La saga Fast & Furious devenue l’une des plus rentables du cinéma entame sa mue avec le premier volet sans Paul Walker. Que vaut donc ce Fast & Furious 8 ?
Souvenez-vous, c’était il y a deux ans. Après un report inévitable suite au décès de Paul Walker, Fast & Furious 7 et sa débauche de cascades toutes plus folles les unes que les autres débarquait sur les écrans et cassait la baraque au box-office mondial. James Wan imposait sa patte sur le septième épisode, tandis que le personnage interprété par Paul Walker obtenait une porte de sortie très honorable grâce au délicat équilibre réussi par la production de respecter l’histoire de la saga et de faire passer une émotion légitime après la disparition du pilier de la franchise avec Vin Diesel. Aujourd’hui Fast & Furious 8 arrive à son tour. C’est cette fois le chevronné F. Gary Gray (Négociateur, Braquage à l’italienne, NWA: Straight Outta Compton…) qui est aux commandes. Il retrouve Vin Diesel qu’il avait déjà dirigé en 2003 dans Un Homme à Part et arrive sur ce huitième épisode avec un atout maitre dans sa manche: La bad girl de l’histoire interprétée par la comédienne sud-africaine Charlize Theron (Mad Max: Fury Road). Vin Diesel, Dwayne Johnson, Jason Statham, Michelle Rodriguez, Kurt Russell et consorts sont évidemment toujours là et si faire mieux que le film précédent semblait un Graal inaccessible qu’en est t-il exactement ?
Mais c’est quoi déjà… Fast & Furious 8 ? Maintenant que Dom et Letty sont en lune de miel, que Brian et Mia se sont rangés et que le reste de l’équipe a été disculpé, la bande de globetrotteurs retrouve un semblant de vie normale. Mais quand une mystérieuse femme entraîne Dom dans le monde de la criminalité, ce dernier ne pourra éviter de trahir ses proches qui vont faire face à des épreuves qu’ils n’avaient jamais rencontrées jusqu’alors. Des rivages de Cuba au rues de New York en passant par les plaines gelées de la mer arctique de Barrents, notre équipe va sillonner le globe pour tenter d’empêcher une anarchiste de déchaîner un chaos mondial et de ramener à la maison l’homme qui a fait d’eux une famille.
Passée de statut de série B gentillette à celui de blockbuster mastodonte, Fast & Furious s’est transformé au fur et à mesure de son évolution pour atteindre avec le septième épisode une sorte de quintessence dans le défi des lois de la physique. Si les quatre premiers volets sont aujourd’hui des œuvres vintage dont le charme est plus que relatif, depuis le cinquième épisode, la saga est entrée dans une nouvelle dimension qui lui vaut désormais un regard de contentement de la part des amateurs de bolides et de sensations fortes, mais également des férus du cinéma d’action. Avec l’arrivée du personnage de Dwayne Johnson et de sa confrontation avec la « famille » de Dom, Fast & Furious s’est ouvert de nouvelles perspectives et en grandissant la franchise est devenue un des mètres étalon du blockbuster. Ce huitième volet, sans faire table rase du passé, repart sur une nouvelle dynamique et pensé comme le premier volet d’une nouvelle trilogie (les épisodes 8 et 9 sont d’ores et déjà programmés pour avril 2019 et 2021), mais il subit de facto le contrecoup de l’incontestable réussite des trois épisodes précédents ce qui l’obligeait à faire au moins aussi bien. Et si l’on passe un très bon moment, force est de constater que Fast & Furious 8 accuse le coup du choix hasardeux de F. Gary Gray d’une part qui ne parvient pas à apposer son empreinte sur la saga, et d’un scénario bien trop light d’autre part. Les invraisemblances ou autres retournements de situation incongrus qui sont l’apanage de la série sont toujours là et il n’est pas question ici de faire un procès à ce type de procédés que l’on a tellement appréciés précédemment. Mais on sent ici une sorte de relâchement coupable ce qui rend certaines séquences totalement artificielles et qui peinent à nous contenter totalement. C’est évidemment toujours bien ficelé mais un recours plus systématique aux effets visuels précipitent à donner au film un côté fake bien plus prononcé qui nous sort ponctuellement du récit. Ajoutons à cela une mise en scène dénuée de ce côté viscéral obtenu par Justin Lin et James Wan ainsi qu’un personnage de bad girl joué par Charlize Theron qui déçoit par son manque d’envergure et l’espace restreint qui lui est octroyé en terme de jeu et vous comprendrez que ce huitième volet est une semi-déception.
Passées ces réserves qui sans être rédhibitoires écornent quand même l’affection que l’on éprouve pour la franchise, il faut dire que Fast & Furious 8 parvient malgré tout à nous offrir quelques séquences mémorables qui méritent le déplacement. La séquence dans la prison ainsi que la partie en Russie nous offrent notamment des scènes réjouissantes et la confrontation Dwayne Johnson-Jason Statham est une folie pure, les deux acteurs rivalisant de punchlines et de coups de poing fracassants. Ils aimantent toutes les scènes dans lesquelles ils apparaissent, laissant presque la star Vin Diesel dans l’ombre d’où il a quelques difficultés à s’extraire. Les autres personnages secondaires ont chacun leur moment, mais l’empilement de guests commence à démontrer le manque d’imagination des auteurs et les problématiques qui s’ouvrent à eux pour la suite. Si les scènes les plus casse-gueules (notamment les voitures « zombies », la scène sur la banquise…) sont vraiment très limites, on ne fera pas trop la fine bouche car Fast & Furious 8 c’est 2H15 de tribulations sur les chapeaux de roue et après tout on sait ce qu’on va voir lorsqu’on en arrive au huitième film.
Fast & Furious 8 est clairement en dessous des trois volets précédents mais grâce à des séquences intenses et à l’abattage du tandem Dwayne Johnson-Jason Statham, il réjouira les amateurs de la saga s’ils ne sont pas trop regardants sur la mise en scènes et les incohérences narratives. Attention tout de même à ne pas devenir une caricature de caricature et à trop polir un matériau auquel une certaine rugosité ne ferait pas de mal
Fast & Furious 8 de F. Gary Gray – En salles le 12 avril 2017