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On a vu pour vous … le premier épisode de SMILF (Showtime)

Comédie insolente et réjouissante, SMILF met en scène le quotidien d’une jeune mère célibataire complètement paumée. Avec humour, justesse et émotion.

C’est quoi, SMILF ? Brigettte Bird (Frankie Shaw) est une jeune femme d’une vingtaine d’années, qui vit à Boston dans un minuscule studio où elle élève son petit garçon. Séparée du père de l’enfant, elle entretient toujours une relation ambiguë avec celui-ci. Aspirante actrice, elle court de casting en casting et, en attendant le succès, elle travaille comme baby-sitter pour une bourgeoise fortunée (Connie Britton). Sa mère (Rosie O’Donnell) souffre de problèmes psychiatriques, elle-même a subi des violences par le passé, elle est atteinte d’un trouble du comportement alimentaire et sa vie sexuelle est un désert. Bref : vie de m… Pourtant, Bridgette lutte au quotidien, entre doutes, déconvenues et désillusions, pour garder la tête hors de l’eau.

C’est une tendance de fond : depuis quelques années abondent sur nos écrans des dramédies de 30 minutes mettant en scènes des héroïnes indépendantes, tentant de mener de front vie privée et vie professionnelle. Avec plus ou moins de succès, et leurs difficultés quotidiennes et leurs remises en question sont justement le cœur de ces fictions. De Girls de Lena Dunham à Better Things de Pamela Adlon en passant par  Issa Rae avec Insecure, autant de séries écrites et interprétées – et parfois réalisées, comme pour SMILF – par les actrices elles-mêmes, qui mettent en scène leur propre histoire romancée, à travers un alter-ego de fiction.

Dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, l’actrice / scénariste / productrice / réalisatrice / showrunner se nomme Frankie Shaw, et les fans de séries la connaissent notamment pour son rôle de Shayla dans la saison 1 de Mr. Robot. Au départ, SMILF était un court-métrage, couronné par le prix spécial du Jury lors du festival de Sundance en 2015. Sa créatrice en a développé l’histoire pour en tirer une série, diffusée sur Showtime. En reprenant les bases du scénario et le même ton, elle s’appuie sur son expérience personnelle pour raconter l’histoire de cette jeune femme  de vingt ans, empêtrée dans ses difficultés économiques, professionnelles et sentimentales.

Bridgette, mère célibataire en galère

 

Une mère actrice, séparée, avec son enfant : si le point de départ évoque la série Better Things, l’ambiance n’est pas du tout la même, parce que le contexte socio-économique est radicalement différent. Bridgette n’appartient pas à la classe moyenne : elle habite dans un tout petit studio, vit sur le maigre salaire que lui rapporte son petit boulot, et certains jours, elle n’a pas assez d’argent pour prendre le bus… En un sens, Bridgette ne déparerait pas dans une série comme Shameless.

En tant que pilote, ce premier épisode fonctionne à tous les niveaux et les personnages, la situation se mettent en place rapidement et avec fluidité. Les dialogues enlevés, les scènes à la fois drôles et mélancoliques, le mélange de drama et de comédie, le ton délicieusement irrévérencieux donnent au spectateur tous les éléments lui permettant d’accéder à la réalité de ce que vit l’héroïne.On comprend la relation qu’elle entretient avec le père de son enfant (Miguel Gomez – The Strain), l’amour inconditionnel qu’elle voue à son fils, les liens complexes qui la lient à sa mère (Rossie O’Donnell), la manière dont elle vit son absence de vie sexuelle depuis son accouchement , ses difficultés pour percer en tant qu’actrice, et bien d’autres éléments subtilement suggérés par de menus détails. Évidemment, SMILF se centre sur l’héroïne, pour l’instant au détriment des autres personnages. Peut-être gagneront-ils en importance au fil des épisodes, mais même s’ils sont encore diffus, ils n’en sont pas moins complexes ou intéressants, qu’il s’agisse de la mère ou de l’ex-compagnon.

Situation amoureuse : c’est compliqué…

 

Si l’on a décrypté le titre, on a déjà une idée du ton de la série. Pour les autres, expliquons que SMILF est l’acronyme de «Single Mother I’d Like to F… » De fait, SMILF n’est pas une comédie consensuelle que l’on regarde en famille. Avec certaines scènes osées, la série comporte son lot de séquences explicites, notamment sexuelles. Pour autant, on est loin de la provocation gratuite et chaque élément se justifie. Le premier épisode montre par exemple une scène de masturbation ou un dialogue entre Bridgette et sa gynécologue, lorsque l’héroïne s’inquiète de la taille de son vagin après l’accouchement : deux scènes qui traduisent les incertitudes de notre héroïne à l’heure de refaire sa vie amoureuse (et sexuelle) en tant que mère célibataire. De même, les nus masculins et féminins sont montrés avec naturel et s’intègrent logiquement au récit, notamment vu le rapport que l’héroïne entretient avec son propre corps.

Ainsi, au terme des 30 minutes que dure ce premier épisode, SMILF semble déjà avoir trouvé une voix très personnelle, entre humour et sensibilité, tendresse et honnêteté brutale. L’ultime scène, géniale, porte en elle tout ce mélange d’humour et de douceur. Bridgette n’est pas une femme exemplaire, elle est même tout le contraire, mais ce sont ses imperfections qui la rendent intéressante et attachante. D’emblée, c’est un personnage que l’on aime, que l’on a envie de connaître, de suivre dans les épreuves et dans les moments de joie. Un personnage avec qui l’on va souffrir mais aussi rire, et auquel il n’est pas difficile (du moins, en tant que femme) de s’identifier.

Adaptation ou continuation – question de point de vue – du court métrage éponyme, SMILF inaugure une première saison de 10 épisodes avec un pilote délicieux, jetant les bases de ce qui pourrait bien être une excellente série : simple, drôle et efficace, avec des personnages intéressants et des petites histoires quotidiennes aussi politiquement incorrectes qu’honnêtes et réjouissantes. Reste à voir si Frankie Shaw maintiendra le niveau… A priori, on lui fait confiance : ce premier épisode laisse entrevoir beaucoup de potentiel.

SMILF – Showtime.
10 épisodes de 30′ environ.

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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