A l’occasion du lancement de 1923 (spin off de Yellowstone) sur Paramount+, on évoquera la collaboration de deux artistes pour qui l’ouest sauvage n’a aucun secret.
[Extrait Sonore « 1883 »]
[« SérieFonia : Season V : Opening Credits » – Jerôme Marie]
C’est le premier mercredi du mois… et de l’année… Et c’est SérieFonia. Alors… Avant toute chose, je dois vous adresser mes meilleurs vœux… Même si on est d’accord que ça ne changera rien et que tout ce qui doit arriver arrivera… Mais aussi vous raconter un peu les coulisses du choix thématique de cette première pastille de 2023… Car il se trouve que mon papa aime bien écouter SérieFonia. Malheureusement, souvent, et bien, les extraits proposés ne sont pas franchement à son goût. A l’occasion du Réveillon de Noël, il m’a même avoué n’avoir apprécier absolument aucuns morceaux de la Spéciale James Cameron ! Moi qui pensais que, au moins Titanic ferait la blague… Faut croire que non. Alors, j’ai eu envie de lui faire plaisir et de parler un peu de séries et de films qu’il connait et apprécie. Et l’une de nos marottes du moment étant Yellowstone… et bien… C’est parti…
[« Yellowstone – Theme (Live) » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Une série de cowboys, écrite par un cowboy, qui fait fi des désormais incontournables codes contemporains en privilégiant l’art de la narration au simple « cochage de cases de la bienséance moralisatrice » pour mieux renouer avec les récits authentiques et sans concessions des grandes sagas familiales d’antan. Depuis cinq saisons déjà, Kevin Costner incarne le patriarche John Dutton, troisième du nom, et « règne » sans partage ou presque sur les terres du plus grand et puissant ranch des environs de Yellowstone… 3 fils, une fille, un empire. Aujourd’hui menacé par divers promoteurs, sénateurs et autres représentants de réserves indiennes bien décidés à se réapproprier ce qui, jadis, leur appartenait de droit. Le style est précis. Diablement réaliste. Brutal parfois… violent souvent. Les héros n’en sont pas. Et leurs adversaires ne méritent pas forcément tous le sort qui leur est réservé… Mais entre grands espaces, chevauchées endiablées, machinations et fratrie sans cesse déchirée : Yellowstone est assurément de ces séries qui rendent immédiatement accro… en plus d’avoir une sacrément bonne musique…
[« Yellowstone, saison 1 – Adagio » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Elle est signée par un tandem : l’un connu et l’autre beaucoup moins. Le connu c’est Brian Tyler… Si, si, vous voyez très bien qui c’est, je vous en ai plusieurs fois parlé pour avoir composé ça…
[« Children of Dune – The Ring of Paul » – Brian Tyler]
Les Enfants de Dune. C’était en 2003 pour la mini-série supervisée par John Harrison et le compositeur avait parfaitement su capter à la fois la portée épique dont Frank Herbert fait preuve dans ses romans, mais également la dimension beaucoup plus subtile et sacrée de son propos… Quelques années plus tard, l’émission Pékin Express s’est malheureusement approprié ses principaux thèmes, et ce à l’international, presque jusqu’à faire oublier dans l’inconscient collectif d’où venait ces morceaux… Une opération financière certainement juteuse… mais néanmoins dommageable pour la reconnaissance de l’œuvre originale, que le grand public continue de ne pas (re)connaitre à sa juste valeur… D’ailleurs, pour rester un peu dans la catégorie « SF que tout le monde a oublié alors que c’était ach’ment bien », c’est lui qui s’était également chargé de la partition de la bien trop courte série Terra Nova en 2011.
[« Terra Nova – Memory’s Echo » – Brian Tyler]
Si ses premières influences lui viennent directement de ses grands-parents (sa grand-mère était pianiste et son grand-père directeur artistique sur des monuments tels que Samson et Dalila et Les dix commandements), c’est néanmoins au compositeur Robert Kraft, qui avait notamment signé Hudson Hawk, que Brian Tyler doit à la fois sa vocation et ses premiers pas dans la musique pour l’image. Durant une dizaine d’années, ce jeune natif de Los Angeles officie essentiellement sur des métrages à tendance horrifiques avant d’enchainer Annapolis, Fast and Furious : Tokyo Drift et Finishing the Game pour le réalisateur Justin Lin, avec qui il devait continuer d’œuvrer sur un bon paquet d’autres chapitres de la saga des Fast and Furious, dont le 7 reste mon préféré…
[« Furious 7 – Farewell » – Brian Tyler]
En 2008, Sylvester Stallone achève de le propulser sur le devant de la scène en lui proposant de prendre la relève de Jerry Goldsmith, décédé en 2004, sur John Rambo : le quatrième volet de la saga du même nom… ou First Blood pour les puristes… Ce qu’il fait d’ailleurs avec un certain brio.
