Années 70-90. Apogée des narcotrafiquants colombiens, corruption, rivalités et règlements de comptes… Voici la véritable histoire du cartel de Cali.
La semaine dernière, nous vous parlions du narcotrafiquant le plus connu de l’histoire, « El Patron » alias Pablo Escobar. Après sa mort, le 2 décembre 1993, c’est le cartel de Medellin tout entier qui en prend un coup. Ce dernier perd en puissance et les collaborateurs de Don Pablo tombent petit à petit. Les frères Ochoa sont arrêtés puis mis en prison, Gacha est assassiné, Carlos Lehder est extradé. Bref, le début de la fin.
Mais à quelques centaines de kilomètres de la capitale colombienne, une autre organisation plus discrète mène à bien ses affaires et s’apprête à devenir les rois de la drogue : le cartel de Cali.
Un business de frangins
Le cartel de Cali voit le jour dans les années 70 grâce aux frères Gilberto et Miguel Rodriguez Orejuela ainsi qu’à « Chepe » José Santacruz Londoño. Alors que les deux frangins mènent une vie d’adolescent tranquille, ils se lancent dans le trafic de cannabis. Malheureusement pour eux, ils se font grillés rapidement par les douanes américaines. Toutefois, pas question de baisser les bras… Au début des 80’s, ils décident alors de s’attaquer à du plus lourd : le trafic de cocaïne.
À cette époque, Escobar et ses associés règnent sur la Colombie. Cela n’empêche pas pour autant les deux cartels (Medellin et Cali) d’entretenir de bonnes relations. Malgré leur rivalité, les dirigeants des deux organisations vont collaborer au point de se partager les bons plans. Ils se partagent ainsi les services du groupe paramilitaire Muerte A Secuestradores (Mort aux kidnappeurs, en français) créé en 1981 après l’enlèvement de Martha, la sœur des frères Ochoa, ou encore les routes tactiques pour faire passer la marchandise. De plus, le clan Escobar et le clan Rodriguez ne visent pas la même zone de marché aux États-Unis. Le premier se concentre plutôt du côté de la Floride tandis que l’autre s’étend vers New-York.
Le début d’un conflit sanglant
Personne ne sait encore aujourd’hui pour quelle raisons les deux cartels sont entrés en conflit. Mais à un moment de l’histoire, ils ont commencé à se marcher dessus. Pire encore, à se faire la guerre. Selon les rumeurs, Medellin aurait cherché à s’accaparer les new-yorkais ou aurait voulu se venger de la mort de l’un de leurs hommes.
De ce fait, les hostilités sont lancés par Cali premièrement. Une voiture piégée est explosée dans la maison où réside Pablo Escobar et sa famille. En guise de réponse, le « roi de la cocaïne » dynamite plus de trente usines de fabrication appartenant à l’entreprise Rodriguez. Ces actes signent le début d’une guerre sans précédent transformant le milieu de la drogue en un véritable bain de sang. Pour ne pas arranger les choses, les pouvoirs publics colombiens s’en mêlent.
Escobar au tapis, bonne et mauvaise nouvelle pour Cali
Si Cali finit par mieux s’en sortir mieux que Medellin, c’est parce qu’ils n’ont pas la même stratégie. Medellin, lui, joue les « narco-terroristes » en faisant la guerre aux instances contrairement à Cali qui cherche plutôt à les infiltrer. Le fait que les frères Rodriguez décentralisent la plupart de leurs activités les aident également fortement à s’éloigner des radars de la justice. De cette manière, les bénéfices sont en pleine croissance. 80-90% du marché européen, asiatique et américain est détenu par le cartel, d’après la Drug Enforcement Administration (DEA).
La fin du mythe Escobar en 1993 va être à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle pour le cartel de Cali. Une bonne puisque cela signifie que leur ennemi n°1 est hors-jeu. Et une mauvaise étant donnée que maintenant ce sont eux la nouvelle cible des gouvernements américain et colombien. 1,5 millions de dollars est donc proposé pour une quelconque information pouvant mener à l’arrestation des frères Rodriguez Orejuela.
Se acabó !
Chose promise, chose due. À peine six mois après l’entrée en fonction du nouveau général Rosso José Serrano à la tête de la police, plus de cinq principaux chefs du cartel de Cali sont capturés. L’aîné Gilberto se fait attraper le 9 juin 1995, son frère Miguel le 6 août. Tout deux sont condamnés respectivement à 15 et 24 ans d’emprisonnement. Néanmoins, jusqu’en 2004-2005, les Rodriguez vont réussir à ne pas se faire extrader aux États-Unis pour ainsi continuer leur business paisiblement depuis leurs cellules.
C’est l’arrivée à la présidence d’Álvaro Uribe qui va changer la donne. En promettant de renforcer la politique sécuritaire du pays, il prend (enfin) la décision de les extrader pour de bon. Cette fois-ci, ils écopent chacun de 30 ans de prison par une cour américaine pour exportation conséquente de cocaïne, corruption, blanchiment d’argent… S’ensuit la disparition définitive du cartel de Cali peu de temps après cet événement.