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Interview – The Magicians : « Une histoire unique qui est plus qu’un Harry Potter pour adultes »

Jason Raph et Stella Maeve sont les deux héros de l’excellente surprise The Magicians. Nous les avons rencontré lors du Festival de télévision de Monte-Carlo.

C’est quoi The Magicians ? Bientôt diplômé, Quentin Coldwater a du mal à se projeter dans son avenir en laissant de côté la magie qui le passionne depuis sa tendre enfance. A sa grande surprise, le jeune homme est admis à Brakebills, une école secrète qui forme les futurs magiciens. Il y fait la connaissance d’Alice, Penny, Margo et Eliot , avec lesquels il entretient des relations tantôt complices et souvent conflictuelles. Ensemble, ils vont pourtant devoir faire face à de grands dangers, des forces maléfiques venus de contrées insoupçonnées. Pendant ce temps, Julia, la meilleure amie de Quentin, qui a échoué aux tests d’admission de Brakebills, suit son propre chemin. Un chemin obscur et dangereux qui pourrait la mener à sa perte…

 

Avant tout, une question très simple : pouvez-vous présenter vos personnages dans la série ?

Stella Maeve : Julia Wicker : elle est super, super maligne, intellectuelle, académique, entraînée, passionnée, et on la voit évoluer en tant qu’être humain, se dépouiller des façades qu’elle a portées pendant longtemps, et approcher de qui elle est vraiment, essayer de découvrir ce qui se passe pour elle.

Jason Ralph : Je joue Quentin, qui est de toute évidence déprimé, cliniquement et existentiellement, qui est perpétuellement déçu. Je pense qu’on le voit à une période de sa vie où il est vraiment accablé par les problèmes. Vers la fin, on verra comment il s’arrache à ses problèmes, comment il va devoir gérer tout ça et se réconcilier avec celui qu’il est vraiment. En saison 2, ce sera intéressant de voir ce qui se passe.

Pour décrire la série, êtes-vous d’accord si je parle d’un Harry Potter pour adultes ?

S.M. : Je crois que c’est une manière de voir les choses. Le thème récurrent qu’on partage, c’est la magie ; c’est comparable à Narnia. Certaines personnes disent que c’est la rencontre entre Brett Easton Ellis – l’auteur d’American Psycho – et Harry Potter : je pense que c’est davantage le cas. C’est plus sombre, plus mature, on montre beaucoup de sexualité, de fluidité et de réalisme . Ce qui, je crois, est en notre faveur.

J.R. : Oui, je pense que Lev Grossman, qui a écrit les romans, a certainement été inspiré par Harry Potter, Narnia, Le Seigneur des anneaux, et toute cette super fantasy qui existe aujourd’hui. Et je pense que ça se voit dans les livres. A tel point qu’on a ces personnages qui ont lu tout Le Seigneur des anneaux, et qui regardent probablement The Walking Dead, qui sont immergés dans le monde de la science-fiction d ‘aujourd’hui. J’imagine qu’en ce sens, l’histoire est unique, mais c’est davantage qu’un Harry Potter pour les adultes. Tout est global, il y a toutes ces influences qui apportent une patte.

Ce qui est intéressant dans la série, c’est qu’elle reprend les codes que nous connaissons pour les casser. Généralement, la fille est la gentille et le garçon devient le méchant : dans la série, c’est le contraire.

J.R. : Bien sûr. Il y a beaucoup de choses dans la série qui fonctionnent à l’envers. Je ne sais pas si je qualifierais Julia de méchante, mais elle emprunte un chemin très sombre.

S.M. : Oui. Je ne sais pas si c’est le Bien contre le Mal, je crois que c’est plus la lutte intérieure de tout être humain, la découverte que la magie est réelle, et de toutes les choses qui se produisent ensuite. Et toute cette lutte intérieure constante – quand j’ai tous ces pouvoirs, ou que je vois toutes ces choses que je n’avais jamais vues auparavant, comment je fais en mon for intérieur ? Est-ce que je fais ce qui est bien ? Est-ce que je fais ce que j’ai envie de faire sur le moment ? Je crois que c’est difficile à dire. J’aime qu’on puisse explorer cet aspect avec Julia, voir que tout n’est pas parfait. Et que ce n’est pas parce qu’on fait de la magie qu’on obtient une belle expérience. En réalité, ça peut être quelque chose de dur et d’affreux, et pas quelque chose de beau et d’amusant.

