Fariba Adelkhah, chercheuse à Sciences Po Paris, a été arrêtée en Iran. Elle est soupçonnée d’espionnage par Téhéran.
Le 5 juin, vers 15 heures, le chercheur Jean-François Bayart reçoit un message de son amie Fariba Adelkhah. Ce sera son dernier. « Je lui ai écrit le 8 juin un email auquel elle m’a répondu de manière un peu étrange le 12 juin » raconte t-il. « Dans ce message, elle me disait qu’elle n’avait pas de connexion internet parce qu’elle était dans le désert ».
Anthropologue réputée et directrice de recherche à Sciences Po Paris, Fariba Adelkhah résidait à mi-temps à Téhéran ces dernières années. Elle y travaillait sur la circulation des clercs dans le monde chiite. Jean-François Bayart, inquiet de ne pas la voir revenir à Paris le 25 juin comme prévu, a alerté les autorités françaises. Le Ministères des affaires étrangères a confirmé que la chercheuse franco-iranienne a été arrêtée au début du mois de juin.
Des tensions diplomatiques franco-iraniennes
Le Quai d’Orsay a effectué des démarches auprès des autorités iraniennes pour obtenir des informations cette l’arrestation. Aucune réponse satisfaisante n’a été reçu à ce jour, d’après un communiqué du gouvernement français. « Ce qui s’est passé me préoccupe beaucoup », a déclaré Emmanuel Macron. « J’ai exprimé mon désaccord au président Hassan Rohani. J’attends des retours et des clarifications », a-t-il poursuivi, regrettant qu’aucune explication valable n’a été fournie.
La chercheuse franco-iranienne est soupçonnée d’espionnage par le gouvernement de Téhéran. « Elle fait partie des suspects qui ont été arrêtés récemment », a déclaré le porte-parole de l’Autorité judiciaire Gholamhossein Esmaïli. « Étant donné la nature de l’affaire, le moment n’est pas encore venu de donner des informations sur son cas », a-t-il ajouté. « Si Dieu le veut, avec la poursuite de l’enquête et une fois que d’autres aspects de l’affaire auront été tirés au clair, nous donnerons des informations de façon plus transparente ».
Un motif peu crédible
Les raisons de cette arrestation restent très floues. Fariba Adelkhah avait déjà subi des pressions de la part des autorités iraniennes selon Jean-François Bayart, allant des convocations jusqu’à la confiscation de son passeport. « Naturellement, toute éventuelle accusation d’espionnage est complètement ridicule », affirme le chercheur. « Il est possible que cette arrestation s’apparente à une mauvaise manœuvre assez cynique de la part de certains éléments du régime pour négocier avec Paris sans véritablement prendre la mesure de l’effet dévastateur que cela a sur leur réputation et leur image », avance t-il.
La France s’est placé comme arbitre entre l’Iran et les États-unis autour de la question du nucléaire. Donald Trump ayant rejeté un accord international sur la politique nucléaire iranienne, les tensions ne font que monter depuis mai 2018.
Fariba Adelkhah ne serait pas maltraitée mais cela ne rassure pas ses proches. Elle a probablement été incarcéré à Evin, où sont envoyés les opposants politiques. Autre motif d’inquiétude, l’Iran ne reconnaît pas la double nationalité de la chercheuse. Téhéran considère qu’elle est iranienne et estime ne pas avoir à rendre de comptes. La bataille diplomatique est lancée.