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On débriefe pour vous… Genius : Aretha, joli portrait de la reine de la soul

C’est au tour de la chanteuse Aretha Franklin d’être au cœur de l’anthologie biographique Genius, dont les trois saisons sont désormais disponibles sur Disney+.

C’est quoi, Genius : Aretha ? On la surnommait la Reine de la soul, elle a vendu plus de 75 millions de disques et a signé des chansons mythiques : Aretha Franklin (Cynthia Erivo) est une légende de la musique. C’est sa vie que nous raconte la série, de ses débuts en tant que prodige du gospel jusqu’à la gloire, en passant par ses relations complexes avec son père (Courtney B. Vance), son combat pour les droits civiques, ses sources d’inspiration ou encore son influence musicale et culturelle. 

Après Einstein et Picasso, Genius se penche dans sa troisième saison sur la vie et l’œuvre d’une nouvelle personnalité. A l’origine, c’est l’écrivaine Mary Shelley que nous aurions dû découvrir ; c’est finalement à la chanteuse Aretha Franklin que s’attache cette fois la série anthologique de National Geographic, disponible en France sur Disney+. 

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Qu’elle parle science, peinture ou musique, Genius poursuit le même objectif , à savoir raconter la vie de son personnage principal, sonder ses sources d’inspiration et son processus créatif tout en essayant d’éclairer l’origine ou la nature de son génie. Comme bon nombre de séries ou films biographiques, Genius : Aretha s’appuie sur une construction que l’on connaît bien : deux périodes qui se répondent et s’entremêlent,  des allers-retours incessants entre  longs flash-back du passé et présent du récit. Première afro-américaine lauréate du prix Pulizter pour le théâtre et scénariste du film Billie Holiday, une affaire d’État actuellement au cinéma, Suzan-Lori Parks suit ainsi deux lignes temporelles distinctes : l’enfance et les débuts d’Aretha d’une part, l’essor et l’apogée de sa carrière d’autre part. 

Dans le passé, c’est dans l’Amérique ouvertement raciste et ségrégationniste des années 1950 que grandit Aretha, ballottée sur les routes au gré des tournées évangéliques de son père pasteur. Souvent livrée à elle-même, elle apprend seule à jouer du piano et démontre un talent de chanteuse que son père saura exploiter : devenant son manager, il la fait chanter du gospel au sein de son Église, lui fait enregistrer ses premières chansons à l’âge de 12 ans et  lui fait signer un contrat avec Columbia Records. Dans le même temps, on découvre le vécu douloureux de cette jeune fille, marquée par le racisme, la perte de sa mère et ses relations avec son père. Omniprésent, CJ Franklin est une figure essentielle pour comprendre la vie d’Aretha  : un pasteur baptiste, militant des droits civiques, sévère et rigoureux,  qui prêche la vertu mais boit et entretient de nombreuses liaisons. 

La jeune Aretha chante dans l’Eglise baptiste de son père

Dans le présent du récit, la carrière d’Aretha est en plein essor : elle a signé avec Atlantic Records en 1967 et, lorsqu’elle s’assoit au piano et commence à chanter, tout le studio reste bouche bée. Genius raconte alors  les sessions d’enregistrements des tubes Respect et Think, le premier disque d’or,  les disputes avec son manager et mari Ted White (Malcolm Barrett) qui la frappe et la trompe, la consécration des Grammy Awards de 1994… Sans oublier le double combat que cette grande dame a mené toute sa vie en tant qu’afro-américaine, pour les droits civiques et pour l’égalité hommes-femmes, en mettant ses chansons au service de ses convictions. 

Dans le biopic Respect prévu cette année (auquel a collaboré Aretha elle-même avant sa mort en 2018), l’artiste est interprétée par Jennifer Hudson ; dans la série, c’est Cynthia Erivo qui l’incarne. Et elle s’en sort admirablement bien, éclipsant même totalement les autres acteurs à l’exception du toujours excellent Courtney B. Vance. Erivo saisit quelque chose de la gestuelle, du port de tête, des attitudes de son personnage sans pour autant tomber dans l’imitation. Elle est surtout brillante et même époustouflante dans toutes les séquences musicales, qu’elle interprète elle-même d’une voix suffisamment mélodieuse et puissante pour qu’elle soit crédible en  Aretha Franklin (et ce n’est pas rien!).

En studio, Aretha signe ses plus grandes chansons

En revanche, la série perd nettement de sa force et même une partie de son intérêt  dès que l’on quitte un studio, une scène ou un piano. Les dialogues entre les personnages ont quelque chose de convenu,  leurs discussions oscillent entre le superficiel et le mélodramatique, certains silences ou regards tombent à plat. Et même avec toutes ses bonnes intentions, Genius tombe dans certains lieux communs ou clichés, ne réserve aucune surprise quant à la sélection des situations ou événements biographiques sur lesquels elle s’attarde – bref, bien qu’intéressante, elle reste formatée et un peu trop sage pour être passionnante.  

Reste le principal atout de la série, son immense qualité et ce qui lui donne finalement son âme : il s’agit de toute évidence d’une déclaration d’amour à Aretha Franklin, à sa musique et à son génie. Comme c’est souvent le cas avec les biographies musicales, la bande-son est extraordinaire : c’est un concentré de tubes et de chansons emblématiques, de grandes performances scéniques et de sons jazz, blues, pop, gospel et soul. Genius n’oublie jamais de mettre la musique au cœur de son histoire, intégrant les chansons de manière fluide et naturelle, Elle nous offre ainsi un aperçu de l’immense talent d’Aretha Franklin, artiste complète (pianiste, auteure, compositrice, interprète et productrice)  et s’attache à  l’une des questions centrales de sa vie, qu’elle exprime elle-même dans un épisode : comment, juste avec une voix et un piano, peut-on «transformer le fardeau de la vie en beauté » ? 

Série biographique classique mais plaisante, Genius : Aretha nous rapproche un peu de la Reine de la soul, figure majeure de la scène artistique afro-américaine du XXème siècle. Entre son parcours personnel, sa brillante carrière musicale et ses engagements socio-politiques, la série dessine un portrait convaincant – à défaut d’être flamboyant – de la grande artiste et de la grande dame que fut Aretha Franklin. Respect. 

Genius : Aretha.
8 épisodes de 50′ environ.+
Disponible sur Disney+.

About author

Traductrice et chroniqueuse, fille spirituelle de Tony Soprano et de Gemma Teller, Fanny Lombard Allegra a développé une addiction quasi-pathologique aux séries. Maîtrisant le maniement du glaive (grâce à Rome), capable de diagnostiquer un lupus (merci Dr House) et de combattre toutes les créatures surnaturelles (vive les frères Winchester), elle n'a toujours rien compris à la fin de Lost et souffre d'un syndrome de stress post-Breaking Bad
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