnes refuse de répondre à tout sondage, leur légitimité peut être partiellement remise en cause. Au de-là de ça, au sein de leur échantillon représentatif (donc uniquement les volontaires qui répondu), des personnes cachent leur véritable opinion, pour diverses raisons. Pour pallier à ces erreurs, que les instituts ne contrôlent pas, ils appliquent des « correcteurs » pas toujours évident à calculer (en fonction des dernières tendances d’opinion et  à partir de questions sous-jacentes permettant d’approuver ou non la réponse précédente). Par exemple, le vote FN est difficilement « avouable » au téléphone. Les personnes interrogées évitent de répondre ce qu’ils pensent, et biaisent le sondage. Et même avec les corrections apportées,  le vote FN est presque systématiquement sous-estimé. (Fantôme de 2002, où est tu ?)

Une déontologie ? Quelle déontologie ?

C’est un paradoxe. Les instituts de sondage sont des acteurs avec une influence publique importante, possédant une part de la démocratie entre leurs mains. L’opinion, c’est le peuple. Ils prétendent l’écouter. L’interroger. Et même le faire parler. Avec de telles responsabilités, il serait donc logique, de la même manière que pour les journalistes, d’instaurer une charte déontologique.

Mais la profession n’est soumise à aucune déontologie. Aucune. En plus des différents biais montrés ci-dessus, les conflits d’intérêts peuvent exister. La situation dans laquelle se trouvent l’Ifop et son directeur d’études, Damien Philippot, peut nous inciter à nous poser des questions sur le sujet. Ce nom vous rappelle quelque chose ? Oui, ce n’est pas une coïncidence. Il s’agit du frère de Florian Philippot, numéro deux du FN. Il est également proche de Marine Le Pen. Ce trio entretient des liens étroits qui peuvent laisser perplexe, particulièrement en cette veille d’élection présidentielle. Ne serait-il pas temps de réglementer cette profession de l’ombre censée mettre l’opinion publique en lumière ?


La responsabilité des médias

Il serait injuste de jeter la pierre uniquement aux instituts de sondage. Les médias (et principalement les médias de masse) en sont les principaux relais. Et commanditaires. N’oublions pas que la plupart des sondages publics sont à l’initiative des médias. C’est une source illimitée d’information, à analyser, décortiquer, commenter… Une aubaine en somme ! Cette sur-utilisation et sur-médiatisation des sondages a produit une chose : la transformation des sondages d’opinion en pronostics. Et ne se fier uniquement qu’aux sondages pour comprendre l’opinion et l’anticiper.

Mais ce n’est qu’un outil parmi d’autres, qui plus est, inexact. Le sondage est fait pour donner une tendance. Tel qu’il est actuellement présenté, il prend le pas sur l’événement en lui-même. C’est typiquement le cas avec la primaire de la droite et du centre. On ne s’intéresse pas au fond du débat proposé par les candidats. On cherche à savoir qui entre Alain Juppé et Nicolas Sarkozy va gagner. L’ancien Président  aurait même déjà perdu.
Caricature primaire droite

Ce genre de commentaires « faciles » peut avoir des incidences non négligeables. Il peut avoir un effet démobilisateur : « Il est premier dans les sondages, donc si je ne vote pas ce n’est pas grave. » C’est exactement ce qu’il s’est passé pour Lionel Jospin en 2002. L’interprétation de cette mesure d’opinion joue donc un rôle tout aussi important que sa fabrication.

Cependant, il ne faut pas proscrire les sondages. Leur utilité n’est pas à démontrer. Mais il faut savoir les utiliser avec parcimonie ; comme illustrations et non pas comme des faits. Pour ce qu’ils sont en fait, tout simplement.

Crédit Photo à la Une : BFM TV

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