Sous-payés, censurés et même parfois violentés… Aujourd’hui encore, les journalistes sénégalais continuent de se battre pour défendre leurs droits et la liberté de la presse au Sénégal. Un combat que Fara Thiernou MENDY, journaliste web de 32 ans, mène au quotidien.
Même si le pays de la Téranga se situe à la 47ème place du classement de la liberté de la presse, les journalistes du Sénégal restent très inquiets face à la situation actuelle. À commencer par les inégalités de salaires. « Dans les médias privés, un animateur est beaucoup mieux payé qu’un journaliste. Alors que pourtant, c’est le journaliste qui fournit un maximum d’informations » affirme Fara. « L’animateur gagne environ 10 millions de francs (15233 euros) alors qu’un journaliste gagne à peine 150 000 (228 euros) par mois. » Triste réalité, il n’est pas rare que des journalistes doivent trouver un autre travail à côté pour arrondir les fins de mois.
Des journalistes et des médias sous la pression du gouvernement
« Tout récemment avec l’arrestation de l’opposant politique, Ousmane Sonko, il y a eu des sièges de médias qui ont été saccagés« . En effet lors de l’interpellation du leader de l’opposition au début du mois de mars, des émeutes ont éclaté. Le signal des chaînes Sene TV et Walf TV a même été coupé par les autorités pendant plusieurs jours. Une censure que condamne Nicolas Diam, le président du Collectif des techniciens de la presse audiovisuelle : « Dans quel État sommes-nous ? Quelle presse veut l’État du Sénégal ? Ce sont les questions que l’on se pose. »
Certains journalistes présents dans les manifestations ont également subi des agressions de la part des policiers. « Ils nous confondent avec les manifestants parfois, ils nous violentent. Ils font tout ce qu’ils veulent avec nous. Et c’est très rare qu’ils soient sanctionnés pour leurs actes » poursuit Fara. Des violences revendiquées par le Syndicat des professionnels de l’information et de la communication du Sénégal (SYNPICS) qui joue un rôle crucial dans la défense des droits des journalistes.
En 2017 à l’approche des législatives, mon rédacteur en chef à Walf, s’est fait embarqué par la Division des Investigations Criminelles pour avoir publié une vidéo d’un gars qui ramassait des cartes électorales dans les ordures. Il a finit en garde à vue de 10 heures à 23 heures. On lui mettait la pression pour révéler sa source, ce qu’il a refusé.
Contrôle des téléphones, surveillance permanente… Que ce soit le gouvernement ou les personnalités publiques, le pouvoir sénégalais passe par tous les moyens pour menacer les médias. Avec à la clé, la possibilité d’écoper de sanctions pénales pouvant aller jusqu’à deux ans de prison pour des faits de diffamation ou trois ans pour la publication de fake news susceptibles de “porter atteinte au moral de population” ou de “jeter le discrédit sur les institutions publiques”.
Une aide à la presse distribuée selon les choix de l’exécutif
Chaque année, le pays octroie des financements aux médias dans le cadre de l’opération « aide à la presse ». Cependant, il s’avère que ce dernier ne soit pas totalement objectif lors de la distribution. « Si vous faites un article sur le président de la République ou sur des membres du gouvernement qui ne plaît pas… Et bah, vous pouvez oublier cette aide« . Cette pression constante donne naissance à un nouveau style de journalisme. Des journalistes qui ne sont plus là pour relater des faits et des constatations mais plutôt pour être des porte-paroles du pouvoir. D’après Fara, il y a une véritable « tentative d’intimidation« .
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Malgré tout, une légère amélioration en vue
Dès la mi-mars, les journalistes professionnels ont pu faire leur demande de cartes de presse. Auparavant, ils n’en avaient pas. Pour Fara, c’est un bon début : « Ça va nous donner encore plus de crédibilité ».
Retrouvez les articles de Fara sur le site web de Radio Espérance et sur GuestüInfo.com