On prolonge le plaisir d’Halloween en compagnie de Danny Elfman, génial compositeur de Tim Burton notamment… et son lot de surprises.
[Extrait Sonore « Edward Scissorhands »]
[« SérieFonia : Season V : Opening Credits » – Jerôme Marie]
C’est le premier mercredi du mois… et c’est SérieFonia. Un épisode un peu particulier aujourd’hui. Car il comporte son petit lot d’archives et de surprises 100% inédites ! Halloween n’est que quelques jours derrière nous et le compositeur que je m’apprête à mettre à l’honneur tout au long des plus de 30 minutes qui suivent reste, encore et toujours, intimement lié, dans l’inconscient collectif, à ces envoûtantes festivités d’outre-tombe. Essentiellement à travers sa spectaculaire collaboration avec le réalisateur Tim Burton depuis tant de décennies déjà : depuis Pee-Wee’s Big Adventures en 1985 jusqu’aux principaux thèmes de Mercredi, la nouvelle série dérivée de La Famille Addams, qui s’apprête à débarquer sur Netflix ce 23 novembre…
[« Wednesday – Trailer Music Theme »]
Vous l’aurez compris, c’est bel et bien de Danny Elfman dont il s’agit ! En même temps, si vous écoutez cette émission, c’est que vous avez vu la vignette et que vous avez cliqué sur le lien. Donc… Pas vraiment d’effet de surprise. En revanche, les plus fidèles d’entre vous me diront : « Mais… Il a déjà fait un SérieFonia sur Danny en 2020 ». Bravo. C’est vrai. Même que je l’avais appelé « La télé de Danny »… Précisément parce que je n’y traitais que de ses travaux télévisuels. D’ailleurs, afin d’éviter les redites tout en ne négligeant pas les nouveaux venus, je vais me faire le plaisir de rediffuser cette pastille en toute fin d’émission ! Histoire que celle-ci soit la plus complète possible… Parce que, on n’va pas s’mentir, Danny Elfman est un de mes chouchous… Et pas QUE pour ses musiques pour Tim Burton. Loin s’en faut…
[« Black Beauty – Main Titles » – Danny Elfman]
En 1994 sortait Prince Noir, de Caroline Thompson, une énième (mais très belle) adaptation du roman d’Anna Sewell, publié pour la première fois en novembre 1877. Et bien que le déjà surprenant Sommersby soit sorti un an plus tôt, c’est véritablement à travers le destin, tantôt tragique, tantôt porteur d’espoir, de ce cheval de l’Angleterre du 19ème siècle, que j’ai pour la première porté un regard différent sur l’œuvre de ce compositeur dont j’adorais naturellement l’énergie déjantée et toute circassienne ayant explosé via Pee-Wee’s Big Adventure d’abord, puis Beetlejuice en 1988. La délicatesse dont il fait preuve dans Prince Noir m’a pris aux tripes… Quasiment au point de ne pas le reconnaitre. Existerait-il donc un Docteur Danny et un Mister Elfman ?
