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A moins de 500 jours de la COP21, où en sommes-nous?

En décembre 2015 se déroulera à Paris la 21ème Conférence des Parties (COP21) de la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (UNFCCC en anglais), qui est censé aboutir à un accord global et politiquement contraignant comprenant les 195 pays parties à la Convention.

A moins de 500 jours de la COP21, nous sommes désormais en mesure, et ce depuis Varsovie, d’avoir une vision du déroulé du processus d’ici la signature de l’accord à Paris fin 2015. La décision 1.CP/19 a acté d’un calendrier qui demande aux pays de déposer le contenu de leur contribution nationalement déterminés (iNDC) dès le premier semestre 2015 (vraisemblablement en mars 2015 lors d’une intersession). Si cela est respecté par les Parties, nous rentrerions ensuite dans une période de consultation qui servirait à vérifier la cohérence et la compatibilité des engagements avec une application nationale. Cette période de consultation permettrait aussi, à partir du contenu des iNDC, de débattre rapidement du contenu juridique potentiel de l’accord final (voir dernière partie de l’article).

En attendant, les discussions sont au contenu des contributions plutôt qu’à celui de l’accord final. Le chemin est donc encore long, mais il faut impérativement passer par cette phase de définition des modalités de contenu. C’est pourquoi les co-chairs de la plate-forme de Durban (ADP) doivent fournir de plus amples exigences méthodologiques envers les Parties, afin de faire avancer les discussions plus rapidement. Il faudra pour cela éviter que les Parties réticents rechignent à nouveau sur le CBDR, le mécanisme de relèvement de l’ambition de la 2nde période d’engagement du protocole de Kyoto (amendement de Doha) ne semblant pas fonctionner. Insister ainsi plutôt sur le CBDR-RC peut toujours être un argument pour débrider les discussions[1].

Nous sommes en effet encore loin de dépasser le « firewall »[2] esquissé depuis le début des négociations entre les pays développés et les pays en développement. Les deux intersessions ADP 2-4 & 2-5 ont permis d’avoir un aperçu de ce qu’il reste à accomplir en termes de discussions pour s’accorder sur une substance commune et sur comment le principe de CBDR pourrait être intégré au nouvel accord. Sur ce dernier point, il apparait plus que probable que soient maintenus les différences de traitement sur le système de Mesures, Rapport & Vérification de la CCNUCC (MRV). En tout cas pour le moment, les co-chairs d’ADP ont simplement demandé aux Parties de soumettre leur iNDC via un document au contenu divers et varié (« miscellaneous document »).

La lenteur des discussions en mars a donné aux co-chairs d’ADP l’idée de séparer les discussions en contact group sur les différents aspects qui devraient être intégré aux iNDC (atténuation, adaptation, financements, renforcement des capacités, technologies, transparence, les iNDC elles-mêmes, axe de travail sur l’ambition pré-2020). Ce format de discussion a permis d’aller plus loin dans les discussions, afin d’avoir une première impression des visions et positions de chaque Partie sur les différents sujets, et cela a semblé plus productif en termes de dialogue sur les modalités des futures contributions. Mais nous devons avancer, c’est pourquoi les co-chairs d’ADP ont publié le 7 juillet une proposition de texte à adopter à Lima, découpé en deux parties (une sur les iNDC une sur l’axe de travail sur l’ambition pré-2020), afin d’avancer dans les discussions sur de potentielles décisions à prendre à la fin de l’année 2014. Une prochaine intersession est prévu à Bonn du 20 au 24 octobre, et devrait donc être consacré à débattre sur ces textes proposés.

Un accord global, pourquoi dont ?

Laurent Fabius accompagné de Laurence Tubiana, ambassadrice chargée des négociations climat.

Laurent Fabius accompagné de Laurence Tubiana, ambassadrice chargée des négociations climat.

Il apparaît primordial que cet accord s’inscrive dans la durée, pour accompagner la transition vers un développement bas carbone. La qualité de l’accord devra être appréciée au regard de sa capacité à se renforcer dans la durée. C’est pour cette raison que, si l’approche juridiquement contraignante reste un idéal de gouvernance pour tous les progressistes que nous sommes, un accord souple ne doit pas être vu comme une mauvaise chose. Avant Copenhague, le processus cherchait à se rendre « top-down », et ça n’a pas marché, alors que depuis, et avec la mise en place de la plateforme ADP, l’approche est devenu « bottom-up ». Au premier abord, l’inquiétude que nous pouvons avoir quant à cette nouvelle approche est bien sa capacité de compiler des contributions suffisantes pour rester sur une trajectoire compatible avec l’objectif de 2°C. C’est pourquoi elle doit viser à l’élaboration d’un processus en deux phases : la première viserait à rassembler tous les pays sous un accord à la COP21, la seconde serait donc post-COP21 et aurait pour objectif d’accroitre les ambitions des pays au fur et à mesure pour rester sur une trajectoire de transition bas-carbone suffisante.

