Lauréat en mai dernier de la Palme d’or du Festival de Cannes, le film La vie d’Adèle n’en finit plus depuis de générer des polémiques. Son réalisateur, Abdellatif Kechiche, et l’une de ses actrices principales, Léa Seydoux, ont engagé une violente « guerre » de mots, et la promotion du long-métrage, attendu le 9 octobre en salles, ressemble de plus en plus à une opération suicide.
Après la Palme d’or, celle de l’horreur. Depuis la consécration, fin mai, au Festival de Cannes, le film La vie d’Adèle ne fait plus parler de lui qu’en négatif, et la guerre est déclarée entre Abdellatif Kechiche, son réalisateur, et ses actrices Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos. La mauvaise histoire commence lors d’un entretien accordé par les deux jeunes femmes à The Daily Beast. Celles-ci y dénoncent des conditions de travail difficiles pendant le tournage. « On a passé dix journées entières à tourner la scène de sexe principale avec Léa alors qu’on ne s’était quasiment jamais croisées. C’était très embarrassant. La plupart des gens n’oseraient même pas demander ce qu’il a demandé. Ils seraient plus respectueux. », avoue d’abord Adèle Exarchopoulos. Puis sa collègue revient sur une scène où une dispute vire à la bagarre : « On a tourné cette séquence pendant une heure, Adèle saignait, son nez coulait, et Abdel me demandait de continuer à la frapper. Heureusement, qu’on a eu la Palme d’Or parce que c’était horrible. ». Des propos qui prennent vite de l’ampleur, et les actrices démentent leurs dires dans Le Parisien : « Il y a beaucoup de propos qui relevaient du second degré. C’était de l’humour. C’est sans doute le film où nous avons le plus appris, le plus évolué. » assure l’interprète d’Adèle. Mais quelques jours plus tard, Abdellatif Kechiche réagit, et critique vivement Léa Seydoux : « Si Léa n’était pas née dans le coton, elle n’aurait jamais dit cela. Léa n’était pas capable d’entrer dans le rôle. J’ai rallongé le tournage pour elle. Elle fait partie d’un système qui ne veut pas de moi car je dérange. Les ouvriers souffrent, pas les actrices adulées qui vont sur les tapis rouges. ». La concernée répond rapidement : « Je n’ai pas critiqué Abdellatif Kechiche, j’ai parlé de son approche. On ne travaillera plus ensemble. ». Et la polémique ne s’arrête pas là.
« Ce film ne devrait pas sortir, il a été trop sali. »
De retour du Canada où il a présenté son long-métrage au Festival de Toronto, A. Kechiche s’est livré à l’hebdomadaire Télérama. Le réalisateur tunisien confie : « Selon moi, ce film ne devrait pas sortir, il a été trop sali. La Palme d’or n’a été qu’un bref instant de bonheur ; ensuite, je me suis senti humilié, déshonoré, j’ai senti un rejet de ma personne, que je vis comme une malédiction… ». Puis le cinéaste s’en prend une nouvelle fois à Léa Seydoux : « Léa Seydoux vole la vedette au film, ainsi qu’à Adèle Exarchopoulos. Ces déclarations, c’est pire que de cracher dans la soupe, c’est un manque de respect pour un métier que je considère comme sacré. Quand j’ai lu ce que qu’elle disait, je n’ai pas compris. Si elle a vraiment vécu ce qu’elle raconte, pourquoi être venue à Cannes pleurer, remercier, monter les marches, passer des journées à essayer robes et bijoux? Quel métier fait-elle, actrice ou artiste de gala? ». Il avoue même avoir songé à remplacer l’interprète d’Emma : « Quand Léa Seydoux s’est présentée à moi, elle disait avoir du mal à jouer de façon naturelle. Elle voulait trouver quelque chose qu’elle voyait dans mon cinéma. Elle a insisté pour venir. Et ensuite pour rester, parce que j’avais des doutes sur notre réussite. Je ne savais pas si je pouvais être le metteur en scène qui l’aiderait à se débloquer. Et je n’étais pas sûr qu’elle en ait vraiment envie. Je lui ai proposé plusieurs fois d’en rester là. Dont une après vingt jours de tournage. Mais elle tenait à continuer. ». Des propos démentis par la petite-fille de Jérôme Seydoux, patron de Pathé, qui assure dans les colonnes de Psychologies Magazine qu’il s’agit d’un « rôle sulfureux » qu’elle a « vraiment voulu ». Le film, très attendu, devrait tout de même envahir les salles le 9 octobre, comme prévu, mais les récents événements polémiques l’ont sans aucun doute fragilisé, et son réalisateur se met à la place du spectateur : « Moi, je n’irais pas voir le film du cinéaste sadique et tyrannique dont on fait le portrait aujourd’hui! C’est comme si on se rendait à un mariage en sachant qu’en vérité les mariés se détestent. ».
Bande annonce La vie d’Adèle