La planète bleue vire au rouge. En effet, plus des trois quarts de son étendue océanique sont souillées par les déchets plastiques humains, comme en témoigne l’étude parue lundi 30 juin aux Etats-Unis, dans la revue Les Comptes rendues de l’Académie américaine des Sciences (PNAS). Menée par près de 400 chercheurs internationaux –ayant récolté 200 000 échantillons d’eau, de plancton, de particules atmosphériques et de gaz dans 313 points des océans Indien, Pacifique et Atlantique, à des profondeurs allant jusqu’à 6 000 mètres–, celle-ci met en évidence le fait déjà connu que des micro-fragments de ce composé chimique pollueraient jusqu’à 88% de la surface des océans et affecteraient irrémédiablement la chaîne alimentaire marine.
« Les courants océaniques transportent des objets de plastique réduits en de très petits fragments par les radiations solaires, et ces micro-plastiques, qui peuvent demeurer ainsi des centaines d’années, ont été détectés dans 88% des échantillons de la surface des océans lors de l’expédition Malaspina, en 2010 », a expliqué Andrés Cózar, scientifique du Centre supérieur de la recherche scientifique (CSIC) de l’université de Cadiz en Espagne et principal auteur de ladite étude. Une recherche qui a également confirmé l’existence de cinq grandes zones du globe –correspondant aux cinq grandes aire de circulation des eaux de la planète– où s’accumulent ces débris plastiques. La plus connues est d’ailleurs située dans l’Océan pacifique, au large des côtes japonaises et américaines : elle fait 3,5 millions de km² et se nomme « le septième continent ».
Un tsunami écologique (et économique) assuré
Les principaux résidus trouvés dans ces plaques de déchets flottants sont le polyéthylène et le polypropylène, des polymères utilisés dans la fabrication d’objets quotidiens tels que les sacs, les emballages alimentaires et les bouteilles. Il faut dire que chaque année, dans le monde entier, environ 250 millions de tonnes de plastique sont produites, dont 6,4 millions sont jetées, voire déversées sans scrupules dans les océans –ce qui, petite anecdote, équivaut à 21 fois le poids de l’Arche de la Défense. Ces ordures mettent ensuite plus d’un millénaire à se désagréger dans la nature.
Un désastre qui aurait un impact considérable sur la faune marine, modifiant son écosystème en favorisant la prolifération d’insectes méconnus, quand il ne tue tout simplement pas… En effet, Greenpeace évalue à environ 1 million le nombre d’oiseaux et à 100 000 celui de mammifères marins mourant chaque année des suites d’ingestion de plastiques. Enfin, cela provoquerait également des dégâts halieutiques et touristiques estimés à au moins 13 milliards de dollars selon l’ONU. Une annonce faite lors de l’ouverture de sa première Assemblée sur l’environnement, à Nairobi, le 23 juin dernier.
Malheureusement, cette catastrophe écologique semble à présent impossible à endiguer, même pour les spécialistes. Ainsi, d’après Marcus Eriksen, directeur de recherche et d’éducation à la Algalita Marine Research Foundation, « il n’y a rien que nous puissions faire maintenant, à l’exception de ne pas faire plus de mal ». De quoi faire sombrer tous nos espoirs et nous enfoncer, encore un peu plus, la tête sous l’eau.