L’élaboration de cette deuxième phase doit donc être intégré à l’espéré accord de long-terme de Paris. Cette phase de relèvement de l’ambition pourrait être composée de jalons intermédiaires qui permettront de définir le fossé d’ambition qui doit être comblé sur les différentes périodes à venir, à court et moyen terme. Une idée qui émerge actuellement au sein des négociations est celle de la mise en place d’un mécanisme d’effet cliquet. Ce type de mécanisme fixerait une interdiction de revenir en arrière sur ses engagements, les pays ne pourraient plus donc qu’accroitre, afin de contribuer à renforcer une dynamique de relèvement continu de l’ambition.

Quelle forme juridique l’accord pourrait-il prendre ?

La forme juridique de l’accord reste à ce jour une piste encore très floue, et devrait se dessiner courant 2015, en fonction des propositions des pays pour leur iNDC et de la période à laquelle ils les dévoileront. Les Parties ont précisé au moment de mettre en place la plateforme de Durban que ce serait un « protocol, another legal instrument or an agreed outcome with legal force under the United Nations Framework Convention on Climate Change applicable to all Parties ».

Idéalement, l’accord de paris prendrait la forme d’un protocole, qui rendrait obligatoires les processus tels les formats d’information, les indicateurs et comptabilisation des contributions, les modalités concernant le système de measuring, reporting, verification (MRV), la potentielle période de revue des travaux scientifiques, voire, si cela se concrétise, des objectifs afin de relever l’ambition des pays de manière continue, et enfin, la potentielle architecture d’une nouvelle plateforme pour une atténuation renforcée (PEM) qui viendrait remplacer les travaux effectués sous le Workstream 2 (qui vise à relever l’ambition pré-2020 des pays par l’action immédiate pour combler l’ « emission gap »). L’avantage d’un protocole serait de pouvoir s’appuyer sur les acquis, et ainsi s’inscrire dans la continuité de la Convention.

Il semble aujourd’hui difficile d’envisager une autre forme juridique que le protocole. Si c’est le cas, cela pourrait être simplement une décision COP mais l’échec serait explicite, ou un tout autre traité de droit international, qui serait alors inédit.

En ce qui concerne l’aspect contraignant, rien ne présage pour l’instant de la manière avec laquelle l’entrée en force sera faite, si l’accord serait « legally binding », s’il pourrait y avoir un contrôle et des sanctions en cas non-respect des engagements, les Parties s’en sont bien gardés.

La procédure d’adoption elle devrait être effectuée par consensus, ce qui rendrait l’accord moins ambitieux. Mais comme expliqué précédemment, cette souplesse permettrait d’au moins pouvoir insister sur certains aspect juridique (période de consultation, effet cliquet « no backsliding »). Il semble donc plus raisonnable de s’orienter sur quelque chose de plus souple, voire avec un contenu qui ne respecte pas dans l’immédiat la trajectoire des 2°C, mais qui pourra être continuellement revu à la hausse afin de potentiellement combler petit à petit le fossé d’ambition général. Tel semble se dessiner le futur accord.

Rappel des éléments de calendrier

  • 23 septembre : réunion des chefs d’État organisée par Ban-Ki-Moon => Discours des chefs d’Etats (qui pourraient dévoiler une partie de leur contribution au futur accord) ; l’après-midi sera consacré aux initiatives coopératives internationales et plusieurs discussions thématiques sont proposées (voir schéma ci-dessous)
Programme du sommet sur le climat organisé par Ban Ki-moon, en présence notamment de Barack Obama et François Hollande.

Programme du sommet sur le climat organisé par Ban Ki-moon, en présence notamment de Barack Obama et François Hollande.

  • 20-24 octobre : Sessions SB41, dont ADP2-6 à Bonn  => Organisé pour avancer sur la définition des iNDC, ainsi que sur le calendrier 2015 qui devrait être décidé à Lima
  • 23-24 octobre : Conseil européen  => Echéance fixé pour une décision, encore incertaine, sur le paquet énergie-climat 2030
  • 27-31 octobre : sortie de la synthèse du 5e rapport du GIEC ;
  • 4-7 novembre : pré-COP20 à Caracas ;
  • 1-13 décembre : COP20 à Lima ;
  • Décembre 2015 : COP21 à Paris

 

[1] Il s’agit du principe de « Responsabilités Communes Mais Différenciées » (CBDR), reconnu par la Convention et mis en œuvre dans le protocole de Kyoto ; ce principe cause aujourd’hui beaucoup de torts aux négociations, c’est pourquoi le principe de « Capacités Respectives » (RC) lui a été ajouté, pour insister sur le rôle présent de chacun au-delà de la responsabilité historique des pays développés

[2] Terme utilisé pour exprimé l’absence de consensus entre pays développés et pays en développement

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