L’association Robin des lois a demandé à l’état que soient expérimenté les urnes en prison pour les prochaines élections législatives.
En 2012, lors des élections présidentielles et législatives, 50 000 détenus avaient le droit de voter. Mais seulement 500 ont usé de ce droit. C’est pourquoi l’association Robin des lois a attaqué mercredi dernier l’état pour que soient installées des urnes en prison. Son président, François Korber, dénonce un système « absurde et technocratique, pas du tout adapté aux réalités d’un établissement pénitentiaire ». François Korber sait de quoi il parle car il est lui-même un ancien détenu.
Suite à cette procédure judiciaire, le Garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas a rencontré les membres de l’association, ainsi que le député écologiste Sergio Coronado, associé à l’initiative de Robin des lois. Le ministre de la justice a alors tenu à rappeler « son attachement à promouvoir la participation des personnes détenues aux processus électoraux ».
Une éventuelle expérimentation du vote aux législatives
Voici donc ce qu’a déclaré le ministre de la justice. « Une étude de faisabilité allait être menée en vue d’une éventuelle expérimentation du vote en détention des personnes détenues aux élections législatives de juin prochain, qui supposera nécessairement une concertation avec le ministère de l’intérieur et le maire de la commune où se situerait l’expérimentation. » Toutefois, son représentant devant le tribunal administratif a appelé le juge à « être très prudent » face à cette annonce et souligné qu' »aucun engagement n’a été pris« .
Faisons un rappel concernant le droit de vote des personnes emprisonnées. En théorie, toute personne n’ayant pas été déchue de ses droits civiques expressément lors de son jugement au tribunal est autorisée à voter de facto. En cas de détention provisoire, le détenu peut voter par procuration. Quant aux personnes déjà jugées, elles peuvent obtenir une permission de sortie d’une journée s’il a été condamné à une peine de prison inférieure ou égale à 5 ans ou s’il a exécuté la moitié de sa peine si celle-ci était supérieure à 5 ans. S’il n’obtient pas cette autorisation, il peut voter par procuration.
Des mesures difficilement applicables
Le droit de vote du détenu est donc inaliénable dans le texte de la Constitution. Voilà ce qui en est pour la théorie. Mais pour la pratique en revanche, c’est beaucoup plus compliqué. Pourquoi ? Car les autorisations de sorties évoquées plus haut sont difficilement applicables. Il faut qu’elles soient sécurisées. Et donc elles nécessitent pas moins de trois agents pour accompagner le votant jusqu’aux urnes.
Et quand la permission de sortie est refusée (ce qui arrive souvent quelques jours avant l’élection), le détenu n’a alors pas le temps d’entamer une procédure de demande de procuration. Autre problème, celui de la confidentialité du vote par procuration. Difficile en effet pour les détenus de pouvoir compter sur quelqu’un de confiance dans l’univers carcéral.
« Une nécessaire socialisation des détenus »
En installant des isoloirs directement dans les prisons, toutes ces difficultés seraient donc résolues. Néanmoins, ceci ne réglerait pas le problème de l’abstention en milieu carcéral. Selon François Bès, le coordinateur du pôle enquête de l’Observatoire international des prisons, le profil « type » du détenu n’est pas celui d’une personne encline à aller voter et attachée à l’exercice de ce droit.
Mais cette mesure serait nécessaire, en ce sens qu’elle aiderait les détenus à conserver le plus possible un attachement à la société. C’est ce qu’explique Grégoire de Chavanes, l’ancien président de l’association L’Ombre et la plume crée par des étudiants de l’EDHEC Business School. « Il est très important de leur permettre de garder un lien avec l’extérieur, pour les préparer à la sortie ».
M. de Chavanes explique également que cela fait partie du processus de socialisation des détenus, afin de les aider à s’intégrer dans la société après leur sortie de prison.