Les robots, envoyés pour trouver les combustibles fortement radioactifs à l’intérieur des réacteurs nucléaires de Fukushima, « meurent ». Dans le même temps, un mur de glace souterrain censé stopper la contamination des eaux, doit encore être fini autour de la centrale paralysée. Les autorités japonaises ne savent quant à elles que faire de l’eau fortement radioactive stockée dans de nombreux réservoirs autour du site.
Il y a cinq ans, l’un des pires tremblements de terre de l’histoire a enclenché la formation d’une vague de plus de dix mètres, qui est entrée en collision avec la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. Près de 19 000 personnes ont été tuées ou déclarées disparues. 160 000 ont perdu leurs maisons et leurs moyens de subsistance.
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— Agence France-Presse (@afpfr) 11 mars 2016
Impossible d’entrer dans la centrale
Aujourd’hui, cinq ans après, les radiations de la centrale de Fukushima sont toujours si importantes qu’il s’avère impossible d’entrer dans ses entrailles pour trouver et enlever les gouttes extrêmement dangereuses des coeurs des réactions qui ont fondu.
L’opérateur de la centrale, Tokyo Electric Power Company (Tepco) a fait certains progrès, comme l’extraction de centaines de tiges de combustible usées d’un bâtiment endommagé. Cependant, la technologie nécessaire pour établir leurs localisations dans les trois autres réacteurs de la centrale n’a pas encore été développée.
« Un robot à fonction unique »
« Il est extrêmement difficile d’avoir accès à l’intérieur de la centrale nucléaire » explique Naohiro Masuda, responsable de la mise hors service à Tepco. « Le plus gros obstacle reste la radiation ». Les barres de combustibles ont fondu à travers leur dispositif de rétention dans les réacteurs, et personne ne sait exactement où elles se trouvent désormais.
« Le plus gros obstacle reste la radiation » — Naohiro Masuda
Des parties de la centrale sont si dangereuses pour les humains, que Tepco a conçu des robots capables de nager sous l’eau et de surmonter les obstacles dans les tunnels endommagés, afin de trouver ces combustibles. Néanmoins, dès l’instant où ils s’approchent des réacteurs, les radiations détruisent leur câblage et les rendent inutiles, causant des retards importants. Chaque robot doit être fait sur mesure pour chaque bâtiment. « Cela prend deux ans pour développer un robot à fonction unique » ajoute Naohiro Masuda.
De l’eau irradiée
Tepco, qui a été fortement critiquée pour sa gestion du désastre, a affirmé que les conditions de la centrale électrique de Fukushima — pire désastre nucléaire depuis Tchernobyl en Ukraine, il y a 30 ans — s’est améliorée. Plus de 8 000 ouvriers se trouvent à la centrale à tout moment, selon les officiels. À travers le site, ils enlèvent les débris, construisent des réservoirs de stockage, installent la tuyauterie et préparent le démantèlement des parties de la centrale.
Une grande partie du travail consiste à déverser de l’eau stable dans les réacteurs détruits et fortement radioactifs, afin de les refroidir. Ensuite, l’eau irradiée est transférée hors de la centrale et stockée dans les réservoirs qui prolifèrent autour du site. « La question de que faire avec presque un million de tonnes d’eau radioactive est le plus gros défis » déclare Akiro Ono, directeur du site. Il se dit « profondément inquiété » que les réservoirs de stockage répandent de l’eau radioactive en mer — comme il a été fait auparavant — incitant à de fortes critiques pour le gouvernement.
« Le processus de mise hors service pourrait prendre entre 30 à 40 ans. »
Tepco aurait achevé autour de 10 % du travail de nettoyage du site — le processus de mise hors service pourrait prendre entre 30 à 40 ans. Cependant, tant que l’entreprise ne localise par les combustibles, il sera difficile de progresser ou d’évaluer les coûts finaux, selon les experts. L’utilisation des rayons X a néanmoins apporté quelques informations sur l’emplacement des barres de combustibles fondues. Le dernier robot inséré dans l’un des réacteurs a également envoyé des photos avant de tomber en panne.
Plus grand mur de glace du monde
Tepco est également en train de construire le plus grand mur de glace du monde, afin d’empêcher l’eau souterraine de couler dans les sous-sols des réacteurs endommagés et de devenir contaminée. D’abord suggéré en 2013, et fortement soutenu par le gouvernement, le mur a été finalisé en février, avec des mois de retards et de nombreuses questions autour de son efficacité. Plus tard cette année, Tepco planifie de pomper l’eau à travers le mur — ce qui revient un peu à pomper de l’eau derrière un réfrigérateur — pour commencer le processus de congélation.
« Le stoppage de l’intrusion de l’eau souterraine dans la centrale est critique » selon Artie Gunderson, ancien ingénieur nucléaire. « Les réacteurs continuent à diffuser leurs radiations dans l’eau souterraine, et de ce fait dans l’océan Pacifique ». « Quand Tepco arrêtera enfin de stopper l’eau souterraine, ce sera la fin du commencement » affirme-t-il.
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© Photo à la Une : EPA.