Le 7 avril 2019 marquait le 25ème anniversaire du génocide rwandais. Le film Petit Pays, adaptation cinématographique du livre de Gaël Faye, paraîtra fin août 2020, après avoir été retardé par la crise sanitaire mondiale. Il nous offre l’occasion de faire un retour sur cette guerre civile, survenue entre avril et juillet 1994.
Le film Petit Pays, réalisé par Eric Barbier, paraîtra dans les salles le 28 août 2020. Adapté du roman du même nom, il retrace l’enfance d’un jeune garçon vivant au Burundi, pendant les années 1990. Le cadre bucolique de ses premières années est peu à peu entaché par les prémices et l’éclatement d’une guerre civile au Rwanda et au Burundi, en 1994. L’auteur, Gaël Faye, s’il précise que Petit Pays n’est pas une autobiographie, retrace toutefois des éléments similaires à son enfance passée à Bujumbura, capitale du Burundi. Avec un père français et une mère rwandaise, il lie son histoire à celle de son héros, Gaby. Malgré le contexte de ce récit, c’est une histoire poétique. Pourtant, son mélange avec un style prenant nous plonge entre violence, rire et délicatesse. Ainsi, Gaël Faye y raconte l’histoire d’un petit garçon à l’innocence fracturée.
L’histoire du traumatisme d’un peuple dans les années 1990.
Ce récit fait la lumière sur une terrible guerre civile entre deux groupes ethniques, qualifiée de génocide par le Conseil de sécurité de l’ONU et le Tribunal pénal international pour le Rwanda en novembre 1994. Elle débute le 7 avril 1994, par l’assassinat des présidents du Rwanda et du Burundi, Juvénal Habyarimana et Cyprien Ntaryamira, dans un attentat. C’est le déclenchement du massacre des Tutsis par des extrémistes Hutus, qui les accusent d’avoir perpétré cet attentat. Une paix fragile après une première guerre entre 1990 et 1993 s’accompagne du refus de réintégrer les Tutsis. En 1994, presque un million de morts dans ces populations sont liées au génocide.
Si Gaël Faye nous expose la violence de cette guerre, il décrit aussi avec justesse la difficulté de vivre l’après. Le deuil de l’enfance, le deuil d’une terre, le déracinement et l’arrivée brutale dans un pays jusqu’ici regardé de loin, la France. « Je pensais être exilé de mon pays. En revenant sur les traces de mon passé, j’ai compris que je l’étais de mon enfance. Ce qui me paraît bien plus cruel encore. » Gaël Faye, Petit Pays, 2016, Grasset. Ainsi, cette histoire, c’est celle d’un exil, mais aussi de la mémoire d’un peuple.
Un récit qui participe à la reconstruction de la mémoire du peuple rwandais.
Entre fiction et réalité, l’auteur retrace le récit d’une reconstruction amorcée par le retour, la recherche, le questionnement. Par ailleurs, ce dernier montre que le génocide rwandais a encore ses parts d’ombres. L’actualité fait peu à peu resurgir des éléments qui nous éclairent sur le rôle de coupables présumés, notamment sur la responsabilité d’entités politiques, telles que l’Etat Français. En 2019, Jean Varret, ancien général, témoigne, pour les 25 ans du génocide, la responsabilité d’un « lobby militaire », et du rôle néfaste de certains postes clés de l’armée française. Ces types de propos sont pourtant condamnés par un grand nombre de personnalités politiques, comme Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères. Il dénonce les accusations envers la responsabilité de la France. Plus récemment, en mai 2020, Félicien Kabuga, accusé d’être le « financier du génocide rwandais », est interpellé à Asnières-sur-Seine. Il y vivait caché sous une fausse identité depuis vingt ans.
L’histoire du génocide rwandais est donc une histoire mouvante, et dont les nombreux questionnements trouvent peu à peu des réponses. Dès lors, Petit Pays et son adaptation cinématographique nous montrent que la création participe à la construction de témoignages, et à la reconstruction de la mémoire d’un peuple.
Gaël Faye, qui est également auteur-compositeur-interprète, vit aujourd’hui à Kigali, capitale du Rwanda, après une vingtaine d’années passées en Europe.