[« Pee-Wee’s Big Adventure – Bike Race » – Danny Elfman]
Assurément. Et cela peut surement s’expliquer par le simple fait qu’il ne semblait pas du tout destiné à faire carrière dans la musique de film. Et c’est le moment où je dégaine ma première surprise : car les 10, 11 et 12 octobre 2015, j’ai eu l’immense chance d’avoir été choisi par les équipes d’Overlook Events afin de l’accompagner sur la scène du Grand Rex pour sa série de concerts français organisés dans le cadre de la tournée mondiale « Danny Elfman’s Music for the Films of Tim Burton ». 4 représentations inoubliables… où, en plus d’interpréter en personne les chansons de L’étrange Noël de Monsieur Jack, il se remémorait ses tout débuts dans la musique pendant que moi, je les traduisais…
[« Extrait du concert au Grand Rex de Paris, octobre 2015 » – Danny Elfman]
Le futur double musical de Tim Burton est donc encore très jeune quand il arrive en France. En fait, il vient d’abandonner le lycée pour partir à l’aventure avec son frère Richard qui, lui aussi fait partie de la fameuse troupe avant-gardiste de Jerôme Savary. Originaires de Los Angeles, tous deux développent très tôt une âme d’artiste au sens large qui, à son retour, conduira Richard à fonder le groupe The Mystic Knights of the Oingo Boingo pendant que Danny perfectionne l’art du violon et s’initie aux percussions à l’occasion d’un long voyage en Afrique. Toutefois, désireux de s’essayer à une carrière de cinéaste, Richard quitte assez vite le groupe vers 1976 et le laisse aux mains de son petit frère…
[« Little Girls » – Oingo Boingo]
Le groupe remporte alors un premier prix en participant à l’émission The Gong Show, sur NBC, et commence à sortir quelques singles. En 79, Steve Bartek, futur grand ami et orchestrateur d’Elfman, intègre The Mystic Knights of the Oingo Boingo en tant que guitariste principal. Progressivement, ceux qui finiront par s’appeler plus simplement les Oingo Boingo délaissent leur approche théâtrale au profit d’un style résolument plus rock, mais non moins déjanté, à tendance new wave, qui les conduira, en toute logique, à figurer dans le long-métrage psychédélique de Richard Elfman, Forbidden Zone, en 1982…
[« Forbidden Zone – Forbidden Zone » – Danny Elfman]
Nous sommes en 1982 et c’est la première composition officielle de Danny Elfman pour le cinéma. Par ailleurs, il en profite pour apparaître à l’écran dans le rôle de… Satan ! Ce qui lui va comme un gant. Parallèlement, un jeune ex-animateur des studios Disney, déjà remarqué pour ses court-métrages Vincent et Frankenweenie, travaille sur son premier long-métrage : Pee-Wee’s Big Adventure. Vous voyez parfaitement où je veux en venir : emballé par le style et l’énergie dont Danny Elfman fait preuve sur scène avec les Oingo Boingo, c’est nul autre que Tim Burton qui lui propose alors de signer sa première authentique musique de film. Le reste… fait ni plus ni moins partie de l’Histoire du cinéma avec un grand H. Beetlejuice, Batman 1 et 2, L’étrange Noël de Monsieur Jack, Mars Attacks!, Sleepy Hollow, LA planète des singes, Big Fish, Charlie et la chocolaterie, Les noces funèbres, Alice au pays des merveilles, Dark Shadows, Big Eyes, Dumbo… Ouch, je m’étais dit que je ne les citerai pas tous et puis finalement si. Comment ça, j’en ai oublié ?… Bon, Ok, c’est vrai mais c’est parce que je l’ai fait exprès… Juste histoire de bien mettre en avant la version longue et animée de Frankenweenie en 2012…
[« Frankenweenie – The Funeral » – Danny Elfman]
Il y a tout dans cette BO. Nostalgie, références, parodie, Aventure, danger, émotion… grosse émotion. Elle est, de loin, l’une de mes préférées. Avec l’autre oubli volontaire de cette sélection bien entendu. Quoi ? Vous ne pensiez tout de même pas que j’allais vous priver de toute l’étendue de la féérie et de la magie d’Edward aux mains d’argent ? D’ailleurs, surprise numéro 2… l’extrait qui suit… est en Live !
