A l’occasion du festival amateur le 48H de scen’art, deux réalisatrices, Méryll Borg et Julia Mouazan, ont accepté de répondre ensemble à une interview. Leur court-métrage sera présenté ce mardi 9 avril au cinéma Arvor à 18H.
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Bonjour à vous deux. La compétition s’est terminée depuis hier à 19H. Un petit mot sur vous deux, sur votre parcours, votre expérience en tournage ?
Méryll : Je m’appelle Méryll, j’ai 27 ans. J’ai fait des études de droit mais j’ai arrêté après ma deuxième année car ça ne me plaisait pas et je me suis tournée vers des études de cinéma. J’ai fait un dossier pour entrer en licence et j’ai été prise. C’est l’aspect technique du cinéma qui m’a toujours intrigué. Quand j’étais petite, je pensais que les gens jouaient en direct dans le film. [rires]
J’ai ensuite acheté ma caméra grâce à mon travail en restauration rapide et je me suis formée sur le tas avec des tutos youtube et en commençant sur des court métrages, des projets étudiants, etc.
Julia : Je m’appelle Julia, j’ai 28 ans. J’ai fait un master d’histoire de l’art puis je suis partie voyager pendant 2 ans en Irlande, en Nouvelle-Zélande, en Amérique du Sud etc. A Dublin, je fréquentais l’Institut du film irlandais qui présentait beaucoup de projections de classiques, d’art et d’essais. Les voyages m’ont permis de réfléchir et m’ont permis de me tourner vers le cinéma. Juste avant de rentrer en France, je me suis inscrite en licence de cinéma. Plus que la théorie, ce sont surtout les ateliers techniques qui m’intéressaient. J’ai préparé mon premier court métrage semi-professionnel à la fac et j’ai travaillé avec Meryll en tant qu’assistante caméra. Ce week-end, c’était mon premier court métrage en tant que réalisatrice.
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Comment avez-vous entendue parler de ce projet ?
Meryll : Je viens de l’université Rennes 2 donc je connaissais déjà l’association Scen’art. J’ai vu l’événement et j’ai eu envie d’y participer.
Julia : Je connaissais l’événement mais je n’avais pas réalisé que c’était en ce moment. Meryll m’a proposé d’y participé et j’ai accepté en tant que réalisatrice et actrice.
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Qu’est-ce qui vous a donné envie d’y participer ?
Meryll : C’est la première fois que je participe à ce concours. J’avais envie de me remettre en jambe, de faire quelque chose de créatif car mon travail en restauration rapide ne me le permet pas vraiment.
Julia : J’avais aidé il y a deux ans en tant que figurante, mais c’est la première fois que j’y participe en tant que réalisatrice et actrice. Je trouve que c’est un bon exercice qui permet de se mettre dedans, de se dire qu’on a créé quelque chose de toute pièce.
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Comment avez-vous réagi à l’annonce du thème et des contraintes ?
Pour rappel, le thème était l’utopie et les contraintes étaient les suivantes : Tourner au moins une scène sur l’un des campus de l’université Rennes 2, réaliser un mouvement de caméra à 360°, faire apparaître une peluche ainsi que la phrase « Ils nous mentent sans arrêt ».
Méryll : On avait déjà pensé à plusieurs idées de scénario en amont et je me suis dit qu’on allait s’adapter. Le fait de faire un 360 m’a un peu surprise car c’est difficile à intégrer. Concernant les autres contraintes, ca n’a pas posé trop de soucis. Avant même de connaître les contraintes, j’avais envie d’intégrer des poupées. Je voyais bien Julia sur un lit rempli de poupées flippantes. Une des contraintes était d’intégrer une peluche donc on a pu tourner une scène qui s’en rapprochait.
Julia : Les contraintes sont intéressantes car on se demande comment on va les contourner, c’est un bon exercice. Je ne voulais pas faire une interprétation trop littérale de ces contraintes.
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Présentez moi votre équipe. Avez-vous déjà travaillé avec elles ? Ont-elles de l’expérience dans le domaine du cinéma ? Sur quels critères les avez-vous choisi ?
