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Le syndrome de l’imposteur, fruit des dérives de la société ?

Avez-vous déjà ressenti au moins une fois au cours de vos études ou de votre carrière le sentiment de ne pas être à votre place ?  Ce sentiment que vous ne méritez pas votre poste ou que vous n’avez pas les qualifications nécessaires ? Si oui alors comme 70% de la population vous avez sûrement souffert du syndrome de l’imposteur.

Les psychologues cliniques Pauline Rose CLANCE et Suzanne A.IMES mettent en lumière ce syndrome en 1987 même si par la suite elles rectifient vouloir plutôt parler d’une expérience à laquelle tout le monde pourrait être confronter. Il ne s’agit pas d’une maladie mais d’un mécanisme psychologique.

Mais se pose alors la question de l’origine de ce syndrome et du rôle que joue la société. Une société poussant toujours à la perfection et à la compétition n’encourage-t-elle pas le développement chez un public toujours plus nombreux de syndromes de ce genre ?

Alors qu’est-ce qu’exactement le syndrome de l’imposteur ?

Symptômes et manifestation du syndrome

D’abord le terme d’imposteur vient de ce sentiment d’imposture, d’usurpation. Le sentiment de tromper les autres et de risquer à tout moment de se faire « démasquer ».

Le syndrome de l’imposteur est avant tout un doute prononcé qui empêche les personnes de reconnaître à leur juste valeur leurs compétences et réalisations personnelles. Cela se matérialise souvent par l’impression de ne pas mériter sa place au travail. En conséquence, leur succès peut être attribué à des facteurs extérieurs comme les relations ou même la chance. Et en plus de ne pas s’attribuer leur propre succès, elles n’acceptent que peu ou avec difficulté les compliments, elles ont peur de ne pas être à la hauteur et du coup de demander de l’aide à quiconque. Tout cela est ainsi à relier à une peur intense du regard des autres.

Les conséquences de ce syndrome sont aussi très personnelle puisque elles donnent lieu à la volonté d’éviter toute erreur possible. Cela s’accompagne d’une forte exigence envers soi même autant physiquement que sur les réalisations et d’une comparaison constante avec les autres.

De cette expérience de l’imposteur découle deux stratégies : l’overdoing qui consiste à investir une énergie immense dans tout ce que l’on fait pour éviter toutes les erreurs et imperfections possibles. À l’inverse, la seconde stratégie est celle d’undergoing qui consiste à en faire moins que nécessaire pour pouvoir expliquer son échec par d’autres facteurs que nos capacités propres.

Alors comment apprendre à se revaloriser ?

Nicolas SARASSIN dans Vaincre le symptôme de l’imposteur nous livre quelques pistes pour surmonter cette expérience de l’imposteur et arriver à apprécier nos qualités et nos capacités.

Il insiste sur le rôle fondamental de l’estime de soi et de la confiance . Il définit  l’estime comme l’évaluation de ce que l’on fait tandis que la confiance serait plutôt une évaluation de notre capacité à faire quelque chose. Une perte d’un voire des deux facteurs augmente la crainte du regard de l’autre sur nous et le doute envers ses propres capacités pour réaliser un projet.

Alors, pour lutter contre ce mécanisme de dépréciation, le plus efficace reste de lutter contre les distorsions cognitives c’est-à-dire l’ensemble des pensées liées à ce manque d’estime de soi. On regarde nos pensées et on n’hésite pas à les critiquer par de nouvelles questions : quel est le pire qui puisse arriver ?  Ou encore, les autres m’ont-ils déjà critiquer pour des erreurs passées ?

Tout de même se pose la question de l’origine de ce syndrome. Certaines personnes sont-elles plus sujettes que d’autres a cette expérience ?  Des causes externes peuvent-elles expliquer ce sentiment d’imposture ?

Des personnes plus touchées que d’autres ?

Si tout le monde peut un jour ou l’autre expérimenter le syndrome de l’imposteur, il n’en reste pas moins que certaines personnes y sont plus sujettes que d’autres.

D’abord les femmes. Et cela s’explique sans doute par le sexisme latent qui subsiste encore dans nos sociétés. Les compétences et les qualités des femmes tendent toujours à être minimisées par rapport à celles des hommes. En conséquence, on retrouve cette exigence bien trop importante envers soi-meme, un doute constant et une peur du regard des autres.

