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Tunisie : L’espoir d’une « société nouvelle »

Les dirigeants tunisiens rédigent actuellement leur nouvelle constitution. S’il est enclenché, le processus de démocratisation s’annonce néanmoins long et compliqué.

L’histoire nous l’a appris, la révolution n’est pas une fin en soi. Quand un peuple se défait de la dictature, le chemin qui mène à la démocratie est souvent semé d’embûches. Les revendications fusent, et les attentes sont grandes. Très grandes. A ce titre, les phases post-révolutionnaires, qui succèdent automatiquement au renversement d’un régime autoritaire, ne sont jamais de tout repos pour les nouveaux gouvernants. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la Tunisie n’échappe pas à la règle.

« Le brouillon est déjà prêt »

A l’occasion d’une conférence ouverte à l’Hôtel des Régions de Marseille, Abderrazak Kilani, ministre tunisien chargé des relations avec l’assemblée constituante, réitère sa volonté de créer la rupture avec le précédent gouvernement : « Nous voulons une société nouvelle. Une société, dans laquelle l’Etat se réconcilie avec ses citoyens. ».  Le divorce, avec un régime qui prônait la répression des libertés élémentaires, semble être définitivement consommé.
Un renouveau donc, qui cherche sa confirmation dans la rédaction d’une nouvelle constitution : « Son brouillon est déjà prêt, annonce le ministre tunisien. Nous avons bon espoir qu’elle soit terminée pour le mois de décembre de cette année ». En réalité, la rédaction du texte obéit elle-même à un processus participatif, puisque plusieurs commissions constituantes travaillent ensemble à son élaboration. Une initiative qui paraît en adéquation avec la volonté du peuple tunisien de basculer dans un régime démocratique.

Une transition difficile

Toutefois, si le processus de démocratisation est à la fois souhaité par les gouvernants et par le peuple, les attentes ne sont pas les mêmes : « La jeunesse veut tout et tout de suite : beaucoup plus d’emplois, une augmentation des salaires… se plaint Abderrazak Kilani. Les jeunes s’imaginent qu’il suffit de faire la révolution pour tout régler. Mais le chemin est encore long ». Car si les jeunes tunisiens ont activement participé au renversement du précédent régime, ils perturbent également le pouvoir en place. Sit-in, manifestations… Quasiment tous les modes d’actions collectives y passent. Pour ne rien arranger, la crise économique ne facilite en aucun cas la transition démocratique. La crise politique, qui touche le voisin libyen, non plus. Le ministre tunisien déplore d’ailleurs « une période de turbulence qui empêche le gouvernement et l’assemblée constituante de travailler dans la sérénité ». Il déplore également l’attitude des médias, qui chercheraient selon lui à « abattre le gouvernement ». Des propos qui paraissent contradictoires, dans la mesure où la liberté d’expression et la liberté de la presse sont justement deux principes propres aux régimes démocratiques.

 Quelle place pour l’Islam ?

La laïcité aussi en est un. D’ailleurs quelle est donc la place de la religion musulmane dans le processus constituant ? Une distance entre la puissance publique et l’Islam est-elle instaurée ? « Oui, répond Xavier Philippe, professeur de droit à l’Université d’Aix-Marseille. Mis à part dans le préambule de la constitution, qui rappelle le contexte et l’histoire de l’élaboration du texte, on ne parle plus vraiment d’Islam, mais de religion ». L’article 14 stipule en effet que « l’Etat protège la religion, et est le garant du sacré et des lieux du culte ». On ne parle donc plus de religion musulmane, mais des religions dans leur ensemble. Avec en prime, la garantie que l’Etat prônera désormais la liberté des convictions. Pour le coup, la révolution est aussi et surtout constitutionnelle.

 

Tristan Molineri

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