L’un des problèmes les plus persistants en Papouasie-Nouvelle-Guinée n’est pas son marché des ressources naturelles en complète surchauffe, ni la supposée corruption rampante qui gangrène le pays. Étonnamment, ce serait plutôt la sorcellerie et, plus spécifiquement, les meurtres brutaux et barbares de femmes accusées de sorcellerie. A ce problème complexe de sorcellerie, qui se nourri d’un sexisme exacerbé, se mêlent d’autres problématiques telles que les violences faite aux femmes, les conflits pour la récupération des terres, et le développement rapide et parfois désordonné du pays.
Le 26 mai 2015, Amnesty International a publié un communiqué de presse appelant le gouvernement de Papouasie-Nouvelle-Guinée à tout faire pour protéger les femmes. L’ONG a réagi à la mort de Misila, une jeune femme qui a été tuée à coups de machette dans une partie reculée de la région des Hautes Terres par un groupe d’hommes. Deux autre femmes avaient aussi été menacées mais ont réussi à s’échapper. Selon l’Australian Associated Press (AAP), « ils [les tueurs] croyaient qu’elle [Misila] était une sorcière, qu’elle était responsable des décès et des malheurs dans leur village ». Et malheureusement, ce genre d’action extrêmement violente est loin d’être inhabituelle dans ce pays.
UN MEURTRE QUI N’A RIEN DE SURPRENANT
Effectivement, le meurtre de Misila n’a rien rare. Les attaques basées sur des allégations de sorcellerie pose un problème croissant en Papouasie-Nouvelle-Guinée et ciblent principalement des femmes sans défense. En effet, dans ce pays d’Océanie proche, la croyance en la sorcellerie et en la nécessité d’un châtiment pour lutter contre ce genre de pratiques est « ancrée dans la culture » du pays selon l’ONU.
L’accès à la justice, hors tribunaux traditionnels, est extrêmement difficile en Papouasie-Nouvelle-Guinée. En effet, dans ce pays de plus de 7 millions d’habitants, plus de 850 langues sont parlées, et les cultures et les traditions sont très diverses. De plus, plus de 80% de la population vit dans des zones rurales parfois extrêmement isolées. Et outre le faible accès à la justice, ces éléments font que le développement d’une politique efficace en matière de criminalité est assez difficile à mettre en place, même quand les autorités politiques y mettent de la bonne volonté.
Et malgré le développement du pays, ce genre d’attaque a augmenté, tout comme leur niveau de barbarie. Mais, le gouvernement a pris des mesures pour combattre cette tendance morbide.En effet, la principale mesure est vraisemblablement l’abrogation en 2013 du 1971 Sorcery Act qui criminalisait la pratique de la sorcellerie et qui reconnaissait comme légitime l’accusation de sorcellerie comme un argument pour la défense en cas de meurtre.
ENTRE IMPUNITÉ, MISOGYNIE ET CUPIDITÉ
Le sentiment d’impunité joue un rôle majeur dans les violences faites aux femmes. En effet, le plus souvent, les femmes ciblées par les attaques « anti-sorcellerie » sont des femmes qui n’ont plus de proche de sexe masculin (un frère, un père ou un mari) et qui sont donc sans défense. La cible classique de ces agressions est une veuve, plutôt âgée, ayant quitté son village pour suivre son mari désormais décédé. Cette dernière se retrouve coincé dans un village qui n’est pas la sien, à la merci des agresseurs.
La misogynie joue également un rôle primordial dans ces agressions. En effet, en cas de décès ou de malheur dans une famille ou dans un village, les femmes sont toujours les premières blâmées, et elles vivent donc constamment dans la peur d’être accusé de sorcellerie.
Toutefois, il semblerait que la cupidité soit la cause principale des ces violences. En effet, les « sorcières » sont très souvent visées dans des cas de litiges en matière de propriété. Effectivement, la majorité des accusations de sorcellerie sont fabriquées de toutes pièces afin d’obtenir un gain financier ou immobilier, tandis que seulement dans certain cas, les accusation de sorcellerie sont basées sur des croyances fortes et se transmettent de génération en génération. Selon l’ONG Oxfam, deux tiers des accusations sont uniquement un moyen de réappropriation de terrains, de maisons ou d’entreprises des personnes accusées.
En 1992, la Constitutional and Law Reform Commission of Papua New Guinea a publié un rapport sur la violence domestique. Ce dernier s’appuie sur 6 principes dont le deuxième semble être fondamental : la violence domestique est un comportement appris, ce qui veut dire que ce comportement peut être désappris (« that violence is learned behaviour, which can be unlearned »).