Le collectif anti-IVG « Les Survivants » avait déposé le nom de domaine simoneveil.com en septembre 2016. Mais ils ont attendu le décès de l’ancienne ministre de la santé pour l’activer.
Moins de deux heures après l’annonce de son enterrement au Panthéon, le site simoneveil.com a été mis en ligne, donc seulement 5 jours après son décès, même si le site était prêt depuis un an et demi.
Lorsque l’on arrive sur le site, il apparaît au premier abord comme un hommage à Simone Veil qui retrace sa vie et ses plus grands accomplissements. En déroulant jusqu’en bas cependant, on s’aperçoit vite que le site est en fait utilisé par un groupe anti-IVG nommé « Les Survivants » et que ceux-ci se servent du nom de domaine pour y diffuser leur propagande. On peut ensuite cliquer sur deux onglets : « Une femme trahie » et « La loi du mensonge ».
« Une femme trahie »
Dans le premier, ceux-ci reprennent une citation de Simone Veil : « Je le dis avec toute ma conviction : l’avortement doit rester l’exception, l’ultime recours pour les situations sans issue ». Ils s’insurgent alors qu’ « en moins de 50 ans, nous sommes passés d’un mal nécessaire à un progrès, et l’on se donne comme objectif moral de le promouvoir partout dans le monde. Est-ce vraiment ce que voulait Simone Veil ? »
Ce groupe utilise donc le nom et le combat de l’ancienne ministre de la santé à sa guise en tournant ses mots pour que cela corresponde à leur « lutte pour la vie ».
Dans le deuxième onglet « La loi du mensonge », le groupe propose de « (découvrir) la vérité sur Simone Veil, celle d’une femme trahie dans ses intentions puisque sa loi n’existe plus tant elle a été modifiée et parce que la légalisation de l’avortement n’a pas amélioré la santé des femmes bien au contraire ». Ils font alors de la pub pour leur web documentaire « Les survivants ».
Beaucoup s’insurgent de l’appropriation du nom et de l’histoire de Simon Veil et soulèvent aussi le timing étrange d’ouverture de ce site internet. Contacté par l’Express, le porte-parole des « Survivants » Emile Duport, explique que « si (ils) l’avait fait de son vivant, on (les) aurait accusé d’instrumentaliser Simone Veil. » Il assume le fait qu’il « profite de sa mort pour faire réfléchir sur l’IVG. »
Des faits ou des opinions ?
Si l’on va ensuite sur leur site internet, on trouve alors ce qu’ils appellent des « faits », mais beaucoup d’entre eux restent des opinions qui ne sont pas prouvées scientifiquement. Par exemple, ils écrivent : « il faut savoir que toutes les femmes sortent fragilisées d’un avortement. Outre qu’un avortement augmente la probabilité de stérilité de 10% chez une femme, il a des conséquences psychologiques extrêmement importantes. ».
Or, le site du gouvernement, et la grande majorité des études scientifiques, sont d’accord pour dire que « que ce soit par la méthode médicamenteuse ou chirurgicale, il n’y a pas de risque de stérilité. » (affirmation d’Opale Aunis, sage-femme).
De plus, les études ont également montré qu’il n’y avait pas de « conséquences psychologiques extrêmement importantes ». En effet, Philippe Faucher, un gynécologue, rappelle sur le site du gouvernement que « La majorité des études scientifiques sérieuses qui ont été publiées sur le sujet montrent qu’il n’y a pas de séquelle à long terme psychologique de l’avortement. Il n’y a pas de syndrome post-traumatique qui persisterait à distance, plusieurs années après un avortement ».
Le gynécologue explique aussi que « c’est comme pour la douleur physique, il y a des femmes qui le vivent – on va dire plutôt bien – et puis il y a des femmes qui le vivent plutôt mal : donc qui sont tristes, qui pleurent. » Mais dans ce cas là, ces femmes peuvent demander à des professionnels de les suivre et de les accompagner psychologiquement.
Emile Duport se réjouit d’avoir fait plus de 7000 visites dans le premier quart d’heure mais « ne doute pas une seconde que l’on va (lui) retirer » le droit d’utiliser cet URL.