Un homme de 74 ans qui fait hurler les foules, fascine par ses discours, subjugue par ses idées… et dérange Hillary Clinton. La compétition est rude entre Bernie Sanders et son opposante démocrate. Qui est donc cet homme dont on n’entendait pas parler au début des primaires américaines et qui entend rénover le socialisme dans un pays considéré comme le plus libéral au monde?
Les élections américaines approchent et les citoyens devront bientôt élire leur représentant à la Maison Blanche. Si les médias attachent une grande importance au personnage de Donald Trump et à ses propos controversés, une autre figure non moins négligeable est apparue depuis quelques mois. Certains le qualifient de gauchiste, Bernie Sanders, lui, se revendique indépendant. Or, il a exceptionnellement rejoint les rangs des démocrates pour cette élection.
Issu d’une famille modeste d’ouvriers juifs, militant contre la guerre du Vietnam, ayant côtoyé le milieu hippie et membre de nombeux mouvements contestataires, c’est aujourd’hui un Sanders déterminé qui anime des meetings énormes. Déplorant l’erreur d’Obama d’avoir essayé de corriger un système qu’il juge mal construit, il considère qu’il est indispensable de changer ce système radicalement. Son ambition, en effet, est de procéder à une véritable « révolution politique », selon ses propres paroles.
Une supportrice de Bernie Sanders. Crédits Photo: Gage Skidmore
Alors si l’ouvrage de Piketty y a connu un succès inédit, le socialisme et le sujet de la lutte contre les inégalités pourraient-ils sérieusement toucher l’opinion publique américaine? Et si les Américains jugeaient leur modèle libéral comme étant obsolète ? C’est bien ce qu’espère le sénateur, qui entend mener la société américaine vers le progrès, et s’affranchir de la « domination des millionnaires » qui monopolisent la richesse du pays, au détriment de la classe de travailleurs. Taxes sur les transactions, généralisation de la Sécurité sociale, création d’emplois : son programme rappelle fortement les réformes proposées par la gauche européenne.
Or les positions qu’il prend sont très variées : passablement inspiré par Marx, il a effectué un voyage dans les kibboutzim en Israël et a longtemps cru en les bienfaits de la collectivisation. Il est à la fois pour une éducation supérieure gratuite et n’est pas opposé au port d’armes. Un personnage étonnant donc, pacifiste, non-conformiste et obstiné. Mais ce qui distingue Sanders des autres candidats, c’est son refus des lobbies, et un très faible financement de sa campagne par des fonds privés. Une volonté de montrer que ce n’est pas que l’argent qui compte.
Les sondages en faveur de Sanders explosent, et selon des données de WMUC/NBC, il aurait devancé son adversaire dans l’Iowa ou le New Hampshire. Hillary Clinton, elle, tente le tout pour le tout pour regagner ne serait-ce qu’un peu de popularité aux yeux des électeurs, et notamment de la minorité afro-américaine avec laquelle elle a pendant longtemps cultivé le dialogue. Et la stratégie de proximité des candidats américains avec le peuple est bien connue : Hillary Clinton s’est récemment illustrée en dansant sur la chanson « Watch me Nae Nae ».
Hello young people, I’m Hillary Clinton. Watch me whip/nae nae just like you do. #thuglife @Jenna_Marbles pic.twitter.com/sVc4GKlhtY
— Julie Borowski (@JulieBorowski) 10 Septembre 2015
Quel avenir pour le socialisme dans le pays où sont nés la démocratie libérale et le libre échange ? Où le rêve américain a été forgé pendant plusieurs siècles par le capitalisme ? Et où les tentatives de la mise en place d’un Etat Providence se sont soldées par un échec… De toutes manières, l’élection sera historique : une femme au pouvoir ? Ou un socialiste ? La question reste ouverte.