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On a vu Les choses qui passent au Festival D’Avignon

Après le grand succès des Damnés en 2017 dans la Cours d’Honneur du Palais des Papes avec la Troupe de la Comédie Française, Ivo Van Hove est revenu cette année au Festival D’Avignon avec une adaptation de Vieilles gens et choses qui passent, roman du grand écrivain néerlandais Louis Couperus (fin XIXe – début XXe).

Louis Couperus

Louis Couperus est une figure majeure de la littérature néerlandaise. Même s’il reste peu connu en France, il est l’un des auteurs hollandais les plus connus dans son pays. Ivo Van Hove a permis cette année de faire découvrir aux festivaliers un auteur d’une grande poésie. Ses romans psychologiques portent l’influence des naturalistes tels que Zola et Flaubert. S’attachant aux thèmes du destin et de la décadence il décrit avec lucidité la fin du XIXe siècle.

Le metteur en scène flamand, Ivo Van Hove, a choisi d’adapter l’oeuvre de Louis Couperus car celle-ci propose une vision avant-gardiste du monde. En effet, l’auteur pose des questions relatives à l’existence : le mariage, les relations humaines, la famille. Il explore également le thème du temps. Ces thèmes, même s’ils sont explorés par un auteur du siècle dernier, trouvent toujours dans notre époque actuelle leur résonance. Le temps est vécu comme une angoisse chez les vivants. La peur du temps qui passe et le caractère inéluctable de la mort sont au centre de l’adaptation théâtrale d’Ivo Van Hove.

 

Cette image de la grand-mère en train de mourir était l’une des plus frappantes. En effet, quoi de plus difficile que de rendre crédible la mort sur scène alors que le théâtre donne à voir des comédiens qui sont bien vivants ? Ici, (peut-être était-ce dû à l’âge avancé de l’actrice), la mort semblait réellement là. Le silence s’est imposé à nous comme une nécessité.

 

De Dingen Die Voorbijgaan

L’histoire racontée est celle d’une famille dont le mode de vie, très moderne pour l’époque, pourrait nous laisser penser qu’il s’agit d’une famille d’aujourd’hui. Cette famille cache un secret. La grand-mère du personnage principal a commis il y a plusieurs années, le meurtre de son époux, avec l’aide de son amant. Ces deux amants ont donc payé le prix de leur amour par une vie, à deux certes, mais contrainte au silence. Et la nécessité de l’omerta s’est imposée au fil des générations.

En effet, certains membres de la famille ont su garder le silence. Cependant, ils n’ont cessé au fil de leur existence de se heurter à ce silence douloureux, à la culpabilité qu’il entraine. Et cette douleur liée à une nécessité de faire taire malgré soi une émotion trop intense pour être gardée, s’est transformée peu à peu en un cancer. Une vie vécue comme une lente agonie silencieuse.

Le temps et la mort

L’histoire met en avant le thème de la mort. Tous les personnages sont âgés (le plus jeune à 39 ans). Tous attendent que la vie se termine. La mort prend certains personnages qui auraient voulu rester, et laisse ceux qui n’attendaient plus que de partir. En conséquence, les sentiments d’injustice et d’impuissance se font plus forts. Les personnages en restant dans l’attente de leur mort ne vivent jamais pleinement leur vie. Leur existence est ponctuée de désirs qui resteront à jamais insatisfaits.

La scénographie imaginée par Jan Versweyveld symbolise l’attente. En effet, le décor donne l’impression d’un purgatoire. Une grande salle d’attente pour la mort. De plus, au fond, placée au centre, se trouve une horloge dont le son des cloches ramène à la notion de temps. Lorsque la grand-mère meurt, la musique des cloches s’arrête. En conséquence, les personnages, tout comme les spectateurs, sont plongés dans un silence profond, long, douloureux, qui n’est pas sans rappeler notre impuissance face à l’inéluctabilité du temps et de la mort.

 

Une magnifique adaptation

La froideur de la scénographie, la sobriété des costumes, la musique sur laquelle se confrontent des mots poignants et poétiques d’un texte comme celui de Louis Couperus, ont plongé les spectateurs dans un autre univers. De plus, en découvrant la froideur et la tristesse dans lesquelles vivent ces personnages, on ne peut que regretter d’agir comme eux. On ne peut qu’après coup, vouloir vivre pleinement sa vie. Ne pas perdre son temps à attendre la mort. Tout faire pour ne pas laisser nos conditions de vie nous aigrir.

Les comédiens étaient exceptionnels, tous sans exception. Ils nous ont offert à voir des personnages portant en eux le fossile d’une douleur trop longtemps restée dans le silence.

Le musicien joue un rôle considérable dans la pièce et il serait impossible de ne pas l’évoquer. En effet, il créé l’atmosphère dans laquelle toute la salle se plonge. Il donne par sa musique, le rythme de nos respirations.

L’adaptation d’Ivo Van Hove est magnifique. Le spectacle pose la question de savoir s’il est possible de se libérer du poids de l’héritage familial. En effet, ce dernier est souvent en contradiction avec ce que nous sommes réellement. Le monologue sur lequel s’achève la pièce laisse entrevoir une lueur d’espoir. La possibilité pour les générations futures de prendre en main leur destin. Et si nous parvenons à rompre les lourds schémas familiaux, à sortir de l’enfermement dans lequel nous sommes, peut-être pourrions-nous, en nous libérant, changer le monde ?

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