Barack Obama pourrait faire un geste, à quelques jours de la fin de sa présidence, en faveur de Chelsea Manning. L’ex-militaire américaine, qui purge actuellement 35 ans de prison, est accusée d’avoir transmis des documents confidentiels à WikiLeaks. Le président pourrait gracier la jeune femme.
De nombreux citoyens américains militent pour la libération de Chelsea Manning (© Reuters)
Des conditions de détention inhumaines
Avant de quitter la Maison Blanche le 20 janvier prochain, et d’enfin profiter de sa retraite, Barack Obama pourrait utiliser pour la dernière fois l’un de ses super-pouvoirs de président en accordant une grâce totale à Chelsea Manning, cette ex-militaire arrêtée et incarcérée en 2010. Elle était accusée d’avoir divulgué à WikiLeaks des documents confidentiels de l’armée américaine. Rappelons tout de même que l’organisation, qui a déjà révélé plusieurs éléments compromettants sur certains gouvernements, est à l’origine de nombreux scandales concernant la corruption, l’espionnage et la violation de droits de l’homme.
Chelsea Manning, 29 ans, est actuellement en train de purger une peine de trente-cinq ans de prison au Fort Leavenworth, dans le Kansas. Ses conditions de détention sont particulièrement sévères. La jeune femme aurait été mise à l’isolement, ce qui signifie qu’elle est coupé de tout contact avec les autres détenus. En France, l’isolement ne peut excéder 30 jours consécutifs car la santé mentale des détenus est en jeu. Un rapporteur des Nations Unies sur la torture a été mandaté pour décrire ses conditions de détention. Selon lui, elles sont cruelles, inhumaines et dégradantes.
Une situation qui a poussé le lanceur d’alerte Edward Snowden, lui aussi poursuivi aux États-Unis pour avoir transmis des documents secrets appartenant à la NSA (l’agence du renseignement américaine), a interpellé directement Obama sur Twitter. C’était hier et le message est très clair : Barack Obama est le dernier espoir pour sauver Manning.
Traduction : « M. le Président, si vous n’accordez qu’un seul acte de clémence à votre sortie de la Maison Blanche, libérez s’il vous plaît Chelsea Manning. Vous seul pouvez la sauver ».
Deux tentatives de suicide
À ces conditions d’incarcération déjà éprouvantes s’ajoute aussi l’impossibilité de terminer son changement de genre. En effet, avant de devenir Chelsea, elle était un homme connu sous le nom de Bradley. Pour achever cette transformation, elle doit prendre un traitement hormonal rigoureux et également subir une opération de changement de sexe. Sauf qu’elle se heurte depuis le début de sa détention à des refus de la part de l’administration pénitentiaire. Et tout ceci influe négativement sur sa santé mentale : Manning a tenté par deux fois de se suicider depuis qu’elle est enfermée.
Chelsea Manning était autrefois un homme répondant au prénom de Bradley (© DR)
Dans une lettre rédigée en novembre dernier, Manning y déclarait ne pas désirer la grâce totale mais plutôt une commutation de peine : « Je ne demande pas à être graciée. Je sais que je ne pourrai jamais échapper aux conséquences de ma condamnation. La seule réparation que je demande est d’être libérée de la prison militaire après y avoir purgé six ans d’isolement alors que je n’ai jamais souhaité mettre en danger les intérêts des États-Unis ou de ses militaires ».
Que va faire Obama ?
Un cas épineux pour Barack Obama à huit jours de la fin de ses fonctions en tant qu’homme le plus puissant des Etats-Unis : doit-il mettre fin au calvaire que vit cette femme malgré qu’elle ait trahi son pays ? Obama craindrait-il que tous ceux ayant accès aux secrets classés défense puissent les dévoiler sans purger leurs peines derrière ? Des secrets qui pourraient porter un fort préjudice aux intérêts économiques et géopolitiques d’une telle superpuissance.
Après 8 ans de service, Obama achève sa présidence le 20 janvier prochain (© Reuters/Kevin Lamarque)
D’un autre côté, le président sortant ne peut pas ignorer les conditions si particulières de la jeune femme. Surtout qu’une pétition sur le site de la Maison Blanche a mobilisé plus de 115.000 signataires. Le sort de Manning est donc entre ses mains, à lui de faire le bon choix. En espérant que ce choix sera le plus humain possible.