Hier, lundi 30 juin, le gouvernement, par l’intermédiaire du Secrétaire d’Etat au Budget, Christian Eckert, a choisi de suspendre le vote du budget de la Sécurité sociale devant les vives contestations de la commission des affaires sociales à l’Assemblée Nationale chargée d’examiner ce projet de loi.
Comme chaque année le Palais Bourbon doit définir le budget de la Sécu, pour cela il lui faudra voter la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS). Par exemple en 2013, les députés s’étaient accordés sur un budget de 340,5 milliards d’euros, toutes branches confondues (maladie, accidents du travail, branche vieillesse et branche famille), pour le régime général. Mais avant que le budget soit voté, il faut en premier lieu élaborer le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) qui sera ensuite, dans la procédure habituelle, débattu point par point, article par article au sein du Parlement. Ce projet de loi en réalité n’est pas élaboré au sein d’un des deux organismes parlementaires, mais au sein d’une institution spéciale : la direction de la Sécurité sociale.
Le pouvoir législatif a plus un droit de regard qu’un droit de contrôle
En réalité, en vue de la Constitution, le pouvoir législatif n’a en réalité que très peu de contrôle sur le budget de la Sécurité sociale. Si depuis la révision constitutionnelle de 1996, le Parlement à un droit de regard, son contrôle a bel et bien des limites puisqu’il ne peut fixer lui-même les recettes de la Sécu. La LFSS n’autorise pas la perception de recettes, elle ne fait que les prévoir. Les objectifs de dépenses fixés par le Parlement évaluent les dépenses mais ne les limites pas. Enfin, il y a une dernière restriction qui limite la puissance législative. Si le budget n’a pas été voté dans une période de cinquante jours, après que le dossier ait été déposé sur le bureau de l’Assemblée Nationale, le gouvernement est autorisé à adopter le PLFSS par ordonnance, ou encore par l’intermédiaire du fameux « 49-3 » (article 49 de la Constitution, alinéa 3) à tout moment, passant par-dessus la tête des parlementaires.
Un déficit devenu structurel
Certains parlementaires et observateurs politiques imputent d’ailleurs le déficit constant de la Sécurité sociale à ce manque de possibilité de contrôle dont dispose le l’Assemblée. En effet, et cela n’est étranger à personne, la Sécurité sociale en France présente un bilan déficitaire (différence entre recettes et dépenses des régimes de base obligatoire de la Sécurité sociale) depuis des dizaines d’année, malgré une embellie qui n’a été que de courte durée sous les gouvernements Jospin et souvent imputée à une conjoncture favorable.
La difficulté aujourd’hui
La majorité est aujourd’hui très divisée, notamment sur les questions sociales. Cela rappelle les divisions séculaires au sein d’une « gauche plurielle » (Lionel Jospin) : SFIO, communistes et radicaux au temps du Front Populaire ; SFIO, UDSR et MRP pour la Troisième Force, ou encore Michel Rocard au Congrès socialiste de Nantes en 1977 qui définit une « deuxième gauche » en opposition avec la première fondée sur un marxisme à la française et sur un héritage jacobin datant de 1789. Et beaucoup de ces députés et députées socialistes « frondeurs », c’est-à-dire en désaccord avec la ligne fixé par les dirigeants, se retrouvent dans la commission des affaires sociales en charge d’examiner ce projet de loi. Mais pourquoi alors ? La réponse est simple, la commission des affaires sociales est peu prisée et souvent reléguée aux députés qui ne réussissent pas à s’imposer, contrairement aux commissions plus prisées comme celle à la défense ou encore aux affaires étrangères.
La décision du gouvernement qui fait trembler l’hémicycle
Devant les contestations multiples de la part de la Commission des affaires sociales, le gouvernement à choisi de suspendre le vote du PLFSS jusqu’à nouvel ordre, ce qui a provoqué la consternation de l’Assemblée face à cette décision à l’image du député Christian Paul qui a parlé d’un recours à « des outils rouillés qui n’honorent pas le gouvernement ». Les députés devront donc débattre du projet de loi, sans pour autant le voter. Mais l’opposition aussi s’insurge devant cette décision, Christian Jacob le Président du groupe UMP à l’Assemblée, prédit le recours au « vote bloqué ». Le « vote bloqué », au titre de l’article 49 alinéa 3 de la constitution, sur demande du gouvernement, oblige l’assemblée à se prononcer sur la loi en bloc et non pas article par article. Le PLFSS serait donc soit accepté, soit refusé, et ce sans concession sur les différents articles.
Les mesures du budget de la Sécurité Sociale 2014
L’objectif du gouvernement est simple, réduire le déficit publique et pour cela, il faut passer par une réduction du déficit de la Sécurité sociale. Il veut donc que ce déficit passe en dessous de la barre des 13 milliards d’euros. Cela est donc synonyme des baisse des aides telle la baisse du plafond du quotient familial et des économies sur la branche maladie ; et de nouveaux prélèvements fiscaux comme une hausse des 0,15 point des cotisations retraites.
Le Match des tweets
Hier, en fin d’après-midi, alors que le match France-Nigéria puis Algérie-Allemagne se jouait sur TF1 et que tous les députés socialistes se sont accordés pour soutenir l’équipe de France, sur twitter ils ont continué à s’affronter. Cet affrontement à lieu entre un partisan de la ligne du gouvernement et un des leaders ayant lancé l’Appel des 100 contre François Hollande et Manuel Valls. Eduardo Rihan-Cypel, ancien porte-parole du parti, a publié un message sur le but marqué contre l’Algérie : « #Schurrie qui marque d’une #Madjer contre l’Algérie c’est cruel ». Christian Paul, un des « frondeurs » de la majorité, lui répond alors « le foot c’est bien l’hémicycle c’est mieux », ce à quoi il ne manque pas de rétorquer « Ne sois pas inquiet, je t’y retrouverai. ». Il y a eu aussi un échange musclé entre Bruno le Roux qui interpelle ouvertement Jérôme Guedj en faisant l’éloge d’une « équipe soudée ».
L’on ne sait pas jusqu’où exactement pourront encore aller les dissensions qui secouent le PS aujourd’hui et menace la majorité voire la gauche en générale, mais Manuel Valls à déjà pris les devant en invitant ses députés à ne pas faire de leurs divisions, un spectacle.