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TAIWAN : Et si Mars 2014 devenait leur Mai 68 ?

             Depuis le 18 mars 2014, des centaines d’étudiants manifestent devant et au sein du Yuan législatif (le Parlement taiwanais) contre un accord visant à améliorer les échanges commerciaux avec la Chine. Leur symbole est la fleur de tournesol, et le Sunflower movement est d’ores et déjà un évènement historique pour l’île !

             A l’origine de cette manifestation de très grande ampleur se trouve l’accord commercial que le parti au pouvoir, le KMT, souhaite faire passer et qui permettrait notamment la création d’un véritable libre-échange. En effet, les Taiwanais ont été choqués de la décision du président Ma Ying-jeou d’ajourner la discussion de l’accord en commission parlementaire et de l’envoyer directement en séance plénière. Cette décision, prise le lundi 17 mars, fut le détonateur du mouvement. Les étudiants ont, dès le début, pris le Parlement avec ce message : « Nous voulons que le texte de l’accord retourne en commission pour être étudié point par point comme cela a été promis ». Quelques jours après, et faisant suite à la surdité du gouvernement en place, la revendication est maintenant une renégociation de l’accord dans son entièreté. Or, le gouvernement de Ma a tout de suite précisé que cela était impossible. Renégocier entièrement un accord passé avec la Chine continentale serait troubler trop profondément les relations déjà tendues entre les deux États, relations qui semblaient pourtant aller dans un sens d’une discussion plus grande suite à la création des bureaux de représentations dans chacun des deux pays. (Article)

Un mouvement étudiant soutenu par toute la population

             Le mouvement est principalement étudiant pourtant il fut très vite rejoint par des salariés de tous âges. De même, selon les journaux taiwanais et RFI, 52 présidents d’universités soutiennent le mouvement en incitant les autorités à écouter les manifestants. Ajoutons à cela le fait que le patronat taiwanais soutient l’accord mais justifie la demande d’un examen point par point en commission. Le mouvement est donc plus large et regroupe ainsi plusieurs catégories de la population taiwanaise.
L’organisation est très bonne puisque des systèmes de ‘’crèches’’ pour les enfants des manifestants ont été mis en place, et qu’un système de livraison de nourritures à l’intérieur du Parlement fut organisé jusqu’à ce qu’il soit rendu plus difficile par les forces de l’ordre.

Le tournesol : symbole de volonté pacifiste

             La symbolique de la fleur de tournesol n’est pas traditionnelle en Chine ou à Taiwan, du moins pour le moment. Le fait est qu’au départ de la manifestation des fleurs de tournesol furent distribuées aux participants, car c’est une fleur de saison à Taiwan. Ces derniers veulent manifester par cette fleur le signe d’une opposition pacifiste. Elle est par la suite devenue le symbole de ce rassemblement et de la lutte pacifiste contre des actions qualifiées de non-démocratiques. Car l’enjeu est aussi là : conserver la procédure démocratique d’un pays qui expérimente depuis moins d’un demi-siècle ce régime.

 Une révolution 2.0 

             Une organisation qui passe à son origine par les réseaux sociaux. En effet, dès sa création la page Facebook de l’évènement a eu plus de 10 000 « j’aime », et la plupart des manifestant se sont organisés via les réseaux sociaux. Ce furent aussi les premiers à couvrir l’évènement et à le diffuser en masse. Les étudiants semblent soutenus par les 2/ 3 de la population taiwanaise qui ne manquent pas de la faire savoir via les différents types de réseaux sociaux. La presse traditionnelle a mis plus de temps à se saisir du sujet et il s’agit d’une ombre encore plus que conséquente dans la presse étrangère.

 L’homme de la résolution : Wang Jin-pyng, président du Parlement

             Certes, l’opposition s’est dès le début affichée en soutien avec le mouvement, mais c’est son rôle somme toute le plus attendu. Toutefois, il est intéressant de noter, qu’à la différence de ce qui se fait en Europe, les leaders de l’opposition ont tenu à manifester à l’écart des manifestants étudiants et se sont excusés s’ils avaient pu avoir un langage de campagne, bien qu’ils aient tout fait pour l’éviter. En revanche, le président du Parlement Wang Jin-Pyng qui est issu du KMT (parti majoritaire) s’est opposé à la procédure en session plénière demandée par Ma Yin-jeou. Ainsi, il supporte la demande originelle du mouvement qui est une lecture point par point de l’accord en commission pour sa renégociation avant le vote au sein du Yuan législatif. De plus, Wang déplore la manière dont la crise est gérée, car bien qu’il ne semble pas y avoir de violences policières outre-mesure, le gouvernement continue de faire la sourde oreille.
Aussi Wang Jin-Pyng apparait-il comme l’homme de la négociation pour les manifestants mais plus largement pour la population et la classe politique taiwanaise.

             La solution est loin d’être résolue et les tensions entre policiers et manifestants augmentent de jour en jour. Il faut attendre alors avec impatience la manière dont le gouvernement va se charger de l’affaire et si ou non il décidera de faire passer cet accord en commission. Si l’évènement peut sembler banal à nos yeux d’occidentaux, et plus particulièrement de Français habitués aux manifestations, il faut relever que le contexte est véritablement extraordinaire à Taiwan. De plus, il ne s’agit pas d’une simple manifestation dans la rue mais d’une occupation du Parlement, imaginez que le Palais Bourbon soit occupé par des manifestants… Bref, cela montre la volonté des Taiwanais à participer activement à la construction d’une démocratie plus fermement ancrée et pratiquée. L’évènement n’est ni simple ni anodin mais est en tout cas déjà historiquement fort !

             Voici une vidéo rendant bien compte de l’ampleur de l’évènement : [youtube id= »HMzC557qHVg »]

 

Cédric Fuentes

 

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