Après ses deux paris très réussis, Irresponsable et Les Grands, OCS fait le pari de l’humour « sans limites » avec José. Peut-on rire de tout ?
C’est quoi José ? L’Apocalypse est proche. Dieu est à deux doigts de lancer des boules de feu sur notre monde. Mais il nous reste une chance : José. Individualisme, orgueil, avarice, cupidité, haine de son prochain, Dieu est excédé par les Hommes et décide, motivé par un Saint Pierre à cran, de sonner le temps de l’Apocalypse ! Avant de lancer des boules de feu sur ceux qu’il a faits à son image, il laisse aux Hommes une dernière chance et choisit de renvoyer sur Terre… le Messie, Son fils, Jésus, pour qu’il finisse le seul job qu’il lui avait demandé il y a plus de 2000 ans : enlever le péché du monde. Mission que Jésus avait plutôt bien ratée en finissant en slip, cloué à une croix.
Jésus doit donc redescendre sur Terre pour sauver les Hommes. Sauf qu’il est moyen chaud.
Un humour clivant nécessaire
José saison 1 c’est la série « anti-twitter », anti réseaux sociaux. Chaque blague, chaque jeu de mots, chaque punchline peut déclencher une réaction en chaîne que les réseaux sociaux « adorent ». Car en ces temps où l’on aime se froisser de tout, où l’on est heurté dès lors qu’on se laisse aller à la moindre blague, José taille, incise, met le doigt là où ça mal et fait sien un humour qui est totalement inconnu de notre fiction télé, voir même de notre cinéma. Blagues sur les religions ou les minorités, tout y passe. Tantôt fines, tantôt lourdes, aucune de ces blagues n’est à jeter pour une simple et bonne raison: elles sont nécessaires et font du bien. Notre société « crèvera » de ne plus être capable de rire du tout car oui on peut rire de tout à condition de ne pas être n’importe qui. Et ces gars à l’oeuvre sur José ne sont pas n’importe. Ils ont du talent à revendre et ont parfaitement su saisir ce dont on avait besoin. Notre société est une cocotte minute portée à sa pression maximum, les auteurs de José sont de ceux qui en libèrent la pression. Est-ce que toutes les blagues sont réussies ? Non absolument pas. Est-ce que certaines sont lourdes ? Oui voir même très lourdes, n’hésitant pas parfois même à trop en faire, à trop refaire les mêmes. Comme des « sales gosses » qui ne comprennent pas que les blagues les plus courtes sont souvent les meilleures. Mais ce n’est pas grave. Il en faut des trublions comme eux. En poussant d’un coup le bouchon très (trop ?) loin, ils libèrent, on l’espère, la parole pour les suivants. Pour que l’humour transgressif investisse de plus en plus la télé. Et en la matière, le dernier épisode de la saison 1 va très très loin. Mais ça fait du bien !
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Un fil rouge un peu trop fin et hésitant
Si l’humour fait mouche et marche très bien, la narration est bien plus hésitante. Le fil rouge est bien trouvé, la narration épouse bien la formule « épisode bouclé et feuilletonnant » mais l’enchaînement est souvent maladroit car le fond est trop dense. Vouloir couvrir en 10 épisodes l’Apocalypse et sa résolution est bien trop ambitieux, ça aurait dû être l’enjeu de la série entière. Du coup, ça pêche non seulement sur la résolution bien trop rapide de l’épisode mais aussi sur l’ensemble de la saison. Pour le coup, les faibles moyens alloués à la série jouent contre elle car un seul personnage pour incarner une organisation comme l’Opus Dei chargée de tuer le Christ, c’est bien trop peu pour être crédible même si David Salles est une fois de plus parfait. On ressent du coup une sensation d’une saison parfois déséquilibrée par une narration qui se chercher et sauvée par un humour dévastateur.
En revanche, deux points très forts : le casting parfaitement choisi et qui matche, et les références « méta » de la série qui font mouches.
« Tu es Piotr et sur cette Piotr, je rebâtirai mon église »
José fait du bien en jouant avec la corde sensible de la susceptibilité que l’on a tous en nous mais que l’on doit, collectivement, envoyer valser. Franck Bellocq nous confiait que les attentats survenus en France avaient naturellement soulevé beaucoup de questions quant à l’humour utilisé dans la série. Mais plus que jamais, cet humour est nécessaire. Dans un monde où le délit de blasphèmes menace de faire son retour et où on tue pour des dessins humoristiques, il faut des artistes comme ceux de José pour défricher le terrain et pousser plus loin l’humour sérielle. Quitte à rater la marche parfois ? Oui car rater la marche signifie qu’on n’a rien calculer et qu’on a été jusqu’au bout de son intention. C’est vital !
Format : 10×20 minutes
Année de production : 2016
Auteurs : Frank Bellocq, Jean-Luc Cano, Gaël Toto Brocchi, Jean-Michel Ben Soussan
Réalisateur : Jean-Michel Ben Soussan
Casting : Frank Bellocq, Gaël Toto Brocchi, Oranne Dutoit, William Lebghil, Damien Jouillerot, Jimmy Labeeu, Rémy Adriaens, Jawad Ennejaz, Mohad Sanou, Jean Bechetoille, Jérôme Niel, Ludovic Berthillot, Chris Deslandes, David Salles, Léon Plazol, Eric Da Costa, Marc Riso.
Une production LGM Cinéma Co-production: RPPC, Big Band Story, My Dear