Promoteur immobilier new-yorkais devenu émissaire diplomatique, Steve Witkoff multiplie les allers-retours en zones de conflit. Ce proche de Donald Trump, sans aucune expérience géopolitique, est aujourd’hui chargé des négociations les plus sensibles de la Maison-Blanche.
De l’immobilier aux couloirs du pouvoir
Rien ne destinait Steve Witkoff à la diplomatie. Né en 1957 dans le Bronx, diplômé de l’université Hofstra, il s’est d’abord illustré comme avocat d’affaires. En 1997, il fonde le Witkoff Group, une société immobilière qui prospère rapidement à New York. L’homme d’affaires y emploie son épouse et l’un de ses fils. Son empire est aujourd’hui estimé à 900 millions d’euros.
La vie de Witkoff prend un tournant personnel en 2011, avec la perte de son fils Andrew, victime d’une overdose à 22 ans. Il s’installe ensuite en Floride, non loin de la résidence de Donald Trump. Tous deux partagent leur passion du golf et un goût prononcé pour les affaires.
Leur relation remonte à 1986, lors d’un premier « deal immobilier« . Depuis, les deux hommes n’ont cessé de se rapprocher. En 2023, Witkoff témoigne en faveur de Trump, accusé de fraude à New York. En septembre 2024, il est présent lors de la tentative d’assasinat contre le candidat républicain. Un événement qui scelle définitivement leur proximité.
Un diplomate omniprésent
Le 12 novembre 2024, quelques jours après sa réélection, Donald Trump nomme Steve Witkoff émissaire spécial pour le Moyen-Orient. Une surprise, tant l’homme est étranger aux rouages diplomatiques. Et pourtant, il est immédiatement plongé dans les dossiers les plus sensibles : cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, discussion indirectes entres les États-Unis et l’Iran et surtout la guerre en Ukraine.
Dès ses premières semaines, il participe aux pourparlers à Doha sur Gaza. Son style direct, jugé peu conventionnel par les diplomates de carrière, séduit certains, irrite d’autres. Mais la Maison-Blanche l’assume, Trump le défend.
Ce mercredi, il est arrivé à Moscou. Une visite qualifiée d' »importante » par les services de Vladimir Poutine, à moins de 48 heures de l’ultimatum lancé par Trump au Kremlin. Stopper les opérations militaires en Ukraine ou subir une vague de sanctions économiques.
Witkoff a déjà rencontré Poutine à quatre reprises. Mais à Kiev, il est perçu avec méfiance.Trop conciliant, trop proche naïf. Certains responsables ukrainiens le surnomment même d' »idiot utile » pour le Kremlin.
Une mission importante
L’ultimatum de Trump prévoit des sanctions douanières contre les exportations russes. Mais également contre les pays qui achètent son pétrole, comme l’Inde ou la Chine.
Nw Delhi a déjà protesté. Le ministère indien des Affaires étrangères juge ces menaces « injustifiées et déraisonnables« . Il rappelle que les États-Unis eux-mêmes avaient encouragés ces achats en 2022 pour stabiliser les marchés mondiaux. Pékin, de son côté reste silencieux mais pourrait se faire entendre en cas de sanctions secondaires.
Guerre en Ukraine: l'émissaire de Trump, Steve Witkoff, est arrivé à Moscou https://t.co/6vuL1VU9Sh pic.twitter.com/Fx1OFHJX8J
— RFI (@RFI) August 6, 2025
Dans ce contexte tendu, Steve Witkoff joue une carte délicate. Il doit convaincre Moscou sans déclencher une crise mondiale. Certains analystes doutent de ses capacités. D’autres estiment qu’il pourrait « donner du corps à la menace américaine« . Tout dépendra de l’issue des échanges ce mercredi.
Selon des sources diplomatiques, Moscou pourrait proposer un moratoire sur les raids aériens. Et ce, en échange d’un report des sanctions. Un geste minimal, mais qui offrirait une issue politique face à l’impasse.
Le parcours de Witkoff reste atypique, son efficacité sujette à débat. Mais dans l’univers Trumpien, c’est souvent la loyauté plus que l’expertise qui ouvre les portes du pouvoir.