Meryll : On était 7 sur le tournage avec une équipe quasiment féminine. Le monde du cinéma est encore très masculin, j’ai voulu démontrer qu’une équipe de femmes est tout aussi compétente.
Avec Neşe (assistante caméra et lumière) on avait déjà travaillé ensemble sur un court-métrage, on sait qu’elle travaille bien et qu’elle a de l’expérience sur des tournages et des postes différents.
Cloé (perchiste et photographe) est une collègue, elle m’a semblé très enjouée quand je lui ai parlé du projet Récemment, elle s’est achetée un appareil photo réflex donc je lui ai proposé.
Julie (scripte) je lui ai demandé car on voulait faire une histoire un peu angoissante et je savais qu’elle allait pouvoir nous aider car c’est quelqu’un de logique, de rationnel, qui pense à tout donc je la voyais bien en tant que scripte.
Mon frère, Fabien, nous a aidé pour la musique du film.
Julia : Avec Etienne on fait partie d’une troupe de théâtre d’improvisation, il était d’accord pour être un des deux acteurs. Il est aussi vidéaste de par son métier, il a fait pas mal de tournages, il a vraiment un sens de l’esthétique, de la logique, il sait comment roule un film donc c’est bien d’avoir quelqu’un comme lui pour trouver des solutions alternatives quand on a une galère sur le tournage.
Méryll : Certains n’avaient jamais participé à un tournage. C’est le cas de Julie et Cloé. On a voulu faire une équipe un peu mixte entre ceux qui l’ont déjà fait et ceux pour qui c’est une première. C’était pas forcément un critère mais j’y tenais quand même. Quand j’étais en droit, j’avais envie de créer une association pour apprendre, faire découvrir le monde du cinéma. Que ce soit quand je donne des cours de caméra ou quand je tourne, j’aime bien que les gens repartent en ayant appris quelque chose.
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Quelles sont les étapes dans l’ordre d’un tournage et notamment de votre court-métrage ?
Méryll : Il y a quatre étapes dans le monde du cinéma : la pré-production, le tournage, la post-production et la distribution qui permet, en gros, la promotion du film afin qu’il sorte en salle et en DVD.
Dans le cadre du 48H on a eu trois étapes à respecter : la pré-production, le tournage et la post-production.
Dans la préparation, il y a le scénario avec le découpage technique : il s’agit d’un document qui décrit l’ensemble des plans qui vont être tournés, qui décrit le film techniquement, qui énumère les séquences, ce qui se passe dans les plans, quelle lumière on veut, dans quel lieu, quel son, le matériel dont on a besoin, etc.
A partir du scénario, il faut faire un dépouillement : on prend le scénario et on fait la liste de tous les objets dont on va avoir besoin (ici téléphones portable, peluches, bières, etc).
Dans la préparation de film, il y a le plan de travail c’est-à-dire organiser l’emploi du temps en fonction des contraintes de temps de chacun et des scènes que l’on va tourner en fonction de la lumière. Il y aussi le PAT (prêt-à-tourner) à penser : Si on décide qu’on tourne à 8H alors tout doit être prêt.
Julia : Oui, il faut s’adapter en fonction des vies de chacun. Il ne faut pas tourner dans l’ordre chronologique, il faut tourner tous les plans d’un même lieu en même temps sinon on perdrait trop de temps.
Ensuite, il faut se pencher sur la mise en place et les acteurs. Pour la préparation des acteurs, si le scénario est écrit alors il faut penser à prévoir un moment de répétition, prévoir les costumes et le maquillage. L’équipe technique fait les repérages sons et lumières avec les acteurs dans le champs pour travailler la lumière et le son afin que tout soit parfait au moment où on commence à tourner.
Meryll : Et après, c’est le tournage. On enchaîne les plans toute la journée, on s’adapte au lieu.
Julia : Une fois que les scènes sont bonnes, il faut encore démonter le plateau, nettoyer le lieu si on y revient pas et ranger le matériel.