[« Rambo – Rambo Theme » – Brian Tyler]
Il y retravaille naturellement le thème de Goldsmith… y ajoute une petite touche personnelle… et retrouve d’ailleurs le personnage onze ans plus tard à l’occasion de Rambo : Last Blood en 2019…
[« Rambo : Last Blood – Sorrow » – Brian Tyler]
T’as vu, Père ? Même sur Rambo, je fais attention à tes p’tites oreilles sensibles et je reste dans les mélodies les plus douces… Preuve que Brian Tyler, extrêmement doué en matière d’épique et de grandiloquent, sait aussi parfaitement canaliser les émotions plus… intimes. Y compris sur des grosses machines de type Iron Man 3, Thor 2… ou même Call of Duty et Assassin’s Creed si vous être plus branché jeux vidéo. Mais… revenons-en un peu à Yellowstone…
[« Yellowstone, saison 2 – Years Remembered » – Brian Tyler & Breton Vivian]
C’est en 2017, sur le film xXx : Reactivated que Tyler commence à travailler avec un jeune coordinateur musical australobritannique répondant au nom de Breton Vivian… Vivian avec un A. Et il faut croire que les deux hommes accrochent bien puisque, la même année, ils enchaînent également avec le remake de… Power Rangers…
[« Power Rangers, 2017 – Together We Stand » – Brian Tyler]
Puis avec Fast and Furious 8, The Fate of the Furious… et le très oubliable La Momie d’Alex Kurtzman… L’un des rares Tom Cruise de ces dernières années que l’on a un peu tous tendance à vouloir oublier…
[« The Mummy – Egypt’s Next Great Queen » – Brian Tyler]
Dès l’année suivante, en 2018 donc, Tyler encourage Breton Vivian à passer de coordinateur, ou assistant musical, à compositeur en bonne et due forme. Lui qui, jusque-là, ne s’était fait la main que sur quelques courts-métrages, écrit les morceaux additionnels du documentaire The Devil We Know : une enquête autours des dangers potentiels causés, dans la nourriture notamment, par l’utilisation de l’acide perfluorooctanoïque (si j’arrive à le dire correctement, j’suis un champion)…
[« The Devil We Know – Theme » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Suis le flamboyant Crazy Rich Asians, une comédie romantique réalisée par Jon M. Chu… Tyler compose, Vivian arrange… Quant aux spectateurs/auditeurs… ils n’ont plus qu’une envie : danser. Pas étonnant qu’il apprécie tant d’en jouer quelques extraits en concert…
[« Crazy Rich Asians – Ting Swing (Live) » – Brian Tyler]
Avec ce film, Brian Tyler sait qu’il tient en Breton Vivian le partenaire idéal pour s’adonner à tous les genres, tous les sons et toutes les influences. Et ça tombe bien… Car la proposition Yellowstone ne va plus tarder à tomber. A ce stade de sa carrière, Brian Tyler continue d’enchaîner les productions… D’autant qu’il alterne sans distinction entre cinéma et télé. Rambo : Last Blood, Drôles de Dames d’un côté, Swamp Thing et Hawai 5.0 de l’autre… Si bien que quand Yellowstone débarque, avec son savant mélange de western, d’action, de drame et même de… soap… Impossible de refuser cet appel du Grand Ouest.
[« Yellowstone, saison 3 – Whatever We Want » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Créée en 2018 par Taylor Sheridan et John Linson, la série prend place, comme son nom l’indique, dans le parc national de Yellowstone, qui a la particularité de s’étendre sur trois états : le Wyoming, d’abord et en majorité, mais également l’Idaho et le Montana. Depuis cinq saisons, les rebondissements se succèdent au galop, servis par un casting d’exception, et les deux musiciens se répartissent le travail de façon totalement invisible, privilégiant – et on les en remercie – une approche ouvertement thématique et juste ce qu’il faut de « old-school », sans jamais sombrer dans le pur jus traditionnel pour autant…
[« Yellowstone, saison 4 – Horses » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Ce que personne n’avait nécessairement vu venir, en dehors peut-être des créateurs eux-mêmes, c’est que Yellowstone n’allait pas tarder à devenir… une franchise. Au cours de la saison 4, plusieurs flashbacks ont introduit les personnages de James et Margaret Dutton ; les ancêtres de la famille incarnée dans le présent par Kevin Costner, Luke Grimes, Kelly Reilly et Wes Bentley. Ces séquences devaient mener à la diffusion d’une première série dérivée, sobrement intitulée 1883… Et là, c’est le choc. La grande. La très grande classe…
[« 1883 – Enter James Dutton » – Brian Tyler & Breton Vivian]
1883, c’est un voyage de 10 heures entre le Tennessee et le Montana, au rythme des pérégrinations ultraréalistes d’un convoi de pionniers en route vers la terre promise et l’espoir d’une vie meilleure. Les Dutton, accompagnés de leurs deux enfants, et en particulier d’Elsa, leur fille l’aînée, par qui l’histoire nous est contée, sont destinés à devenir les premiers à fouler le sol de ce qui deviendra plus tard le domaine familial de plusieurs générations. La photographie est superbe. L’écriture, viscérale. Le jeu d’acteur, magistralement impliqué. Oui, je sais, ça en fait des superlatifs… Mais que vous voulez-vous ? Je suis juste honnête. Ca faisait longtemps, très longtemps, qu’une série ne m’avait pas fasciné comme ça…
[« 1883 – Lightning Yellow Hair » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Pour la musique, les deux hommes conservent leur approche thématique tout en essayant d’intégrer d’authentiques sonorités du passé. Parfois en se tournant vers des instruments d’époque. Parfois en adaptant la façon de jouer de ceux plus contemporains ; tels que la guitare flamenco. De plus, il est important pour eux de ne pas trop se démarquer de leur partition pour Yellowstone… Après tout, malgré les plus de cent ans qui en séparent les évènements, les deux séries se déroulent dans le même univers. Tout est une question de dosage… et d’émotion.
