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Travelling n°9 : La Cabane dans les Bois : Ceci n’est PAS une Comédie

Critique :

La Cabane dans les Bois

ou

Ceci n’est PAS une Comédie

Alala j’ai mal à mon enfance… vraiment mal… Et comment ne pas avoir mal lorsque le public et la communauté journalistique bobo (entre Télérama qui pue l’arrogance en spoilant tout le film en une dizaine de lignes et le Figaro ne s’est même pas bougé le cul pour aller le voir ou écrire la moindre ligne sur ce trésor…) s’allient pour faire passer un film qui nous a subjugué du début à la fin pour une vieille bouse poissarde limite bonne à faire rire leurs 6 enfants préinscris à l’École Alsacienne…

Aujourd’hui est un triste jour pour le cinéma que j’aime et qui me conforte un peu plus dans l’idée que nos maîtres à penser préférés sont toujours autant déconnectés de la puissance évocatrice extraordinaire qui peut émaner des films de genre.
Problème typiquement français en somme, qui parasite un hexagone dans lequel on a toujours peur de parler du non-banal et où l’on préfère se réfugier dans un cinéma à visée « naturaliste » en privilégiant le culte du « c’est trop ça » (dédicace aux podcaster ultras modes dans la mouvance teenage)

 Je suis donc allez voir La Cabane dans les Bois le jour de sa sortie, sans préjugés ni préavis (muahahah), je n’avais donc pas vu cette fameuse bande-annonce qui en dévoile effectivement un tantinet trop sur l’intrigue et embrouille donc un peu le futur spectateur qui se demande dans quoi il va tomber. Mais n’ayez pas peur ! Car on est bien bien loin de tout ce qui était possiblement imaginable dans le genre…

 

En effet, L’immense problème d’une grande partie du public au cinéma vient du conditionnement que lui ont infligé les médias (travers dans lequel il m’arrive moi-même de tomber) : la classification des films par genre et donc la hiérarchisation des genres. La faille de ce système, est, à mon avis, que sans connaitre les bases, les références et les classiques de chaque genre, on ne peut comprendre les films qui en font un traitement subversif et inattendu.

Évidemment que j’aime les slashers ! (films illustrant la plupart du temps une bande de jeunes massacrés à l’arme blanche par un ou plusieurs psychos froids et impassibles, Halloween de John Carpenter en est un exemple méphistophélique !).

Mais le slasher, c’est un genre, certes référencé et codé, parfois même violé (Scream qui peut être était trop subtile ou peut être trop cynique) mais qui n’avait jamais été autant réfléchit, travaillé, détourné et sublimé par une équipe que dans La Cabane Dans les Bois (titre vicelard de par son apparente banalité) produit, réalisé et écrit par les anciens de Buffy Contre les Vampires (Drew Goddard et Josh Whedon) qui ont décidé, non pas de rendre ses lettres de noblesse au slasher (comme le fait Rob Zombie) mais plutôt étudient, à travers une histoire aux multiples niveaux de lecture, ce que le genre est devenu depuis Scream 1.

 En effet, il est indispensable de remonter un certain temps en arrière pour comprendre la profondeur et l’intérêt de La Cabane dans les Bois :
Tout d’abord il faut absolument avoir vu les anciens slashers type Candyman, les films de Stephen King, de Carpenter, ou Le Loup-garou de Londres et être ne serait-ce qu’intéressé par toute cette mythologie afin de savoir qui sont Hannibal, Freddy, Pinhead, Michael Myers, Jason, Leatherface, Jigsaw et Chucky (pour les plus connus aujourd’hui).

Des références qui, soit vous sont déjà acquises, soit vous ouvriront les portes d’un univers fourmillant d’inventivité, certes bourrin, Gore et trashouille mais qui, la plupart du temps examine avec une précision diabolique la nature sombre de l’humanité, en en questionnant les travers par la personnification de son excroissance putride et symbolique. Autant vous dire que ça défouraille !
Si vous ne voulez rien savoir du scénario de La Cabane dans les Bois, il est temps d’arrêter de lire cette chronique et de foncer voir, avec l’esprit grand ouvert ce film jouissif et explosif qui nous fait emprunter des chemins sinueux pour ensuite en dynamiter les tenants et aboutissant.

 

Pour les autres, on continue! SPOILER !

 

Alors, La Cabane au fond des bois qu’est-ce que c’est ?
Et bien c’est tout simplement la meilleure relecture en ce qui concerne le film horrifique faite pour moi à ce jour.

