Le phénomène littéraire de E. L. James est sorti au cinéma hier. Best seller vendu à plus de 100 millions d’exemplaires dans le monde depuis sa parution en 2011, 50 nuances de Grey est également annoncé comme le succès cinématographique de ce début d’année. A tort ! Long, insipide, pas même excitant, le film se révèle sans intérêt.
Un scénario maigre, très maigre
Le trame scénaristique de 50 nuances de Grey tient en une ligne : l’histoire d’une pucelle de 22 ans, étudiante en littérature anglaise, qui tombe sous les charmes d’un jeune milliardaire qui l’initie au sadomasochisme. Ou comment un synopsis devient son propre spoiler. Car durant les deux heures de projection, l’intrigue n’avance pas et l’on n’apprend rien de concret sur les personnages qu’on ne sache déjà au début. La ravissante Anastasia Steel, interprétée par une Dakota Johnson souvent caricaturale lorsqu’elle mordille ses lèvres ou son stylo à tout bout de champs, convainc tout de même en jeune fille inexpérimentée. On saluera la performance de l’actrice de 25 ans, qui apparaît régulièrement dans le plus simple appareil et dans des positions assez humiliantes. Le milliardaire Christian Grey ne révèle quant à lui pas grand chose de son parcours qui l’a amené à pratiquer cette sexualité sadique et violente. Austère et impassible, on aurait aimé en savoir plus sur lui et apprécier une exploration de sa faille psychologique. L’acteur Jamie Dornan n’apporte ici que sa plastique et ne fait pas ressortir suffisamment le caractère sombre de Grey.
50 nuances de gris
50 nuances de gris aurait été un bon titre. L’esthétique minimaliste et trop sobre du film le rend fade. Les décors immenses et impersonnels des suites luxueuses de Mister Grey dans lesquelles les protagonistes évoluent ne dégagent rien. On s’ennui devant une romance niaise et fleur bleue alors qu’on nous vend une relation passionnelle et charnelle. Frileux et pas osé, les quelques scènes de sexe ne sont ni excitantes ni érotiques. On est loin de 9 semaines 1/2 malgré une tentative d’hommage raté à la mythique scène du glaçon. L’impressionnante « salle de jeu » de Mr Grey, équipée de toutes sortes d’objets sadomasochistes, s’apparente plutôt à une véritable salle de torture qu’autre chose.
Dépeint comme un extrémiste de cette pratique sexuelle hors norme, on est surpris de constater qu’il n’utilise que sa cravache ou son fouet. Non pas qu’on voudrait voir Anastasia se faire marave les fesses par son « dominant ». Seulement l’originalité du film se trouvait là, mais reste peu et mal exploitée par le réalisateur. Traité sans pudeur et avec naturel, le film aurait sans doute était bien plus intéressant. Or il parait bâclé. Les scènes semblent se succéder sans qu’on en comprenne l’évolution. En effet, au bout de quelques rendez-vous à peine, la timide et réservée étudiante en littérature anglaise se transforme en une insatiable bête de sexe, prête à se prendre une fessée impromptue en guise de punition. Le jeu de séduction est complètement invisible, laissant finalement paraître la jeune fille romantique comme un simple objet sexuel, enfermée dans sa position de « soumise ».
Leur relation froide et sans véritable intérêt laisse perplexe au terme de ce premier volet de la trilogie. Avec une impossibilité de s’identifier aux personnages (les secondaires n’apparaissent presque pas et ne servent en rien l’intrigue), on reste en dehors du film tout le long et on s’ennuie. 50 nuances de Grey ne suscite pas d’émotions et nous laisse de marbre.