Les « Gilets Jaunes » ce mouvement contestataire qui a démarré le 17 novembre dernier et qui rassemble encore beaucoup de monde à chaque manifestation semble décontenancer le gouvernement. En effet, si le point de départ de la manifestation est la hausse des taxes sur le carburant, il semble être acquis pour beaucoup que la contestation est allée bien au-delà de ce seul point de désaccord. Ainsi, lorsque le gouvernement annonce fièrement avoir décidé de renoncer à la taxe du carburant pour apaiser la population, il est légitime de se demander si cette réponse de l’Élysée n’est pas la preuve d’une déconnexion entre les élites et le peuple.
D’un autre côté, l’incompréhension règne : Difficulté de qualifier un tel mouvement qui semble perdurer et difficultés pour le chef de l’État d’y répondre convenablement. Difficultés pour les syndicats de prendre position et difficultés pour les partis politiques de s’approprier totalement le mouvement tant celui-ci semble hétéroclite, rassemblant des personnes de tous bords politiques. Le fait pour l’extrême-gauche et l’extrême-droite de vouloir récupérer le mouvement donne une idée quant à la difficulté de qualifier un tel rassemblement.
Emmanuel Macron serait-il déconcerté face à ce mouvement sans leader ni revendications claires ? En effet, il semble vouloir donner une réponse très terre à terre : Revendications contre la taxe du carburant vaut suppression de celle-ci. Quid des autres revendications des Gilets Jaunes, moins perceptibles pour l’opinion publique, moins claires mais tout autant assumées ?
Dès demain à mon retour j’ai convoqué une réunion interministérielle avec les services compétents. Je respecterai toujours la contestation, j’écouterai toujours les oppositions mais je n’accepterai jamais la violence.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 1 décembre 2018
L’augmentation du SMIC, une réponse suffisante ?
On sent ainsi que les syndicats et partis politiques exercent une sorte de pression sur les Gilets Jaunes afin qu’ils expriment des revendications claires : Ce sont celles-ci qui leur permettront de se rattacher à un parti plutôt qu’un autre. Or l’objectif des Gilets Jaunes n’est pas de se donner une contenance mais d’exprimer un ras-le-bol général quant à la politique intérieure menée par Emmanuel Macron. Au vu des manifestations de plus en plus violentes, le gouvernement semble avoir les mains liées : Le chef de l’Etat a exprimé ses craintes quant à la manifestation du samedi 8 décembre en admettant que « Ce qui est en jeu, c’est la sécurité des Français et de nos institutions. »
Le gouvernement a d’ores et déjà voulu répondre à une autre revendication concernant l’augmentation du SMIC. Il a en effet annoncé que le SMIC passerait à 1210 euros net dès janvier sauf que, comme l’explique le quotidien 20minutes, l’augmentation du smic en janvier est automatique car elle se règle sur l’inflation. De plus, Emmanuel Macron a précisé en conseil des ministres que « Nous ne détricoterons rien de ce qui a été fait depuis dix-huit mois » concernant la suppression de l’ISF qui est pourtant une des mesures phares des gilets jaunes.
Augmenter le SMIC et annuler la taxe sur le carburant suffiront-t-ils à apaiser la grogne sociale ? Ou, au contraire, les manifestants vont-ils se sentir lésés de voir seulement quelques revendications obtenir des réponses sur les quarante-deux publiées en ligne ? Le mouvement va-t-il finir par s’essouffler entre ceux qui acceptent les réponses du gouvernement et ceux qui ne les acceptent pas ?
Les Gilets Jaunes semblent avoir utilisé le prétexte de la hausse de la taxe pour exprimer un malaise social grandissant, fruit des nombreuses réformes opérées par Emmanuel Macron depuis le début de son quinquennat. Si cette hypothèse venait à se confirmer, alors toutes les personnes visées par les réformes (professeurs, étudiants, personnel soignant, magistrats, etc.) pourraient se joindre au mouvement d’ici les prochaines semaines. S’il est encore prématuré pour faire un rapprochement avec la journée du 24 mai 1968 qui avait rassemblé dix millions de grévistes, on peut néanmoins se demander si ce mouvement naissant ne suit pas le même chemin.