On commence donc avec une bande de jeunes qui semble typique du slasher : pouffiasse, midinette, junky, intello et capitaine de l’équipe de foot (joué par mr Thor en personne).

Mais dès la première scène, les scénaristes nous montrent que ces jeunes ne sont pas vraiment ce qu’ils semblent être, et, alors qu’ils partent passer le week-end dans une maison abandonnée près d’un quelconque lac, ils s’interrogent tour à tour sur leur changement d’attitude pour mieux correspondre aux clichés précités.

 

 

La jeune fille prude l’est donc depuis peu, tout comme la blondasse qui vient en fait de se teindre les cheveux et commence à éprouver une attirance incontrôlable pour les minis-shorts. L’athlète s’étonne de perdent ses neurones au fur et à mesure que l’intrigue progresse et devient le prototype du parfait macho tête à claques

Arrivé alors aux frontières du monde civilisé (dont le dernier signe est une station-service, qui elle aussi semble abandonnée, mais dont tous les aspects crient en cœur « GO AWAY OR DIE ! », chose que nos joyeux lurons ne semblent pas comprendre…).

C’est à partir de là que le film prend une véritable tournure intéressante puisqu’il démonte tous ces codes du genre horrifique pour en disséquer l’emprise évocatrice qu’il a sur nous.

Nous retrouvons alors une équipe de scientifiques cyniques jusqu’à la moelle qui, non contents d’observer les jeunes écervelés (expression datée de 1856) par le biais de tout un attirail électronique, on comprend vite qu’ils sont à l’origine du changement de QI des jeunes gens et qu’ils seront d’ailleurs les instigateurs de tout ce qui va suivre…

Ainsi, donc, et comme tout le monde s’en doute, des évènements étranges commencent à se produire dans la maison et c’est une famille entière de Zombis-Rednecks-Mormonts-Psychopathes qui est lâchée par les scientifiques sur la cabane (au fond du jardin, oui bah on était obligé de la faire celle-là).

C’est à ce moment précis que le public du film se scinde en deux camps : d’un côté il y a les ultra-cyniques (société de merde !) qui commencent à se marrer comme des otaries bourrées à la bière (vous chercherez l’auteur de la citation) parce que « franchement, c’est trop drôle les jeunes qui se font massacrer par des morts-vivants sadiques » et ceux qui rentrent réellement dans le récit, qui stresse pour les personnages et rêvent de leur survie (les amoureux du genre font la plupart du temps partie de la deuxième catégorie).

En effet, sans dévoiler les retournements de situations qui nous permettent de regarder, tantôt plongés dans l’action, tantôt avec distance, l’aventure des personnages et de leurs tortionnaires/fonctionnaires (comprendrons les initiés). 

On retiendra donc cette scène nihiliste au possible en travelling circulaire qui nous montre la petite sauterie des bureaucrates, fiers de leur réussite tandis qu’en arrière-plan, sur les écrans, les jeune fille se fait tabasser jusqu’à en vomir… Cette scène dérange d’autant plus que certains de vos voisins la regarderont le visage déformé par des rictus cyniques non dissimulés si ce n’est un éclat de rire désespérant.

Alors qu’on se le dise : Ce film n’est pas une « comédie horrifique à la Scream 4 » putain de bordel d’Iron Man qui pisse dans sa combi quoi !

Le Tandem Whedon-Goddard, nous prouve qu’ils ont aimé, compris, digéré, sublimé et même contesté les codes du film d’horreur tel qu’ils nous apparaissent depuis leurs naissance, et ça, ça fait plaisir ! (cela faisait très longtemps que je n’avais pas vu un film du début jusqu’à la fin, la bouche ouverte et la bave au lèvre).

 Remballez-donc les avis des pseudos spécialistes du cinéma, qui comparent Klapisch à Audiard et pensaient que le Seigneur des Anneaux est un roman sur l’Apartheid (véridique) et courez voir ce film qui m’a littéralement subjugué autant par sa profondeur évocatrice et critique sur notre manière à nous, spectateurs, d’aborder le slasher que par son final aussi jouissif qu’une cosplayeuse sexy un soir de pleine lune (mais pour de toutes autres raisons).

Et si vous y aller avec assez d’ouverture d’esprit, vous pourrez bien vous laisser embarquer par ce chef-d’œuvre d’inventivité qui, à la différence d’autres sorties de la semaine (dédicace à Dark Shadows, chronique à venir), ne tombe pas dans le recyclage de thématiques envahissantes sans en faire avancer la réflexion d’un iota !

 

 

Etienne Richard

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