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Lutter pour exister

Avant de s’envoler vers les tournois et les JO de Rio, Radio VL a assisté au dernier entraînement collectif de l’équipe de France de lutte. Une discipline historique et universelle ayant besoin de modernité sous peine de disparaître, alors que la France accueillera les Championnats du monde en 2017.

Dans un bâtiment de l’INSEP réservé aux sports de combat, on trouve une trentaine de gaillards trottinant autour des tapis de lutte dans la bonne humeur. Les lutteurs libres et ceux de la gréco-romaine forment d’abord un seul groupe. Par la suite, les athlètes sont répartis selon la catégorie et le poids, les intenses combats peuvent débuter.

Un seul qualifié direct

L'échauffement sous le regard des entraîneurs.

L’échauffement sous le regard des entraîneurs.

L’entraînement commence par un échauffement individuel : courses, acrobaties, simulations de chutes… Les mouvements se répètent et s’accélèrent. L’intensité monte. Tout cela sous les regards attentifs des entraineurs de l’équipe de France. Ils scrutent les faits et gestes des lutteurs car ce sont eux qui sélectionneront les meilleurs pour disputer les tournois de qualification olympique. Une compétition au sein même du groupe France.

Pour le moment, seul un lutteur est qualifié directement pour les Jeux Olympiques de Rio. C’est Zelimkhan Khadjiev dit Zelim, un jeune garçon de 21 ans au parcours atypique devenu champion du monde junior en 2014 de lutte libre. Pour le reste, il faudra finir sur le podium d’un des tournois en Serbie, en Mongolie ou en Turquie selon les catégories. Avant de s’envoler vers d’autres cieux, ils seront en France, une dernière fois à l’occasion du Tournoi de Paris le 30 et 31 janvier à l’INSEP.

Rio est encore loin. Pour le moment, l’objectif n’est pas atteint.  De l’aveu même de l’entraîneur de l’équipe de France de lutte libre, Didier Palisse « au vu des championnats du monde, le résultat est mitigé ». D’autres qualifications sont espérées, voir attendues comme celle de Melonin Noumonvi : « Obtenir la qualification aux JO et puis la médaille c’est ce qu’il me manque », espère l’ancien champion du monde 2014 et capitaine des équipes de France.

« Un jeu de gamins »

Historiquement, la France est un petit pays de lutte. Le nombre de licenciés est d’à peine 20 000. Loin, très loin du demi-million d’adeptes aux USA où ce sport est pratiqué dans les universités et même l’objet de film, comme le récent Foxcatcher. Très peu de lutteurs tricolores vivent de leur sport, certains champions de France travaillent même l’été pour arrondir leurs fins de mois. Ils ne se plaignent pas pour autant et préfèrent souligner la qualité de l’encadrement à l’INSEP : « La meilleure salle du monde » selon certains.

La salle dédiée à la lutte à l'INSEP

La salle dédiée à la lutte à l’INSEP

La lutte a du mal à séduire. Dans la plupart des cas, les lutteurs sont eux-mêmes issus d’une famille de passionnée. Pourtant, le potentiel est là : combattre, retourner son concurrent sur le dos, résister aux assauts adverses… « Les gamins adorent » assure Didier Palisse « mais passer de l’école à la structure administrative, au club, c’est là où on pêche ». Au total, on dénombre 411 clubs qui émaillent le territoire national.

Une discipline historique menacée

Les lutteurs de l'équipe de France à l'entrainement

Les lutteurs de l’équipe de France à l’entrainement

La France n’est pas le seul pays à être touché par le déclin de cette discipline. En 2012, la lutte a failli disparaître de la liste des sports olympiques. Déjà très peu médiatisée, c’était le coup de grâce. De puissantes fédérations se sont alors mobilisées pour apporter leur soutien, c’est le cas des USA mais aussi de la Russie ou encore l’Iran. La lutte a été réintégrée in extremis par un vote, elle restera au programme des jeux pour encore quelques années.

Un avertissement sans frais qui a eu pour effet de réveiller les instances. La nécessité de se réformer est apparue comme une évidence. Didier Palisse le reconnait : « On a laissé passer un train. Toutes les disciplines cherchent à se moderniser, à être plus fun, plus attractives. Peut-être que nous pensions en tant que 1ère discipline olympique, la lutte c’est universel ça restera toujours aux JO… Et bien non ».

Du spectacle, de l’attaque

Zelimkhan Khadjiev, 21 ans et grand espoir de la lutte française Crédits; lequipe.fr

Zelimkhan Khadjiev, 21 ans et grand espoir de la lutte française
Crédits; lequipe.fr

La concurrence vient aussi des autres sports. Plus télégénique, plus spectaculaire. Plus violent aussi. C’est le cas de la MMA (Mixed Martial Arts) qui attire les téléspectateurs. D’anciens lutteurs se sont reconvertis dans cette discipline, sûr d’acquérir la notoriété et un revenu décent. Cela attire les plus jeunes. Ainsi, Zelim n’est pas insensible : « Cela me plaît mais on me conseille de ne pas y aller ». Didier Palisse le reconnaît : « C’est un bon moyen de reconversion pour les lutteurs. Il y a une machine derrière avec de gros sponsors ». Pas facile de résister, même pour des lutteurs.

La fédération internationale se devait de réagir. Moderniser devient le maître mot.  Les premiers changements arrivent. Autrefois les combats se déroulaient en trois reprises de deux minutes, dorénavant ce sera l’inverse avec deux reprises de trois minutes. Pour gagner, il faudra marquer le plus de points, un système à la portée de tous. L’arbitre peut maintenant avertir un joueur trop passif et l’obliger à attaquer sous peine d’être pénalisé. Tous ces changements de règles ont deux points communs : favoriser l’attaquant et être plus facile à comprendre.

Une modification des tenues est en ce moment à l’étude et devrait intervenir avant Rio. Souvent raillées, les combinaisons moulantes des lutteurs vivent peut-être leur dernier jour. Pas très glamour, elles sont pourtant essentielles pour une pratique optimale de ce sport. Aucune maquette n’est encore sortie pour le moment.

Rio 2016, Paris 2017

En France, l’enjeu est de profiter du dynamisme au sortir des jeux olympiques.  Pour cela, avoir le plus de médaillés à Rio est une étape obligatoire. Par la suite, la France accueillera les Championnats du monde à l’AccorHôtel Arena (Bercy) du 21 au 26 août 2017. La fédération espère une hausse du nombre de licenciés et une plus grande visibilité.

Ce n’est pas gagné d’avance. Dans l’histoire des jeux olympiques moderne, la France compte 16 médaillés dont quatre en or. Leurs photos célébrant la victoire médailles autour du cou, sont encadrées et trônent tout autour de la salle. De quoi stimuler les athlètes. C’est le cas de Steve Guenot, le dernier champion olympique français en 2008 à Pékin. Ce dernier s’entraîne d’arrache-pied et n’hésite pas faire des heures supplémentaires pour être prêt. Il finit l’entrainement le dernier, épuisé.


JO Pékin – L’OR pour GUENOT par jcb77

Tout comme Steve Guenot, Melonin raccrochera après le Championnat du monde. La relève est attendue. Zoheir EL Ouarraqe, Zelim Khadjiev, ces noms vous sont inconnus, mais ils pourraient bien vous émouvoir dès Rio. Le champion du monde Zelim affiche ses ambitions : « Une médaille d’or à Rio ». Il poursuit : « J’aimerais bien gagner aux championnats du monde à Paris bien sûr. Mais j’espère surtout gagner à Paris en 2024 ».

Crédits à la une: The Telegraph

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