J.R. : J’aime que ce monde soit rempli d’ambiguïté. Il n’y a pas de Bien ou de Mal clairement définis. On n’a même pas un vrai méchant. Je ne sais pas si vous avez terminé la saison, mais notre méchant n’est peut-être pas un méchant. Quentin aurait facilement pu être le méchant. C’est quelqu’un qui est fasciné par cet endroit, qui a obtenu ce qu’il voulait, et quelqu’un essaye de le lui reprendre.  Il essaye juste de s’accrocher aux choses qu’il aime. Et il blesse des gens en faisant ça, mais tout est gris, et je crois que c’est ce qui rend cet univers pertinent et donne ce sentiment d’ancrage dans la réalité, parce qu’il n’y a pas de Bien ou de Mal, tout dépend de la perspective de chacun.

Crédit : Alexandre Letren

Ce qui aussi intéressant, c’est la question et le thème central de la série : les conséquences de nos choix. Etes-vous d’accord ?

J.R. : Oui, absolument.

S.M. : Je pense que ça ne se voit pas suffisamment. Je pense que c’est génial que notre série fasse cela. Parfois, on fait des choses qui ne sont pas forcément supers ou profitables, ou vous faites des choses qui ne sont pas formidables… J’aime que l’on montre cela, parce que c’est la vie.

J.R. : Il y a l’idée que la magie pourrait en quelque sorte arranger toute votre vie : super, je suis déprimé et je déteste tout ; si je pouvais seulement avoir ce truc en claquant des doigts, je me sentirais heureux, j’aurais des amis et tout serait super. Mais rien n’est aussi facile.

S.M. : Il n’y a pas de récompense immédiate.

J.R. : C’est amusant à jouer. C’est terrible, mais amusant à jouer.

Comment décririez-vous la relation entre vos deux personnages ? De quelle couleur est votre relation ? Grise ? On ne sait pas si vous êtes amoureux, amis, âmes sœurs ?

S.M. : Je ne pense pas qu’ils le sachent, je crois que c’est un flou constant. Ils cherchent encore à le déterminer. Ils peuvent ressentir quelque chose à un moment donné, avoir ressenti quelque chose par le passé, ça peut encore changer. Quand des amis ne se sont pas vus depuis longtemps, ou quand des actes néfastes ont  été commis, on reprend les choses là où on en été resté, on fait en sorte que ça fonctionne. Je ne sais pas où ça se situe, dans la perspective de la saison 2.

J.R. : J’aime le fait que chacun d’eux comprenne quelque chose de différent sur leur relation. Du point de vue de Julia, ce sont de bons amis d’enfance, les meilleurs amis, et de celui de Quentin ils sont amoureux. Je ne sais pas. C’est un autre élément de l’histoire qui la rend grise, en constante évolution. La saison est structurée de telle manière qu’on  s’ouvre en même temps qu’eux, et on les voit dans le meilleur comme dans le pire. Ils ont été séparés pendant longtemps, ont suivi des parcours très différents. Tout en visant le même but au final mais par des chemins très différents et ils se rejoignent en ayant appris presque trop de choses sur le monde, et leur relation change et évolue à cause de ces informations.

C’est très surprenant, en regardant le pilote, de voir que votre personnage ne sourit pas. Ça donne une atmosphère très étrange à la série.

S.M. : C’est réaliste, vous voyez. Il n’est pas forcément dans une bonne situation.

J.R. : Je ne crois pas qu’il sourit avant l’épisode 6. Je me souviens de la première fois où il était écrit dans le script : « Quentin rit », et je me suis dit : « Oh mon Dieu ! Je ne sais pas comment Quentin rit ! Je ne sais pas ce que ça veut dire, je ne sais pas comment il sourit ! Est-ce que c’est bizarre, c’est quoi sa version d’un rire franc ? » Quelque chose s’est produit, mais je n’ai pas regardé, donc je ne sais pas !

Dernière question – la même pour tous nos invités : quelle série a été la plus importante pour vous quand vous étiez enfant ou adolescent ?  La série que vous aimiez regarder à la télévision ?

S.M. : Mon Dieu, enfant ou adolescente ? Toi d’abord ! Je suis bloquée, là… Qu’est-ce que je regardais ?

J.R. : Je regardais beaucoup cette série sur Nickelodeon, Salute your shorts…

S.M. : Oh oui !! Et Rocko’s Modern Life et Ren And Stimpy !

J.R. : Nickelodeon a marqué une grande partie de ma vie. Eh, Dude…

S.M. : Et celle avec le feu de camp la nuit ?

J.R. : Are you afraid of the dark ! Oui, elle était vraiment effrayante

Ensemble : Terrifiante !

J.R. : J’espère que ça tient encore la route – je ne veux pas savoir !

(Traduction Fanny Lombard Allegra)

About author

Rédacteur en chef du pôle séries, animateur de La loi des séries et spécialiste de la fiction française
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