Une fois que le tournage est terminé, on enchaîne la post-production, avec beaucoup de café dans le cadre du 48H [rires].
Meryll : On avait que 48h, c’est très court donc on a commencé directement après le tournage. La première étape est de derusher.
Julia : Oui, il faut commencer par effectuer le transfert des images de la caméra sur un ordinateur ou un disque dur. Ca nous a pris dix minutes. En fonction du format, ca peut prendre plus ou moins de temps.
Il faut ensuite trier les rush, on se sert des feuilles de script pour savoir quelles prises sont bonnes et si le son est bon. Ca permet d’élaguer plus rapidement, de savoir quelle prise de vue va avec quelle prise de son.
Meryll : Ensuite on fait un ours : il faut assembler tous les plans, séquence par séquence, on choisi les plans dont on va avoir besoin les uns après les autres. C’est très grossier au départ, il n’y a pas encore eu de montage.
On fait ensuite l’étalonnage de l’image et on passe au mixage. L’étalonnage, c’est par ordinateur : on fait des retouches de couleur, de lumière pour embellir l’image. On peut assombrir l’image, jouer avec les contrastes.
Julia : Ca dépend aussi de l’esthétique qu’on veut donner au film. On commence sur le tournage à ajuster la lumière mais au montage on peut régler ce qui n’a pas fonctionné ou pour donner une certaine ambiance au film. Mais pour le 48h on a pas eu le temps, l’image est brute, sans retouche.
Méryll : Ensuite vient le montage son : assembler les sons aux images. Il faut rajouter des bruitages et des sons d’ambiance. On rajoute des musiques, des pas, des portes qui claquent. Le mixage est différent du montage : Il arrive que le son soit trop fort dans une séquence et trop faible après donc il faut égaliser le son en fonction des plans.
Julia : On vérifie une dernière fois que tout va bien et on exporte la vidéo.
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Avez-vous rencontré des difficultés dans la réalisation ?
Julia : A part la caméra, on avait pas de moyens. La perche était constituée d’un enregistreur collé avec du gros scotch à un manche à balai !
Méryll : Certaines scènes devaient être tournées en extérieur sauf qu’il s’est mis à pleuvoir. La caméra qu’on avait est une caméra de plateau donc elle ne pouvait pas du tout prendre la pluie. On a dû s’adapter et trouver un autre lieu.
On avait pas de projecteur donc il a fallu adapter la lumière de l’appartement. La caméra ne voit pas comme à l’œil nu, il faut beaucoup de lumières pour nuancer ou éclairer une scène. La lumière d’appartement est une lumière jaune, fade, sans relief.
Julia : On avait pas de scénario écrit, on a improvisé avec Etienne. La liberté d’improvisation, c’est plutôt chouette en tant qu’acteur. En revanche, quand on improvise plusieurs scènes, on ne redit pas exactement la même chose donc au montage ca peut être compliqué. En tant qu’acteur, tu peux vraiment t’éclater mais c’est quand même plus simple d’improviser à partir d’un texte écrit.
Méryll : D’autant plus que Julia a participé à l’écriture du scénario donc c’était plus simple pour elle. Sinon, je dirais qu’on a été peut-être un peu trop ambitieuse sur la durée de tournage car on voulait quelque chose d’angoissant mais faire monter l’angoisse demande du temps, ca s’étend sur la longueur. Ca se prêtait peut-être pas forcément à ce qu’on voulait faire.
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Pouvez-vous décrire en quelques mots votre projet ?
Julia : Notre film se nomme « Sur un malentendu… ». C’est l’histoire d’Arthur, un grand romantique dans l’âme qui se rend à son premier rendez-vous avec Olivia, une jeune femme qu’il a rencontré sur un site de rencontres en ligne. C’est un grand idéaliste de l’amour, un utopiste. Le rendez-vous tourne mal, Olivia n’est pas la fille qu’il pensait être. On ne peut pas en dire plus, il faudra assister à la projection mardi soir !