A Mayotte, des collectifs d’habitants expulsent des étrangers considérés comme responsables de tous les problèmes de l’île. Ces opérations sauvages ont conduit à l’expulsion de plus de 1000 personnes depuis le mois de janvier.
Expédition punitive. Dans le 101ème département français, plus de 1000 personnes ont déjà été expulsées de leur domicile. La raison : ces personnes sont des « étrangers » qui sont accusés de toutes les douleurs de l’île : des vols, des dégradations ou même des agressions. Pour ces collectifs d’habitants, les étrangers sont également les principaux responsables « des écoles surchargées », du « système de santé débordé » et du « climat de psychose installé ». Face aux forces de l’ordre en position de spectateur, des centaines de personnes sont contraintes de quitter leurs domicile, poussées dehors par des collectifs d’habitants très remontés.
Un exemple de communiqué envoyé par un collectif d’habitants:
Mayotte compte 40% d’étrangers parmi les 212 600 habitants de l’île. Une immigration qui vient principalement des Comores. Depuis le début de l’année, quatre expéditions punitives ont eu lieu sur l’île de Mayotte.
« Expulsion des étrangers en situation irrégulière »
Armés de bâtons et de pierres, les collectifs d’habitants font justice eux-même sur l’île. La Cimade, une association nationale de défense des droits des étrangers, dénonce sur son site et sur Twitter les agressions qui ont lieu sur l’île.
#Mayotte : la chasse aux étrangers par la population est ouverte… et couverte https://t.co/y2pM3uEUld pic.twitter.com/Yc1EjnpUJd
— La Cimade (@lacimade) 25 avril 2016
La chasse aux Comoriens bat son plein en toute impunité à Mayotte https://t.co/m87xcIYuoY pic.twitter.com/62icnxMrS5
— Les Observateurs (@Observateurs) 10 mai 2016
Le 20 décembre 2015, la première expulsion s’est déroulée à Tsimkoura, un village du sud de Mayotte. Un courrier est envoyé aux propriétaires qui louent des habitations aux étrangers. L’objectif et le message de la lettre est explicite : expulsion des étrangers en situation irrégulière. Sur cette lettre, on peut lire la détermination du collectif des habitants :
« Suite au vole à répétition, aux agressions, à l’occupation des terrains illégalement et à l’insécurité grimpante ressentie par les habitants de Tsimkoura, une réunion d’urgence a été convoqué ce dimanche 20 Décembre 2015 au plateau polyvalent. Une réflexion collective à été mené. Il s’en est sorti qu’il été plus urgent de procéder à l’expulsion des étrangers en situation irrégulière résidant dans le village » (…) « Une liste de gents qui hébergent des clandestins chez eux a été établie, et il s’avère que vous en faites parti. »
La lettre envoyée aux habitants:
« Nous nous adressions auprès de vous afin que vous fassiez le nécessaire pour que ces étrangers quittent le village d’ici le 10/10/2016. Passé ce délai, les habitants prendront les mesures nécessaires pour remédier à ce problème », peut-on lire sur la lettre.
Situation « extrêmement préoccupante »
La première opération de délogement des étrangers a donc eu lieu le 10 janvier 2016. Depuis, près de 1000 personnes ont été contraintes de quitter leur domicile. Ces étrangers en situation irrégulière ou non sont condamnés à dormir dans la rue, faute de pouvoir se reloger. Le 15 mai dernier, près de 100 personnes ont sillonné les rues de Bouéni, au sud de l’île, pour déloger des étrangers : c’est la dernière opération qui a eu lieu sur l’île. Mais les collectifs d’habitants ne comptent pas s’arrêter là. Deux autres opérations de ce type sont prévues : le 22 mai dans la ville de M’Tsamboro, située au nord de l’île, et le 5 juin à Kani-Kéli, au sud.
En réponse à ces actes, la préfecture « condamne fermement les événements qui se sont déroulés sur plusieurs communes de l’île ce week-end et ont conduit à l’expulsion de familles et à la destruction de bangas (cases, NDLR) », peut-on lire dans un communiqué.
Pour le chef de l’Etat François Hollande, la situation est « extrêmement préoccupante ». Le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, admet pour sa part que « les tensions liées aux migrations aujourd’hui à Mayotte conduisent à des choses qui sont assez inacceptables ».