[« Edward Scissorhands – Suite (Live) » – Danny Elfman]
J’ai fait durer un peu… Normal. C’était lors de la tournée Danny Elfman’s Music from the films of Tim Burton aux Etats-Unis. Avec l’aussi talentueuse que charmante violoniste soliste Sandy Cameron qui, depuis, a d’ailleurs assuré les solos de la série Le Seigneur des Anneaux : Les Anneaux de Pouvoir pour Bear McCreary ! Ce qui m’amène à ma surprise numéro 3… Toujours en 2015, et toujours dans le cadre de cette même série de concerts, Sandy Cameron était là, elle aussi, au côté de Danny et sous la direction du chef d’orchestre John Mauceri, qui s’adressait d’ailleurs aux musiciens parisiens en français… Car, avant les concerts, et bien… Il y avait les répétitions. Un souvenir unique. Presque hors du temps. Que je partage avec vous aujourd’hui…
[« Archives Personnelles des répétitions »]
Chaque fois que je revois cette vidéo… Parce que oui, ici vous n’avez que l’audio mais en réalité, je filmais… j’ai le grand frisson. La collaboration Tim Burton / Danny Elfman est devenue à ce point iconique qu’il parait difficile de croire qu’au tout début, le compositeur débutant était aussi excité que soucieux d’être incapable de rivaliser avec son idole de toujours : Bernard Herrmann. Lui qui ne s’est jamais remis du choc que lui a procuré la découverte de sa partition pour Le jour où la Terre s’arrêta alors qu’il n’avait que 11 ans décide donc d’embarquer son ami Steve Bartek avec lui dans la grande aventure cinématographique et leurs vies prend soudain un virage à 180 degrés. Durant les 10 premières années, ils vont continuer d’alterner enter projets ciné et les tournées d’Oingo Boingo, jonglant sans relâche avec des plannings de plus en plus serrés. Le groupe est finalement dissout en 1995, tandis qu’Elfman travaille quasi simultanément sur Dolores Claiborne pour Taylor Hackford…
[« Dolores Claiborne – Vera’s World » – Danny Elfman]
Et Prête à tout pour Gus Van Sant.
[« To Die For – Suzie’s Theme » – Danny Elfman]
Grâce à ses premiers films mis en musique pour Tim Burton, il est directement propulsé au rang des compositeurs les plus appréciés. Ce qui lui permet de rencontrer, puis de collaborer avec d’autres grands noms tels que Richard Donner… C’était pour Fantômes en fête en 1988…
[« Scrooged – The Big Freeze » – Danny Elfman]
Mais aussi Clive Barker, pour l’inoubliable Cabal en 1990.
[« Nightbreed – The Initiation » – Danny Elfman]
Sans oublier Sam Raimi. Avec Darkman, d’abord, également en 90, puis Evil Dead III : L’armée des ténèbres deux ans plus tard. Pour un morceau seulement. Mais attention… Quel morceau !
[« Army of Darkness – March of the Dead » – Danny Elfman]
Le reste de la partition était signé de Joseph Lo Duca, déjà à l’œuvre sur Evil Dead 1 et 2… Mais s’il est jusque là resté quelque peu cantonné au même type d’univers héroïca-gothique, la suite des années 90 devient soudain beaucoup plus propice à la diversité… Jusqu’à l’émergence de partitions aux couleurs beaucoup plus « classiques », à l’image d’un Sommersby, le remake du Retour de Martin Guerre en 1993…
[« Sommersby – Welcoming » – Danny Elfman]
Ou encore d’un Mesures d’urgence, en 96, plus ancrés dans une certaine idée, plus convenue, de la tradition hollywoodienne. Sur les 19 long-métrages réalisés à ce jour par Tim Burton, seuls trois d’entre eux n’ont pas été musicalisés par Elfman : Ed Wood, composé par Howard Shore, Sweeney Todd, puisque adapté du Musical de Stephen Soundheim, et enfin Miss Peregrine et les enfants particuliers, confié au duo Mike Higham/Matthew Margeson. En bientôt 40 ans de carrière, il aura été de tous les genres. Et il aura offert leurs signatures musicales à bon nombre de super-héros. Batman bien sûr. Mais aussi Hulk, The Flash et Hellboy…
[« Hellboy II – A Choice » – Danny Elfman]
Il aura également fait le pont entre les univers DC et Marvel… S’occupant, tour à tour, des Avengers et de la Justice League. Mais de Doctor Strange aussi. Sans oublier… Spider-Man ! Et là, pour le coup, il y a des choses à dire. Fort du succès du premier opus réalisé par Sam Raimi en 2002, c’est en toute logique que les deux hommes se retrouvent sur Spider-Man 2. Des mois de travail, pour l’un comme pour l’autre, validés par les responsables de chez Sony. Tout semblait alors aller pour le mieux dans le meilleur des mondes quand, soudain, à peine quelques semaines avant la distribution des copies finales, le compositeur est de nouveau contacté pour reprendre certains passages de sa partition suite à des modifications de dernières minutes, effectuées sans l’aval du réalisateur. Contrarié que la propriété intellectuelle du film ne revienne finalement pas à Sam Raimi, Eflman décline ! La production se tourne alors vers… Steve Bartek, son ami et collaborateur de toujours pour prendre la relève. Une « solution » à laquelle Danny Elfman s’oppose catégoriquement avant d’informer, en personne, les exécutifs qu’il en est hors de question. Ces derniers engagent alors John Debney et Christopher Young pour arranger et compléter la partition existante… Les choses s’enveniment et frôle l’affrontement juridique. C’est finalement le distributeur du film, Columbia, qui apaise les tensions en s’engageant à faire éditer sur CD la musique originale non retouchée. Reste que Danny ne rempilera pas sur Spider-Man 3…
[« Spider-Man 2 – Main Title » – Danny Elfman]
Côté dramas sulfureux, on le retrouve aux génériques de la trilogie des 50 nuances (de Grey en 2015, Plus sombres en 2017 et Plus claires en 2018).