Mais aussi les surdoués, les autodidactes et les personnes ayant bénéficié de discrimination positive. Si ces personnes ont plus de chance d’expérimenter ce syndrome c’est à cause de leur perception de leur légitimité. En effet, les surdoués ou zèbres selon le terme scientifique, en apprenant ou comprenant un peu plus facilement que leur collègue et camarades peuvent se sentir moins légitime pour obtenir telle ou telle position. De la même manière, les autodidactes ont appris par eux même toutes les compétences nécessaires à l’occupation d’un poste ou l’achèvement d’un projet mais ils remettront systématiquement en cause la légitimité de ces savoirs en raison d’une formation accélérée ou à distance. Et finalement, ceux ayant fait l’objet de mesures de discriminations positives peuvent aussi se sentir moins légitime car privilégiés.

Or on remarque que si toutes ces personnes ont plus de risques de se déprécier à un moment donné et de se sentir dans une position d’imposture, c’est aussi principalement à cause d’un facteur extérieur : les caractéristiques de notre société.

Ceci nous amène donc à nous demander le rôle que joue la société dans le déclenchement de ce syndrome. Les  caractéristiques de note société sont-elles à l’origine  d’une dépréciation  des compétences et des qualités propre d’un individu ? Dans ce cas, quelles sont ces caractéristiques néfastes à l’individu ?

Le rôle des valeurs sociétales

La société occidentale contemporaine promeut un mode de vie et valorise certaines manières de faire et de penser. Et en se dirigeant vers les valeurs mises en avant, on trouve le fait de toujours se dépasser dans un objectif de succès. De manière plus ou moins volontaires nous sommes constamment en compétition les uns contre les autres. Se crée ainsi un individualisme de plus en plus poussé.

Évidement ces valeurs ne sont pas forcément négatives. L’individualisme permet à l’individu de se concentrer sur soi-même, ses besoins voire envies pour arriver à se réaliser. L’indivudalisme devient alors un facteur d’épanouissement personnel.  Dans une certaine mesure l’individualisme n’est donc pas nuisible.

Mais trop d’individualisme rime avec compétition à tout prix. Se développe alors une comparaison constante aux autres, une remise en question trop sévère envers soi-même. Cette forme d’individualisme négatif prend la forme d’un absolu selon la formule de N. SARASSIN c’est-a-dire l’envie d’être toujours « le plus  … ».

A cela il faut rajouter un autre facteur : la société est de plus en plus complexe. Chaque jour de nouvelles technologies ou façon de faire sont créées et nécessitent de nouvelles compétences pour s’y accommoder. Il n’est bien-sûr pas possible d’avoir un diplôme pour chaque secteur auquel on va être confronté au cours de notre vie et ce notamment, parce que l’école a toujours un temps de retard sur la société. Il faut du temps pour qu’une nouvelle matière, un nouveau champ d’étude se développe dans les instituts de formation.

Or, nous avons souvent tendance à penser que seul le diplôme valorise et légitime nos compétences. L’absence de ce fameux diplôme va alors nous freiner dans notre envie de développer un quelconque projet, ou d’avancer dans notre vie professionnelle ou personnelle. Revient alors le sentiment d’imposture et la fameuse expérience de l’imposteur.

Conséquences de l’exposition médiatique

Nous sommes tous un imposteur dans un domaine ou un autre. L’enjeu est d’accepter ce fait et d’arriver à surmonter notre sentiment d’illégitimité. Et cela passe peut être par une médiatisation du problème. Récemment les articles sur le sujet ont fleuri un peu partout dans divers journaux. La vidéo réaliser par le journal MademoiZelle résume d’ailleurs bien les problématiques de l’expérience de l’imposteur.

De façon humoristique, Mademoizelle appuie sur les difficultés causées par cette expérience de l’imposteur

Ainsi, Cette expérience de l’imposteur est de plus en plus médiatisé ce qui permet à de plus en plus de personnes de prendre conscience de l’existence de ce problème. Cette médiatisation permet de mieux comprendre les mécanismes de ce qui nous est peut être déjà arrivé, mais aussi de savoir comment s’en prévenir ou y faire face. Il n’y a pas de traitement miracle pour faire face au syndrome de l’imposteur et avoir connaissance du fait que nous ne sommes pas seuls à l’avoir déjà expérimenté et peut être la meilleure façon d’y faire face.

A lire aussi : Envoyé spécial : le travail qui casse

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