Peacemaker est le héros d’une série à son image, violente et déjantée… mais qui donne aussi plus de profondeur au personnage. Diffusée sur HBO Max aux Etats-Unis, elle débarque le 30 décembre sur Prime Vidéo.
C’est quoi, Peacemaker ? Peacemaker (John Cena), un super-méchant qui se prend pour un super-héros, est prêt à tout pour établir la paix – y compris à tuer des innocents. Après plusieurs mois passés à l’hôpital, il est de nouveau sur pieds mais c’est la prison qui l’attend. A moins qu’il n’accepte de prendre part au mystérieux Projet Butterfly. Peacemaker rejoint ainsi une équipe d’intervention clandestine à laquelle va bientôt se greffer son vieil ami Vigilante (Freddy Storma).
Actuellement diffusée sur HBO Max aux États-Unis et inédite en France, Peacemaker est un spin-off ou une suite de The Suicide Squad. Le film de 2021 signé James Gunn (créateur et scénariste de la série) suivait – dans un style délibérément violent, grotesque, délicieusement imbécile et complètement réjouissant – une bande de « super-méchants » recrutés pour une mission suicide (d’où le nom de l’équipe). Aux côtés de Harley Quinn ou de King Shark apparaissait Peacemaker alias Christopher Smith : un personnage né dans un comics de 1966 dont le but est d’établir la paix, quitte à « tuer n’importe quel homme, femme ou enfant » pour y parvenir.
Mieux vaut avoir vu The Suicide Squad , puisque Peacemaker fait directement suite au film – même si l’on peut se contenter des premières scènes qui résument le strict nécessaire. Après la mission relatée dans le film, Peacemaker sort de l’hôpital ; pour éviter de retourner en prison, il se résout à rejoindre une unité clandestine des Black Ops, pour une mission baptisée Projet Butterfly dont il ignore tout. Sous les ordres de Mr Murn (Chukwudi Iwuji), il va agir en secret avec ses nouveaux comparses, la bad ass Harcourt (Jennifer Holland), l’informaticien Economos (Steve Agee) et la nouvelle recrue Adebayo (Danielle Brooks). Ceux-ci sont entraînés, surarmés, pleins de ressources… mais incapables de canaliser la violence et la personnalité hors normes de Peacemaker.
Le générique a fait son petit effet sur les réseaux sociaux, et il a l’avantage de donner un avant-goût parfait de la série. Au son de Do you wanna taste it du groupe de glam rock norvégien Wig Wam, les personnages exécutent un ballet débile et amusant, qui prend des airs de parodie de parade patriotique avec son aigle dans le dernier plan (Eagly, le compagnon méga-américain du héros). Avec James Gunn à l’écriture et à la réalisation, Peacemaker déborde de violence explosive, d’humour farfelu et grossier, de références à la pop culture et à l’univers DC, de rock bourrin (mais génial) des années 70 / 80. C’est une comédie d’action qui ignore le sens du mot subtilité alors qu’elle maîtrise l’absurde, l’outrance, le gore, et les jeux de mots stupides. Tous les personnages ou presque possèdent un côté excentrique (mention spéciale au merveilleux Vigilante, obsédé par son identité secrète), et particulièrement Peacemaker, à côté duquel le Homelander de The Boys passerait presque pour un enfant de chœur.
De la baston, du fun et de la musique qui dépote : les trois premiers épisodes sont extrêmement divertissants. On pouvait toutefois craindre que la série ne se cantonne à une comédie potache et violente. Or, la suite change la donne : sans renoncer à son style et son humour, Peacemaker enrichit son héros éponyme de façon surprenante et nous entraîne sur des chemins inattendus.
D’abord, la série se penche sur son histoire personnelle : Peacemaker a grandi dans la haine et la violence véhiculées par son père, le suprémaciste blanc White dragon (excellent Robert Patrick) qui forge ses armures mais le méprise et l’insulte. A partir de multiples traumatismes refoulés, Peacemaker nous montre l’homme derrière les muscles et parvient à créer un sentiment d’empathie. Ou du moins, à faire comprendre qu’en réalité, Peacemaker n’est pas quelqu’un de mauvais à l’origine, mais un gamin brisé qui a peur de décevoir un père qu’il aime autant qu’il le déteste.
Le renversement de regard sur Peacemaker, plus humain et fragile alors qu’il était si drôle et si haineux dans The Suicide Squad, fait basculer la série dans une autre dimension.Si tous les acteurs sont excellents, l’essentiel repose naturellement sur les épaules (exagérément larges) de John Cena, qui a d’ailleurs l’air de bien s’amuser. L’ex-catcheur donne à son personnage un côté humoristique irrésistible, un côté parfois agaçant, mais aussi une vulnérabilité insoupçonnée qui le rend terriblement attachant. Et c’est inévitable : ce pauvre gars, on finit par l’aimer.
Mais Peacemaker est aussi intéressante dans le propos éthique caché derrière la parodie. Pour Peacemaker, on peut voire on doit verser le sang y compris des innocents si cela sert la justice ou le Bien – même si sa position évolue au fil des épisodes. Et il raille Batman à plusieurs reprises, critique sa propension à laisser ses ennemis en vie de sorte que ceux-ci ont la possibilité de s’échapper et récidiver. Deux conceptions de la justice et de l’héroïsme qui s’affrontent, et un débat encore plus intéressant à la veille de la sortie du film The batman. Si Superman (qui en prend aussi pour son grade) renvoie à l’Amérique le reflet qu’elle aime donner d’elle-même (un super-héros puissant toujours prêt à protéger les faibles), Peacemaker montre une toute autre image. Un type violent, susceptible et imprévisible, qui se pose en défenseur de la paix à tout prix et qui tire sans réfléchir ni se soucier des dommages collatéraux.
Vous êtes prévenus : Peacemaker est pleine d’un humour débridé qui s’assume, de scènes d’action et de rebondissements avec un complot mystérieux ; mais elle est aussi moins débile et moins basique qu’il n’y paraît au premier abord. De sorte qu’on peut l’aborder comme un pur divertissement, prenant et réjouissant, mais qu’elle est aussi susceptible d’offrir un personnage plus riche et quelque chose de plus à qui veut bien regarder derrière le ton foutraque. All we are saying is : give peace(maker) a chance.
Peacemaker
A partir du 30 décembre sur Prime Vidéo
8 épisodes de 50′ environ.