[« Fifty Shades Darker – Red Room » – Danny Elfman]
Beaucoup plus intéressant : Tulip Fever, réalisé par Justin Chadwick, sort la même année que 50 nuances plus sombre. Il s’agit d’une romance à caractère historique portée par la comédienne Alicia Vikander. Et pour l’occasion, Elfman se fait soudain plus aérien que d’accoutumé. Une « pesante légèreté » qui lui va à ravir et qui continue de démontrer, si besoin en était, toute l’étendue de la multiplicité d’un talent d’adaptabilité que beaucoup refusent encore, envers et contre tous, de voir en lui…
[« Tulip Fever – Sophia’s Theme » – Danny Elfman]
Et que dire encore de sa proposition pour La fille du train, de Tate Taylor en 2016 ? Où tous les styles se croisent et se décroisent en une savante cacophonie… entre musique contemporaine, électrorock et musique de chambre à tendance expérimentale… On peut difficilement faire plus éloigné de cette image d’artiste gothique et torturé qui lui colle le plus souvent à la peau et qu’il serait pourtant grand temps d’accepter de mettre de côté. La preuve…
[« The Girl on the Train – Something’s not Right » – Danny Elfman]
En marge du cinéma et de ses concerts, Il aime également à composer pour la scène. Une Serenada Schizophrana en 2005, déjà sous la baguette de John Mauceri… Un ballet, Rabbit & Rogue, en 2008 pour l’American Ballet Theatre et l’Orange County Performing Arts Center… ou encore des concertos pour percussions, violoncelles… et surtout violon, en 2017, avec le virvoletant Eleven Eleven pour… Sandy Cameron !
[« Eleven Eleven – III, Fantasma » – Danny Elfman]
Mais s’il y a bien un spectacle qui boucle la boucle, c’est celui qu’il musicalise pour le Cirque du Soleil en 2011. Avec Iris, c’est tout le monde du cirque, dans sa plus vaste expressivité, qui rend hommage au cinéma. Et la magie opère. Au-delà de l’entendement. Pour Danny Elfman, passé et présent se confondent alors en une parfaite harmonie de tons, autant que d’ambition. L’intégralité de ses styles y coexistent à merveille… Il donne tout… Et nous, auditeurs-spectateurs médusés, on reçoit tout. Je vous quitte là-dessus, ou presque, puisque je vous rappelle qu’à la fin du morceau, vous pourrez directement redécouvrir ses années télé à travers la rediffusion du numéro 25 de la saison 2 de SérieFonia sous sa forme pastille. Et… Vivement Mercredi ! Non, pas le jour. La série. D’ailleurs, ça tombe bien : le 23 novembre sera un mercredi… Comme quoi Mercredi peut débarquer un mercredi… En plus, ça rime avec Danny.
[« Iris – Movie Studio » – Danny Elfman]
[« SérieFonia, Saison 2 – Episode 25 »]
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