C’est l’un des événements de cette d’année : Baran bo Odar, le créateur de la géniale Dark pour Netflix, revient avec 1899, une toute nouvelle série à s’arracher les cheveux.
C’est 1899 ? La série suit les circonstances mystérieuses du voyage d’un bateau d’immigrés d’Europe navigant vers New York. Les passagers sont tous d’origines différentes mais partagent les mêmes rêves et espoirs quant au nouveau centenaire et à leur avenir à l’étranger. Lorsqu’ils découvrent un autre navire à la dérive en pleine mer, disparu depuis des mois, leur voyage prend une tournure inattendue. Ce qu’ils trouvent à bord va transformer leur voyage vers un monde meilleur en une véritable énigme cauchemardesque, révélant des liens entre chacun des passagers, entremêlés dans une toile de secrets.
L’essentiel
Après la très belle découverte de Dark et l’univers si particulier de son créateur Baran bo Odar, on attendait avec impatience l’arrivée de la série 1899 sur Netflix. Dark prenait comme toile de fond le voyage dans le temps et ses conséquences, notamment les paradoxes temporels. 1899 lui ressemble sous bien des aspects même si la série prend plus de temps pour afficher clairement son univers. Est-ce une série d’horreur à la The Terror ? Une nouvelle variation du thème du « Triangle des Bermudes » ? Ou autre chose …
Portée par une distribution variée et riche, une réalisation soignée et un sens de la narration vertigineuse, 1899 est de ces séries qui ne conviennent pas à une diffusion sur Netflix car elle mériterait une « mise au repos » entre chaque épisode pour élaborer des théories façon Lost qui est une référence certaine quand on regarde la série. Moins perturbante que Dark dans ce qu’elle demande à nos petits cellules grises, 1899 est une série qui est tout sauf facile et qui demande des efforts de tous les instants en ne prenant pas son spectateur pour quelqu’un de passif : on regarde pleinement la série afin de ne rien rater de l’expérience qui est proposé.
On aime
Dans une interview récente, Baran bo Odar explique avoir dissimulé dès le début de l’épisode 1 un indice, certes très subtile, de la révélation finale. Comme dans Dark, tout est là, sous nos yeux si tant est qu’on veuille le voir. Dans 1899, il y a ceux qui ont deviné dès le début ce qui se trame (sans doute par expérience du visionnage de série) et ceux qui se sont faits avoir comme on dit. L’auteur de ces lignes est de la première catégorie. On est d’abord séduit par l’ambiance obscure qui règne sur le bateau, belle référence aux univers gothiques comme ceux de la Hammer ; puis on est embarqué par les indices que l’on comprend être posés là sans que l’on en saisisse le sens véritable ; ensuite, comme les passagers, on « subit » cette montée en puissance qui ne faiblit jamais et qui nous rappelle les meilleures heures de Lost en nous entraînant dans une véritable lessiveuse qui fait qu’on ne comprend pas ce qui arrive. L’une des séquences les plus impressionnantes est celle qui concerne à mi-parcours la très grande majorité des passagers (on en dira pas plus mais c’est à la fois puissant et traumatisant). Il y a enfin la dernière partie de la série qui nous laisse entendre que ce qu’on voit est bien plus impressionnant que ce qu’on aurait pu imaginer. Baran bo Odar a imaginé une nouvelle histoire alambiquée et riche qui le rapproche d’autres illustres auteurs modèles comme Christopher Nolan. La fin de la saison redistribue d’ailleurs totalement les cartes et relance la série dans une direction inimaginable … ou pas, seule la saison 2 pourra nous le dire vraiment !
Au final, si elle se révèle sans doute moins réussie que la première saison de Dark, jouissive au possible, 1899 n’en demeure pas moins une belle réussite, un modèle d’écriture et de maîtrise de son histoire. Elle place son « Créateur » Baran bo Odar comme un très grand auteur. D’ailleurs sous bien des aspects, 1899 est une métaphore très complexe sur l’imaginaire d’un auteur et ce qu’il peut faire pour maintenir son univers cohérent et permettre à ses personnages de vivre ce qu’ils ont à vivre jusqu’au bout. On a parfois l’impression ici que les personnages arrêtent eux-mêmes leur créateur pour s’en affranchir et essayer de comprendre d’où ils viennent, comment ils sont nés. Cette sous-couche rend la série en tout point fascinante.