Les ex-conseillers d’Emmanuel Macron, Ismaël Emelien et David Amiel, étaient hier à Lyon pour « défendre le progressisme »… et le chef de l’Etat ? La politique de l’exécutif n’était jamais loin.
Ils sortent de l’ombre. C’est à Sciences Po Lyon qu’Ismaël Emelien et David Amiel présentaient, pour la première fois, leur livre « Le progrès ne tombe pas du ciel » (Fayard). Un manifeste de défense du « progressisme », « seule voie d’avenir ». Devant un public clairsemé, les auteurs se sont livrés à un exercice difficile : faire le « service après vente » de la politique de l’exécutif sans le défendre aveuglement, avec une pointe de mea-culpa.
Entamé en janvier 2018, ce livre part d’un constat : l’entrée « dans une nouvelle aire politique » depuis mai 2017. Une « nouvelle aire » qui se caractérise par « des nouveaux acteurs et de nouvelles méthodes », précise David Amiel. Ainsi, pour Ismaël Emelien, « l’effondrement de la gauche et de la droite » n’est « pas le fruit des circonstances » mais « germe depuis plusieurs années ». L’enjeu ? « Définir ce qui vient après », c’est-à-dire « progressistes contre populistes ».
« Maximiser les possibles » ou la définition du macronisme
Deux ans après la conquête l’Elysée, les stratèges d’Emmanuel Macron définissent le macronisme comme « la maximisation des possibles de chaque individu ». Avec « une condition » précise Ismaël Emelien : « faire les choses ensemble ». « La conquête de l’autonomie » par « le progrès collectif humain » doit permettre « à chacun de choisir sa vie » abonde David Amiel. « Une réponse à la crise actuelle » selon les deux anciens conseillers.
« Les gens ont raison d’être en colère contre le système politique »
Pour eux, la contestation sociale entamée le 17 novembre est le fruit « d’une immense frustration » dû « au décalage entre les promesses et la réalité ». La faute à une mobilité sociale « à l’arrêt depuis les années 80 ». Et d’expliquer : « Une toute petite partie de la population peut accéder à ce qu’elle veut ». David Amiel et Ismael Emelien estiment qu’il faut d’abord « s’attaquer aux injustices » car « réduire les inégalités est un mensonge, elles existeront toujours ».
« Les gilets jaunes » ? Presque une chance pour Emmanuel Macron
« On ne se réjouit pas de l’effondrement du clivage gauche/droite » avouent les deux piliers de la macronie. A un mois des européennes, ils appellent à « une union des progressistes » pour « assécher les populistes » et « faire naître les changements culturels ». Comment ? En « renouant avec la société civile » préconise Ismaël Emelien, qui exhorte un changement de méthode « pour renouer avec la population » car « on ne change rien d’en haut, verticalement ».
« Il faut aller plus loin dans les transformations, ne surtout pas changer de cap ! »
Sans avoir « vu venir » les gilets jaunes, « ils ne sont pas le cœur du problème » tranchent Ismaël Emelien et David Amiel. En effet, « leurs revendications » sont « le fondement du programme d’Emmanuel Macron » en 2017, à savoir « le refus des partis politiques et le libre-choix de sa vie » détaillent-ils. Pour les deux ex-stratèges, cette crise est, non pas un coup d’arrêt, mais « le signe qu’il faut aller plus loin dans les transformations », « collectivement ».
La fin de la présidence jupitérienne ?
« On ne se préoccupe pas assez de ce qui passe sur le terrain ». Les penseurs du « nouveau monde » pointent un double échec : ne pas avoir « fait assez vivre l’horizontalité » et « l’incapacité à ramener le débat dans des bonnes proportions ». Le tout, donnant « l’impression faussée d’un déséquilibre » dans l’exécution du programme présidentiel. Et d’affirmer : « les mesures du 10 décembre étaient prévues mais étalées dans le temps, c’était une erreur ».
« Les gilets jaunes veulent simplement être entendus par les politiques ».
Respectivement diplômé de Sciences Po Paris et de Normal Sup’, Ismaël Emelien et David Amiel estiment que « la technocratie est indispensable » au bon fonctionnement de l’Etat. « Le problème est dans la manière d’exécuter les décisions » pointe David Amiel. « On ne se préoccupe pas assez du terrain » poursuit-il, en forme de mea-culpa. Reste à savoir si la crise des « gilets jaunes » va changer en profondeur le fonctionnement de l’Etat.