[« 1883 – Lost Love » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Par égard envers ceux qui ne l’ont pas vu, je prends bien garde de ne rien vous révéler de l’intrigue. Le moins possible en tout cas… Tout ce que je peux vous dire, c’est que chaque épisode met le spectateur face à une nouvelle difficulté relative à survie dans l’Ouest de ces années-là. Rappelant continuellement la rudesse et l’implacabilité de la vie d’alors. En cela, le personnage d’Elsa, incarné par Isabel May, qui évolue fatalement de la naïveté à la gravité, devient rapidement le principal point d’encrage des téléspectateurs… ses idées, perceptions et réflexions ouvrant et refermant chaque épisode par le biais d’une voix off touchante et toujours à propos… Et ce, jusqu’à la toute dernière seconde.
[« 1883 – Journey’s End » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Juste avant cela, en 2019, Brian Tyler et Breton Vivian ont également exploré d’autres horizons… La comédie romantico-dramatique, d’abord, avec A deux mètres de toi, de Justin Baldoni, autour de l’amour naissant de deux jeunes atteints de mucoviscidose…
[« Five Feet Apart – The Lights » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Puis, avec le plus classique, mais non moins émouvant, Redeeming Love de D.J. Caruso… Ici interprété en Live…
[« Redeeming Love – Suite » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Décidément très prolifique, Taylor Sheridan va encore plus loin dans l’univers Yellowstone en écrivant une troisième série… et pas des moindres. Mais je vais y revenir dans quelques instants. Car, entre deux, c’est lui aussi qui crée la tout aussi succulente Tulsa King pour Sylvester Stallone. Toutefois, ses deux compositeurs habituels étant trop occupés sur Yellowstone et ses prequels, c’est à un autre duo de musiciens qu’il s’adresse pour accompagner cette série de mafieux vraiment pas comme les autres… Leurs noms : Danny Bensi et Saunder Jurriaans, notamment connus pour leur travail sur Ozark et Fear the Walking Dead. Et Tulsa King, ça ressemble à ça…
[« Tulsa King – Main Title » – Danny Bensi & Saunder Jurriaans]
Depuis la toute fin 2022 aux US et très prochainement chez nous sur Paramount +, le troisième titre de la saga Yellowstone se déroule à présent en 1923, soit tout juste 40 ans après la fin des évènements de 1883… Et une fois encore… C’est le carton plein. La qualité de production n’a d’égale que la gravité des nouveaux sujets abordés… à commencer par l’intégration forcée des jeunes indiennes au sein des institutions religieuses nouvellement mises en place. Et côté casting… On est gâtés. Helen Mirren et Harrison Ford campent Cara et Jacob… les seconds représentants de la dynastie Dutton sur le sol américain…
[« 1923 – Theme » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Là encore, c’est dans la directe continuité musicale. Ample, plein de promesse et fort justement à cheval entre deux mondes. Celui du Far West et celui de la modernité. Tel Jacob et ses hommes débarquant en ville comme s’ils étaient encore au temp d’un Tombstone et sa mythique fusillade d’O.K. Corral, alors que les automobiles et autres signes de modernisme commencent en réalité à s’approprier l’ensemble de l’univers urbain, la musique se veut le reflet de cette évolution encore quelque peu indécise envers l’ancien et le nouveau monde. D’ailleurs, n’oublions pas qu’en parallèle, ils n’en délaissent pas la série-mère pour autant… La saison 5 de Yellowstone battant son plein…
[« Yellowstone, saison 5 – They Named Him John » – Brian Tyler & Breton Vivian]
Voilà, voilà… J’espère que cette impressionnante chevauchée au gré des larges horizons de l’Ouest américain vous aura fait voyager autant que moi. Vous l’aurez compris : même si j’adore Yellowstone, j’ai néanmoins développé un amour tout particulier pour son premier spin-off. D’ailleurs, coup de gueule, la série n’est proposé en France qu’en DVD… Pas de bluray et donc pas de haute définition ! Quelle honte… Moi qui aurais bien voulu la trouver au pied du sapin… et bah… du coup… non. Je me console donc en écoutant les deux volumes des musiques composées par Brian Tyler et Breton Vivian… et je vous quitte sur le bien nommé « It Was Beautiful », en vous souhaitant une nouvelle fois tout le meilleur pour cette année… 1883.
[« 1883 – It Was Beautiful » – Brian Tyler & Breton Vivian]
A écouter aussi : Les avatars musicaux de James Cameron | Seriefonia | VL Média (vl-media.fr)
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